150 à 200 betteraviers tchèques ont manifesté, mercredi, à Prague, devant les ambassades d'Allemagne et de Grande-Bretagne. Les producteurs de betteraves sucrières s'opposent au projet d'Eastern Sugar de fermer cinq sucreries en Europe centrale, dont trois en République tchèque. Avec le départ du groupe sucrier germano-britannique, le pays perdrait, en effet, plus de 20 % de son quota de production. Traditionnelle puissance exportatrice, la République tchèque pourrait ainsi être amenée à importer du sucre. Un paradoxe qui fait grincer de nombreuses dents.
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Le groupe Eastern Sugar, co-propriété à parts égales des entreprises britannique Tate & Lyle et française Saint Louis Sucre, elle-même filiale du groupe allemand Südzucker, entend cesser l'activité de cinq de ses sept sucreries en République tchèque, en Slovaquie et en Hongrie suite à la diminution de la production sucrière imposée par l'Union européenne et à la baisse progressive des prix du sucre et de la betterave. L'an dernier, l'UE a été contrainte de limiter ses exportations de sucre par l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
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Bruxelles avait donc fixé un quota de 454 000 tonnes pour la République tchèque. Un quota qui n'est toutefois pas alloué à l'Etat, mais aux sucreries elles-mêmes. Voilà pourquoi la décision d'Eastern Sugar de quitter le pays alors qu'elle produisait plus de 100 000 tonnes par an a provoqué tant d'émois chez les planteurs tchèques de betteraves. Ces derniers s'estiment victimes d'un complot mené par les grands pays producteurs de sucre en Europe occidentale, à commencer par la France. Les betteraviers tchèques ne comprennent pas pourquoi Eastern Sugar quitte une région traditionnelle de production alors que le groupe présente des résultats économiques plus que satisfaisants. Les agriculteurs tchèques, majoritairement en provenance de la région de Hana, en Moravie, se sont donc rendu à Prague pour exprimer leurs revendications. « Notre objectif est que la betterave à sucre continue d'être cultivée là où elle doit être cultivée, c'est-à-dire dans les régions les plus fertiles, résume Jan Veleba, président de la Chambre agraire tchèque. Concrètement, il s'agit de Hana, en Moravie, qui est une des régions les plus fertiles non seulement en République tchèque, mais dans toute l'Europe. Nous ne comprenons pas pourquoi la betterave ne serait pas cultivée à Hana, alors qu'elle continuerait de l'être dans d'autres régions marginales en Europe. Nous voulons donc que 100 000 tonnes du quota sucrier reste en République tchèque et que celle-ci reste autosuffisante dans la production de sucre et ne soit pas contrainte d'en importer. »
Bien que convaincus de leur bon droit, les agriculteurs tchèques ne se font toutefois guère d'illusions sur l'issue d'un dossier qui représente pour eux une réponse à la question de savoir à qui profite la politique agricole commune de l'UE.