Il y a 30 ans, la visite de François Mitterrand dans la nouvelle Tchécoslovaquie
Les 13 et 14 septembre 1990, François Mitterrand effectuait sa première visite dans la nouvelle Tchécoslovaquie démocratique post-communiste. Dans un discours prononcé devant l’Assemble fédérale, l’ancien président français envisage alors déjà la reconstruction d’une Europe élargie.
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Dans l’histoire des différentes visites que François Mitterrand a effectuées en Tchécoslovaquie, celle de 1990 reste indéniablement dans l’ombre de celle de décembre 1988. Un an avant la révolution qui aboutira à la fin du régime communiste, le passage du président français avait marqué les esprits en raison notamment du petit-déjeuner partagé avec les dissidents et Václav Havel au siège de l’ambassade de France.
Invité près de deux ans plus tard par un Václav Havel devenu entretemps son homologue, avec lequel il partage un autre petit-déjeuner commémoratif, François Mitterrand est néanmoins accueilli avec tous les honneurs dus au chef d’une puissance occidentale qui a œuvré à la disparition du rideau de fer.
A l’époque, le rapprochement avec les anciennes démocraties populaires d’Europe de l’Est, dont les marchés économiques s’ouvrent enfin au monde, constituent une priorité aux yeux de la diplomatie française. Si on est encore loin de penser à une intégration de tous ces pays en pleine transformation politique et économique à une Union européenne qui s’appelle d’ailleurs encore Communauté, la volonté de François Mitterrand est toutefois bien de tisser de nouvelles relations bilatérales dans un souci, déjà, de plus grande coopération à l’échelle continentale.
L’intérêt est réciproque. Aux yeux de Prague, la France fait partie des relations de priorité. A la fois en raison des relations fortes qui existaient entre les deux pays avant la Deuxième Guerre Mondiale et de l’importance accordée précisément par François Mitterrand à une plus grande ouverture à l’Est durant son deuxième septennat.
Preuve de cette volonté commune : comme dans un souci de rattraper tout le précieux temps perdu pendant quarante ans, de nombreux échanges et visites entre représentants français et tchécoslovaques ont précédé le voyage officiel de François Mitterrand. Dans sa conception très gaullienne et personnelle de l’exercice du pouvoir, celui-ci incarne la France et sa politique étrangère pratiquement à lui seul. Et c’est donc en tant que tel, en grand patron d’un grand pays européen, qu’il est reçu à Prague.
Le 13 septembre, à l'Assemblée fédérale, présidée par Alexander Dubček, l'homme du Printemps de Prague, François Mitterrand devient le premier chef d’Etat d’un pays étranger à s’exprimer sur le sol du Parlement fédéral tchécoslovaque.
Au bout d’un discours d’une quarantaine de minutes, dans lequel il affirme s’adresser à tout le peuple tchécoslovaque, c’est debout que l’ensemble des députés tchèques et slovaques l’applaudissent. Aucun doute, ne serait-ce que formellement, sa visite, marquée par la signature de différents accords et la perspective d’une coopération dans les domaines des industries automobile et nucléaire, est un succès.
Mieux même, François Mitterrand propose d'organiser à Prague, dès 1991, des assises chargées de réfléchir à l'avenir d’une Europe qui serait élargie sous forme de confédération. Une idée qui sera qualifiée de « brillante » par Václav Havel, mais qui en restera à ce stade-là.
En attendant l’adhésion à l’Union européenne près de quinze ans plus tard, le projet de création d’une organisation qui chapeauterait tous les pays européens, y compris l’Union soviétique, ne se concrétisera jamais. Comme il faudra davantage de temps qu’on aurait alors pu le penser pour approfondir les échanges économiques entre la France et ce qui allait bientôt devenir la République tchèque.