Nucléaire : pour Dukovany, EDF veut « augmenter sa proximité avec l’industrie tchèque »
Le groupe français EDF fait partie des candidats au prochain gros appel d’offres très convoité du groupe public tchèque ČEZ pour l’agrandissement de la centrale nucléaire de Dukovany. Vakis Ramany est le vice-Président d’EDF. Il a répondu aux questions de Martin Balucha :
En novembre dernier, le PDG d’EDF Jean-Bernard Lévy était à Prague pour parler de la centrale et a rencontré le Premier ministre et le ministre de l’Industrie tchèques. Depuis lors, les discussions bilatérales se poursuivent-elles ?
« Oui, nous avons régulièrement des discussions avec l’administration, le gouvernement tchèque, mais aussi avec ČEZ. La France veut être un pays partenaire et a nommé à ce titre un haut-représentant pour le nucléaire, Philippe Crouzet, en visite récemment à Prague pour s’assurer du succès du projet Dukovany avec une technologie française, européenne et l’implication de l’industrie tchèque. Nous serons présents sur le terrain, notre objectif est d’augmenter de plus en plus notre proximité avec l’industrie tchèque. »
EDF fait partie des trois groupes que le gouvernement tchèque veut solliciter pour la centrale de Dukovany. Dans quelle phase de préparation êtes-vous actuellement ?
« Nous attendons avec impatience le premier questionnaire sur la sécurité, qui déclenchera de manière concrète le processus. Nous avons déjà engagé beaucoup d’efforts pour la préparation de cet appel d’offres, qui devait être lancé initialement un peu plus tôt. Aujourd’hui nous nous focalisons sur les discussions avec nos partenaires habituels – General Electric pour la turbine, Bouygues pour le génie civil – mais aussi l’ensemble du tissu industriel tchèque. Nous avons identifié plus de 175 fournisseurs tchèques et avons des discussions en cours avec trois clusters industriels : CATIA, Atomexpo et NSK. »
« Dans l’ensemble de ce processus, nous cherchons à consolider l’équipe industrielle qui délivrera le projet. Il nous faut comprendre l’ensemble des éléments de réglementation qui seront importants pour l’appel d’offres et sommes aussi en discussion avec Skoda JS, Sigma et d’autres pour avoir cette compréhension du terrain et des enjeux. »
Combien de personnes travaillent en France sur ce projet de Dukovany ?
« Pour ce genre d’appel d’offres à forts enjeux, nous avons des équipes d’environ 150 à 200 personnes en général. C’est une mobilisation conséquente qui montre qu’EDF est très impliquée et souhaite voir l’EPR 1200 remporter cet appel d’offres. »
Aucun EPR 1200 n’a été construit jusqu’ici, comment adaptez-vous ce projet à la centrale de Dukovany ?
« L’EPR 1200 est une adaptation de la technologie EPR à 1200 MW. La technologie EPR est sûre et fiable, elle l’a démontré notamment en Chine. Elle est certifiée dans quatre pays du monde, est en construction au Royaume-Uni et bientôt en cours de finalisation en France avec Flamanville 3. »
L’EPR est certifié, mais pour l’EPR 1200 c’est une nouveauté…
« Concrètement, nous utilisons les mêmes composants et adaptons quelques éléments pour passer à 1200 MW – au lieu d’un réacteur à quatre boucles pour 1650 MW nous passons à trois boucles pour 1200 MW, ce sont des adaptations que nous savons faire. »
Si ČEZ choisit finalement EDF, pouvez-vous garantir la coopération avec des entreprises tchèques ?
« Absolument, nous avons déjà commencé à échanger avec les entreprises locales. C’est notre stratégie partout dans le monde : au Royaume-Uni, pour la centrale Hinkley Point C, 64% des contrats de construction sont conclus avec des entreprises britanniques. (…)C’est une stratégie porteuse d’énormément de bénéfices socio-économiques dans les pays où nous allons. »
Un des critères les plus importants sera sans doute le prix, pouvez-vous garantir le prix le plus bas ?
« Vous savez, on montre à quel point l’EPR est compétitif quand on montre qu’il intéresse différents pays. (…) Nous croyons à un nucléaire compétitif dans un environnement décarboné. Quand on voit que le Royaume-Uni est en train de construire deux EPR et envisage la construction de deux supplémentaires, que l’Inde s’intéresse à six EPR à Jaitapur et que la France elle-même envisage un programme de six autres EPR, on a là un environnement propice qui montre à quel point l’EPR intéresse et peut s’insérer de manière compétitive. Plus on fait de projets, plus la chaîne industrielle de l’EPR devient compétitive et plus cela est avantageux pour les usagers et le client final. »