En Tchéquie, l’alcoolisme en augmentation chez les femmes
Le nombre de femmes tchèques considérées comme alcooliques est en hausse. D’après une recherche réalisée par la clinique d’addictologie du centre universitaire hospitalier de Prague, les femmes tchèques boivent en moyenne six litres d’alcool pur par an. La proportion de femmes alcooliques par rapport aux hommes croit également. Alors que le rapport était d’une femme pour dix hommes dans les années 80, il est aujourd’hui plus proche d’une femme pour quatre hommes alcooliques.
Le mois de février est marqué par la campagne « Suchej únor » (Février sec). A cette occasion, chacun est amené à tester son niveau de dépendance à l’alcool en s’abstenant de boire pendant un mois. Cette campagne annuelle a été lancée il y a presque dix ans par la League of Open Men, une ONG axée sur la santé mentale et physique des hommes.
Cependant, les statistiques indiquent que depuis la révolution de Velours, les femmes rattrapent peu à peu les hommes en termes d’alcoolisme. En effet, les maladies du foie liées à la consommation d’alcool sont la deuxième cause de mort la plus fréquente chez les femmes âgées de 20 à 54 ans.
Selon le psychothérapeute et président de l’Association tchèque des addictologues Ondřej Sklenář, cette tendance s’explique en partie par une rupture du plafond de verre après la révolution et au nombre croissant de femmes occupant des postes à haute responsabilité :
« Beaucoup de nos patientes sont des femmes très instruites, des femmes ambitieuses, qui occupent des postes haut placés. La pression de la société qui pèse sur elles et les attentes qu’on place en elles sont énormes… »
« Elles disent ressentir une forte autopression, beaucoup de stress et de tension, qu’elles tentent de soulager en se réfugiant dans l’alcool. »
Au micro de la radio tchèque, il affirme que le seul fait d’accepter le problème et d’aller consulter un spécialiste peut déjà être considéré comme une première petite victoire pour les alcooliques. Le travail d’un addictologue consiste à identifier les éléments déclencheurs qui ont amené le patient à sombrer dans l’alcoolisme.
Ondřej Sklenář : « Il peut s’agir de stress dû à une surcharge de travail, des problèmes conjugaux ou un divorce, mais ça peut aussi être causé par un sentiment de vide profond et de grande tristesse. Ce sont des problèmes intimes que l’on ne parvient à identifier que progressivement. »
Ondřej Sklenář est aussi le directeur de l’ONG Magdalena, qui apporte une aide mobile et à distance ainsi que des soins intensifs thérapeutiques dans son centre de réhabilitation à Prague. Ces soins s’étendent en général sur une période de trois à quatre mois. Mais l’association offre également des programmes de réhabilitation plus longs comprenant une thérapie de groupe, et pouvant durer jusqu’à un an pour les cas les plus graves.
Les signes classiques de dégringolade dans l’alcoolisme peuvent être identifiés par une augmentation progressive de la consommation quotidienne, selon le spécialiste :
« Au départ ça commence avec juste un verre ou deux, mais à la fin on tend vers deux ou trois bouteilles de vin par jour. Puis vient la perte de contrôle, ce qui signifie que vous ne pouvez plus réguler la quantité d’alcool que vous allez boire. Une nuit, vous pouvez avoir envie d’un seul verre et vous finissez par boire une bouteille entière. »
Un autre symptôme est le fait que l’alcool prend de plus en plus de temps au détriment d’autres intérêts personnels, des moments en famille ou du travail, souligne Ondřej Sklenář.
Il indique que dans un premier temps, la mise en garde de la famille et des amis sur la consommation excessive d’une personne peut souvent venir à l’aide de celle-ci.