Egyptologie tchèque : la tombe à puits d’un scribe royal mise au jour à Abousir

Les égyptologues tchèques qui travaillaient sur le chantier d’un site funéraire à Abousir ont annoncé avoir découvert une tombe à puits richement décorée d’un dignitaire jusqu’alors inconnu, Djehutiemhat, identifié comme étant un « scribe royal ».

L’égyptologie tchèque ne semble jamais en reste d’une nouvelle annonce de découverte importante dans sa concession d’Abousir : c’est lors de la campagne de fouilles d’avril à mai 2023 que la mission tchèque a mis au jour une tombe à puits datant du dernier quart du VIe siècle, soit vers 525-520 avant Jésus-Christ, dans la partie du site funéraire égyptien dédié au dernier repos des hauts dignitaires et commandants militaires des 26e et 27e dynasties. Ladislav Bareš, de l’Institut d’égyptologie tchèque nous en dit plus :

Ladislav Bareš  (deuxième de droite) | Photo: Petr Košárek,  Institut tchèque d'égyptologie de l'Université Charles

« Il s’agit d’une découverte récente, il est donc un peu tôt pour évaluer sa signification définitive. Il s’agit d’une nouvelle tombe d’Abousir qui s’inscrit dans une période spécifique. C’est presque une capsule temporelle : elle nous raconte ce que les gens vivaient à l’époque, leurs soucis, car la conquête de l’Égypte par l’Empire perse en 525 a été une période de grands changements sociaux. D’une certaine manière, ils étaient confrontés à des problèmes similaires aux nôtres : le choc de différentes cultures, la migration ou la nécessité de s’adapter à de nouvelles réalités… »

Photo: Petr Košárek,  Institut tchèque d'égyptologie de l'Université Charles

Les photographies des égyptologues, rendues publiques à l’occasion de l’annonce de cette découverte, témoignent de la beauté passée de cette chambre funéraire dont la partie extérieure a été détruite il y a déjà fort longtemps et dont le contenu a été presque entièrement pillé, probablement dès le Ve siècle avant notre ère. Aux archéologues ne reste donc qu’un ensemble de céramiques et ce qu’il a été impossible aux différents pilleurs de tombe d’emporter : la pierre, soit des murs richement décorés et un sarcophage avec la dépouille du défunt :

Photo: Petr Košárek,  Institut tchèque d'égyptologie de l'Université Charles

« La chambre funéraire est décorée selon les us de l’époque, correspondant à un dignitaire important, même s’il s’agit dans le cas présent d’un fonctionnaire de rang moyen. Le défunt voulait manifestement emmener avec lui ce qui était important pour lui : les textes qui devaient faciliter son passage de ce monde au monde de l’au-delà et lui garantir une existence heureuse. Il s’agit presque exclusivement de textes religieux. Cependant, les noms de ses parents y figurent également, ainsi qu’une série de dictons contre les dangers des serpents. Ces dictons étaient destinés à empêcher les serpents de lui faire du mal dans l’au-delà, tout comme c’était le cas dans le monde réel. »

Photo: Petr Košárek,  Institut tchèque d'égyptologie de l'Université Charles

Les archéologues rappellent que les tombes à puits représentent un type de monument funéraire particulier à cette période – mais aussi que le propriétaire de celle-ci avait une fonction importante. Etre scribe dans une société où l’alphabétisation concernait environ 2 % de la population était la garantie d’un rôle majeur dans la société – a fortiori quand on était un scribe royal, soit l’une des positions les plus importantes de l’Egypte ancienne, comparable à un ministre sans portefeuille aujourd’hui. Djehutiemhat, dont les ossements ont pu être analysés, est mort à un âge jeune selon nos critères, mais pas selon ceux de l’époque. En outre, il souffrait d’ostéoporose sévère :

Photo: Petr Košárek,  Institut tchèque d'égyptologie de l'Université Charles

« Du point de vue égyptien à l’époque, il n’était pas tellement jeune. Il avait environ 25 ans lorsqu’il est mort, ce qui signifie qu’il a dû exercer la profession de scribe pendant une dizaine d’années. Dans l’Égypte ancienne, le métier de scribe s’exerçait généralement en position assise : les scribes écrivaient à genoux, et son dos, en particulier sa colonne vertébrale, ont beaucoup souffert. Peut-être que ce n’était pas seulement dû à sa profession, mais aussi à des problèmes de santé similaires dans sa parentèle. »

Photo: Petr Košárek,  Institut tchèque d'égyptologie de l'Université Charles

Ces dernières années ont vu plusieurs découvertes archéologiques importantes pour la mission tchèque en Egypte. En 2021, par exemple, l’équipe de l’Institut d’égyptologie de l’Université Charles avait découvert à Abousir le plus grand dépôt de matériel d’embaumement jamais mis au jour en Égypte, soit environ 370 récipients en céramique contenant des matières premières et d’autres matériaux qui ont été utilisés dans le processus de momification.

Tout récemment, la mission tchèque annonçait avoir redécouvert la tombe du haut fonctionnaire égyptien Ptahchepsès Ier à Saqqarah. Cette sépulture avait été découverte par l’archéologue français Auguste Mariette il y a environ 160 ans avant de disparaître sous les sables.

Avec ses deux kilomètres carrés de superficie, la concession de la mission tchécoslovaque dans les années 1960, relayée par la mission tchèque depuis le début des années 1990, est une des plus importantes accordées à des étrangers par les autorités égyptiennes. Le site funéraire d’Abousir, situé à mi-chemin entre Gizeh, au nord, et Saqqarah, au sud, qui est au cœur des recherches archéologiques de la mission tchèque, a été utilisé sans discontinuer tout au long de l’histoire de l’Egypte ancienne et reste ainsi une source inépuisable de découvertes pour les archéologues tchèques.

Photo: Petr Košárek,  Institut tchèque d'égyptologie de l'Université Charles
Auteur: Anna Kubišta | Source: iROZHLAS.cz
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