À Prague, un atelier design et architecture pour aider les jeunes réfugiés ukrainiens et leurs parents
Chaque samedi, à Prague, un groupe de jeunes âgés de 4 à 16 ans se réunit autour d’un atelier art, design et architecture appelé « U Design ». Organisé par Alex Yeloyeva, architecte d’origine ukrainienne installée à Prague depuis huit ans, U Design a pour vocation d’être un lieu de rencontre pour ses compatriotes réfugiés tout en leur donnant l’opportunité de développer leurs connaissances.
Projet à but non lucratif qui vise à enseigner le design et l’architecture à des enfants ukrainiens réfugiés à Prague, U Design permet aussi à ses élèves et à leurs parents de se rencontrer, d’échanger et ainsi de former une nouvelle communauté. Une nécessité sociale pour beaucoup de familles qui, un an et demi après leur arrivée dans la capitale tchèque, restent encore souvent isolées et peu intégrées à la majorité. Cette initiative a été soutenue par Global Shapers, un réseau fondé par le World Economic Forum de Davos dont le but est d’œuvrer en faveur de causes telles que la protection des droits des minorités, la défense de l’environnement ou encore la promotion du développement durable. Partout où ils sont implantés, les « Shapers » s’attaquent, à leur échelle locale, à des problématiques d’envergure mondiale grâce au soutien financier de l’organisation. Alex Yeloyeva, qui vit à Prague depuis huit ans, a fondé U Design avant tout pour venir en aide, à sa manière, aux réfugiés ukrainiens :
« Je voulais me sentir utile pour l’Ukraine, mais mes connaissances en architecture et en design n’auraient pas vraiment servi mon pays, alors j’ai contacté des amis pour développer à Prague cet atelier ‘design et architecture’ et permettre aux enfants ukrainiens fraîchement arrivés de se rencontrer, d’échanger et d’apprendre des choses qui leurs seront utiles à l’avenir. Cela a commencé avec quelques amis de mon université, sans Global Shapers. L’université nous a aidés pour les premières étapes, mais au début, on fonctionnait grâce au volontariat et aux dons. »
À l’origine, l’atelier était exclusivement réservé aux enfants et adolescents ukrainiens âgés de 4 à 16 ans. Mais depuis peu, il s’est élargi aux enfants tchèques et d’autres nationalités, favorisant ainsi les échanges et l’apprentissage des langues. Car s’il est important pour les enfants ukrainiens de continuer à pratiquer leur langue maternelle, surtout pour les plus jeunes, il est tout aussi essentiel d’apprendre et de pratiquer le tchèque. Côtoyer des enfants d’horizons différents leur permet ainsi de communiquer, de se lier d’amitié et de se sentir mieux intégrés. De même, les instructeurs qui accompagnent Alex dans son projet sont eux aussi originaires de différents pays. Ukrainiens, Tchèques, Slovaques, mais aussi Philippins, Indonésiens, Libanais ou encore Brésiliens font de cet atelier un véritable melting-pot culturel enrichissant pour ses participants.
« Le design et l’architecture en général sont à la base de notre environnement. Tout ce qui nous entoure influence notre mode de vie au quotidien, nos choix et les personnes que nous sommes. Le but, dans un premier temps, est donc d’apprendre à ces jeunes à observer leur environnement et à développer leur esprit critique. On les amène à réfléchir sur des questions qu’ils ne se posaient pas avant, à comprendre comment est façonné le monde qui les entoure. Cela développe également leur créativité, leur capacité à résoudre des problèmes et à analyser, mais surtout, les élèves peuvent exprimer leur créativité et explorer le monde du design. C’est quelque chose qui est trop peu enseigné à l’école. »
L’atelier est divisé en trois groupes d’âge. Tandis que les plus jeunes font de la peinture moderne en s’inspirant d’un artiste et de son style, le deuxième groupe a un projet plus intéractif qui gravite autour du design et les plus âgés ont pour mission de concevoir un parc urbain, un projet orienté, donc, autour de la planification et du design urbain. En plus de ces ateliers hebdomadaires, des excursions sont organisées pour permettre aux élèves de visiter des musées, des bâtiments historiques ou simplement de s’inspirer de ce qui existe déjà pour leurs créations, qu’ils exposent ensuite au public à la fin du cycle. De quoi donner des idées aux plus passionnés d’entre eux.
« Certains parmi les plus âgés sont très intéressés par ce que nous proposons et souhaitent, après le lycée, poursuivre leurs études dans une école de design, d’art ou d’architecture. On voit leurs progrès au fil du temps, c’est vraiment gratifiant. Ils pourront montrer qu’ils possèdent déjà une expérience dans ces domaines. Même si le certificat qu’on leur délivre a surtout une valeur symbolique, il n’en reste pas moins la preuve qu’ils ont participé à l’atelier. Surtout, ils ont des maquettes, des plans et des modélisations qui attestent de leur niveau s’ils postulent pour des écoles de design ou d’architecture. Cela leur confère un certain avantage, c’est sûr, car peu de jeunes de leur âge savent faire ce qu’ils apprennent ici. »
Bien que les enfants soient la première cible du projet, U Design offre également à leurs parents la possibilité de s’intégrer au sein d’une communauté. Pendant que leurs enfants participent à l’atelier, ils se réunissent pour partager des moments de convivialité autour d’une tasse de thé ou de café. Cette pratique favorise le développement de relations entre les parents réfugiés qui peuvent ainsi échanger, s’entraider et retrouver, à Prague, un semblant de chez eux.