Parution de la première encyclopédie de la bande dessinée tchèque

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Le premier volume d’une nouvelle et première encyclopédie de la bande-dessinée vient de sortir dans les librairies. Preuve que l’intérêt pour ce genre littéraire longtemps négligé est de plus en plus important.

Nous l’avons souvent répété, à l’occasion de l’organisation à l’automne du festival komiksfest par exemple : la République tchèque n’est certes pas une grande puissance en matière de bande-dessinée, comme la France ou la Belgique, mais elle possède néanmoins une certaine tradition et depuis 1989 s’attache à faire redécouvrir ces récits illustrés.

Signe des temps, la parution récente du premier tome d’une encyclopédie de la bande-dessinée, consacrée aux histoires publiées en Tchécoslovaquie entre 1945 et 1989 dans un magazine appelé ABC. Robert Pavelka est un des deux auteurs de ce premier volume. Il explique les raisons qui les ont motivées :

Josef Ládek et Robert Pavelka,  photo: CTK
« Nous avions lu un article qui disait que pendant cette période, il n’y avait pratiquement aucune bande-dessinée. Nous avons dénombré d’abord 150 titres, puis un millier d’exemplaires du magazine, du coup, on s’est dit qu’il fallait en faire quelque chose. Nous avons commencé à travailler sur le sujet. On s’est dit que ça valait le coup parce que certains exemplaires ont été très difficiles à dénicher, certains étaient complètement oubliés, surtout les plus vieux numéros. »

« La révolte des cerveaux », « La deuxième expédition », tels sont quelques uns des titres des histoires contenues dans ce magazine ABC. L’objectif des deux auteurs de l’encyclopédie : montrer que même sous le communisme, il pouvait y avoir des récits intéressants et pas nécessairement instrumentalisés par la propagande. D’autant qu’ABC traitait notamment des sciences et techniques, des thèmes qui laissait leurs auteurs plus libres. Vlastislav Toman, ancien rédacteur en chef d’ABC :

« On ne peut évidemment pas dire que nous étions apolitiques, évidemment il y avait toujours des obligations à remplir dans le magazine, mais en gros on pouvait faire ce qu’on voulait. »

Pour le régime de l’époque, la bande dessinée restait néanmoins le symbole de la décadence culturelle occidentale. Même la publication de l’histoire de Lénine, tirée du journal communiste français L’Humanité, n’eut pas l’effet escompté puisque la nomenklatura tchécoslovaque considéra la bande dessinée comme un outrage ! Parmi les noms d’auteurs connus, outre Vlastislav Toman lui-même, on retrouve des personnalités telles que Jaroslav Foglar, connu pour ses récits d’aventures Rychlé Šípy (Les Flèches rapides).

Evidemment, aujourd’hui, voit le jour progressivement une nouvelle génération d’auteurs tchèques de bande dessinée, ainsi que de nombreuses traductions de BD étrangères. Outre l’aspect idéologique, quelle est la différence entre la bande dessinée de la période traitée par l’encyclopédie et la BD actuelle. Robert Pavelka :

« Aujourd’hui, on appelle les bandes dessinées des romans graphiques. Je dirais que c’est plutôt le récit, le contenu, qui sont mis en avant aujourd’hui, au détriment de l’aspect artistique. A l’époque, en outre, elles étaient vraiment faites à la main, on ne faisait pas des retouches par ordinateur. Donc malgré une certaine naïveté, les anciennes BD sont plus naturelles. Je dirais que la différence est la même qu’entre un CD et un dique vinyl. »

Les deux auteurs travaillent déjà sur le deuxième tome de l’encyclopédie : celui-ci sera consacré à la même période mais à d’autres magazines.