Pavel Kantorek, un physicien connu pour ses dessins humoristiques
Professeur à l’Université Reyrson à Toronto, Pavel Kantorek s’est fait connaître auprès de nombreux Tchèques pour ses dessins humoristiques. Le célèbre artiste, qui a publié plusieurs dizaines de livres aussi bien en République tchèque qu’à l’étranger, est décédé à l’âge de 75 ans ce dimanche au Canada, pays dans lequel il vivait depuis son émigration en 1968. Portrait.
Pavel Kantorek est né en 1942 à Olomouc, en Moravie. Après le baccalauréat, il commence à étudier la physique à la Faculté des sciences naturelles de l’Université Masaryk à Brno. Parallèlement, il crée des blagues dessinées, tout d’abord uniquement pour distraire ses amis, comme il l’a confié, il y a six ans de cela, à la Radio publique tchèque :
« Je faisais avec complaisance des caricatures de tous nos professeurs de lycée. Nous avions même publié une bande dessinée. J’étais donc très actif à l’époque déjà. Même si cela ne plaisait pas aux professeurs. »
Pavel Kantorek se fait connaître en tant que dessinateur et humoriste dans les années 1960. Ses dessins apparaissent régulièrement dans le magazine satirique Dikobraz. Il dessine essentiellement des animaux, notamment des chats et des souris, un peu à la manière d’Art Spiegelman :
« Ces dessins comportaient un message caché. Dans les années 1960, comme il y avait un certain relâchement politique en Tchécoslovaquie, les souris représentaient le peuple opprimé qui vivait sous le régime totalitaire et le chat représentait le pouvoir. Les dessins étaient pour moi un moyen pour transmettre des idées. Beaucoup de gens ont compris ce message. »Sa carrière artistique et scientifique est néanmoins interrompue en 1968 par l’invasion en Tchécoslovaquie des troupes du pacte de Varsovie. Pavel Kantorek a à l’époque seulement 26 ans :
« J’ai immédiatement quitté le pays le 21 août 1968. Les soldats sont arrivés dans la matinée. Je suis monté dans ma voiture et l’après-midi, j’étais à Vienne. Je me disais que si quelqu’un allait nous occuper je n’avais rien à faire dans ce pays. »
Après son départ pour le Canada, Pavel Kantorek se voit interdire de publier ses œuvres en Tchécoslovaquie. Cela ne le décourage toutefois pas de poursuivre ses activités à l’étranger. Le jeune chercheur, homme touche-à-tout, finit son doctorat à l’Université Ryerson. Le soir, il joue du piano dans un bar pour gagner sa vie.
A partir des années 1970, ses dessins humoristiques sont publiés aux Etats-Unis, en Suisse, en Allemagne, en Italie ou au Canada. L’artiste collabore avec différents magazines et journaux lancés par des dissidents tchécoslovaques, dont l’un des écrivains tchèques parmi les plus emblématiques du XXe siècle, Josef Škvorecký, lui aussi installé au Canada, mais il fait des dessins également par exemple pour le quotidien canadien The Globe and Mail. Aujourd’hui, Pavel Kantorek a à son compte plusieurs milliers de dessins et fables, regroupés dans plusieurs dizaines de livres.
Après la chute du régime communiste, en 1989, ses œuvres apparaissent de nouveau également en République tchèque et jouissent d’une grande popularité auprès du public local. Malgré ses visites régulières à Prague, l’artiste ne revient plus pour de bon dans son pays d’origine. A Toronto, Pavel Kantorek participe au développement de fibres optiques et enseigne la théorie des champs électromagnétiques, la théorie de la relativité et la cosmologie à la Faculté d’ingénierie et des sciences appliquées. Ses images ne cessent toutefois d’influencer de nouvelles générations d’artistes tchèques, comme en témoigne le dessinateur satirique Štěpán Mareš :« Il a beaucoup dessiné des animaux, des chats, des chiens etc. Mais il leur donnait des qualités humaines, c’était une sorte de métaphore. J’ai connu ses dessins déjà avant novembre 1989, je les ai trouvés dans de vieux journaux datant des années 1960. Je les ai beaucoup aimés. »
Deux expositions présentent actuellement l’humour de Pavel Kantorek en République tchèque. Jusqu’à fin août, le public pragois peut découvrir ses dessins, dont les plus anciens, au Centre de soins sociaux, situé dans le quatrième arrondissement. Jusqu’au 15 septembre, une quarantaine de ses dessins sont présentés également dans les locaux de la piscine en plein air de Litoměřice, en Bohême du Nord.