Pénurie de médecins (ukrainiens) dans les hôpitaux tchèques : c’est grave, docteur !
Parmi les nombreux secteurs d’activité en République tchèque qui souffrent d’une pénurie de main-d’œuvre qualifiée, la santé compte assurément parmi ceux qui sont les plus affectés. C’est la raison pour laquelle le « Projet Ukraine » a été lancé, il y a quelque temps de cela, entre autres pour faciliter l’embauche d’un personnel médical ukrainien. Toutefois, sa mise en pratique ne fait pas l’unanimité.
En avril dernier, face aux critiques des chambres des médecins, des stomatologues et pharmaciens, le Premier ministre Andrej Babiš avait promis d’interrompre ce projet. Les chambres critiquent notamment le fait que le personnel ukrainien embauché ne possède pas le même niveau de qualification que les médecins tchèques, comme le confirme Milan Kubek, président de la Chambre des médecins tchèque :
« Nous ne pouvons pas accepter que la sécurité et la santé des patients soit menacée. Nous n’avons rien contre l’emploi de médecins étrangers, bien au contraire. Cela fait au moins quinze ans que nous prévenons le gouvernement qu’il manque de médecins en République tchèque et qu’il convient de faire quelque chose pour empêcher les médecins tchèques de partir travailler à l’étranger. Pour autant, nous ne pouvons pas accepter que travaillent dans nos hôpitaux des gens dont le diplôme et la qualification ne sont pas certifiés, des gens qui n’ont pas passé d’examen de langue à leur arrivée et dont on ne sait pas dans quelle mesure ils sont capables de communiquer avec les patients et leurs collègues tchèques, et des gens qui n’ont passé l’examen d’approbation, ce qui signifie qu’ils ne possèdent pas une formation équivalente à celle des médecins tchèques. »Jusqu’à présent, le projet Ukraine permet aux médecins ukrainiens nouvellement arrivés en République tchèque de commencer à travailler sans qu’il leur soit nécessaire pour cela de suivre un stage préalable de six mois sous la surveillance d’un spécialiste tchèque et de passer un examen de tchèque. Et c’est précisément ce à quoi Andrej Babiš, sous la pression des chambres, avait donc promis de mettre un terme il y a un mois de cela. C’était toutefois sans compter sur une autre pression, cette fois des régions…
« Dans l’état actuel des choses, nous ne pouvons pas nous passer des services des médecins ukrainiens dans nos hôpitaux », a ainsi déclaré la présidente de l’Association des régions, Jana Vildumetzová, membre elle aussi du mouvement ANO, à la sortie, mardi, d’une réunion avec le Premier ministre et le ministre de la Santé. Andrej Babiš explique pourquoi il a finalement décidé de retourner sa veste sur la question :
« Il y a une très forte demande des régions et quelque 150 médecins qui pourraient être contraints de rentrer dans leur pays, ce qui menacerait les services dans certains hôpitaux. C’est pourquoi nous avons convenu de ce compromis. »
Concrètement, c’est dans les régions d’Ústí nad Labem et de Karlovy Vary, respectivement en Bohême du Nord et de l’Ouest, soit deux régions frontalières avec l’Allemagne, que la situation est la plus critique. Le compromis en question, qui doit donc permettre la poursuite du projet Ukraine, prévoit nouvellement de laisser un délai de temps aux médecins ukrainiens pour se mettre aux normes tchèques. Le ministre de la Santé, Adam Vojtěch, précise sur ce point :« Nous allons donner une période d’un an aux médecins ukrainiens qui n’ont pas encore passé l’examen et ne disposent pas de l’équivalence. Nous verrons ensuite comment la situation va évoluer. En attendant, la réalité - et cela ne concerne pas seulement la République tchèque mais de nombreux autres pays en Europe comme l’Allemagne – est qu’à l’avenir nous ne pourrons pas nous passer des travailleurs étrangers dans le domaine de la santé. C’est tout, c’est comme ça. »
Ainsi donc, dans un proche avenir, les médecins ukrainiens - ou en provenance d’autres pays - pourront commencer à travailler dès leur arrivée en République tchèque tout en disposant d’une année pour faire reconnaître diplômes et qualification.