Face à la pénurie de personnel, les hôpitaux tchèques emploient plus de médecins étrangers
Confrontés à l’exode de leurs professionnels de la santé, lassés de conditions salariales insuffisantes, les hôpitaux tchèques sont contraints de compenser les pénuries de personnel en employant un nombre de plus en plus important d’étrangers. Selon les chiffres communiqués lundi par la Chambre tchèque des médecins (ČLK), plus de 2 500 médecins étrangers travaillent actuellement dans les hôpitaux du pays, soit cinq fois plus qu’au moment de la chute du régime communiste en 1989.
« Au moment de la partition de la Tchécoslovaquie en 1993, c’est-à-dire lorsque les Slovaques sont devenus des étrangers en République tchèque, nous recensions 449 médecins étrangers. L’année dernière, ils étaient 2 557. Mais qu’il s’agisse des médecins slovaques, ukrainiens ou russes, la République tchèque ne représente pour beaucoup d’entre eux qu’un pays de passage. Ce qui leur importe, c’est d’obtenir la reconnaissance de leur diplôme dans un pays linguistiquement proche du leur de façon à pouvoir ensuite partir pour de meilleurs salaires en Allemagne ou en Grande-Bretagne, comme le font les médecins tchèques. »
Les médecins tchèques, justement : en 2015, plus de 200 d’entre eux fraîchement diplômés ont fait le choix d’aller travailler directement à l’étranger, tandis que plus de 350 autres de leurs collègues qualifiés ont formulé une demande auprès de la ČLK afin d’obtenir les documents nécessaires à une embauche à l’étranger, essentiellement en Grande-Bretagne (1 266 y sont actuellement employés), en Allemagne (942) et dans une moindre mesure en Autriche (106). Si tous ne sont pas partis, ce sont au total plus de 400 médecins tchèques qui, l'année dernière, ont abandonné le système de santé local ou ne l’ont pas même intégré.
Du coup, les hôpitaux tchèques remplacent ces spécialistes manquants par d’autres médecins en provenance de pays étrangers dont certains n’ont pas été formés dans les facultés tchèques. Une situation qui pose certains problèmes, selon Milan Kubek :« Nous ne sommes pas favorables par exemple à ce que les médecins originaires des anciennes républiques soviétiques soient autorisés à passer une partie de leurs examens en russe. Cela ne me semble pas normal. S’il s’agit d’un médecin slovaque qui vient travailler en République tchèque, nous avons la garantie que les facultés de médecine en Slovaquie respectent les standards établis par l’Union européenne. Ce n’est pas le cas pour les autres pays tiers et il y a donc nécessairement certains doutes relatifs à la qualification de leurs médecins. Mais comme les directeurs des hôpitaux sont confrontés à des effectifs insuffisants, ils en viennent plus ou moins à employer le tout-venant pour ainsi dire. »
Pour rappel, 1 120 euros était le montant du salaire mensuel moyen brut pour l’ensemble des personnes employées dans le secteur de la santé en République tchèque en 2013, infirmiers et aides-soignants compris. Pour les médecins et les dentistes, ce montant s’établissait au double (2 245 euros), mais seulement au prix de centaines d’heures supplémentaires effectuées durant l’année. A titre de comparaison, le salaire proposé actuellement en Allemagne à un médecin débutant dans un hôpital est de 4 220 euros, contre 870 euros en République tchèque. Pour augmenter le niveau de rémunération, la ČLK, les hôpitaux et les syndicats réclament donc au ministère de la Santé des dizaines de milliards de couronnes supplémentaires, qu’ils n’obtiendront cependant très probablement pas.