Politique : où va la gauche ?
A l'occasion du VIe congrès du Parti communiste de Bohême et Moravie de ce week-end, le président sortant, Miroslav Gebrenicek, a été reconduit dans ses fonctions. Une réélection qui a réduit à néant les visées de l'aile réformatrice personnalisée par Miloslav Ransdorf, l'ancien vice-président du parti. Jan Eichler est chercheur à l'Institut des relations internationales de Prague. Il nous explique quelles peuvent être les conséquences de la voie conservatrice choisie par le dernier parti de style stalinien en Europe libre, tant pour le parti lui-même que pour la vie politique tchèque :
-Quelles étaient les réformes que proposait la branche représentée par Miloslav Ransdorf pour moderniser le Parti communiste ? Et ces réformes avaient-elles, selon vous, une chance de succès ?
« Miloslav Ransdorf proposait une ouverture du parti. Il rêvait de la fin du coût des confrontations, de la critique de tout ce que le gouvernement fait et du départ des nostalgiques. Il voulait ouvrir le parti non seulement à la société civique, mais aussi aux entrepreneurs, aux nouveaux riches qui ont, si on peut dire, une certaine sensibilité sociale. »
-Dès lors, comment expliquez-vous ce choix, ce pas en arrière, fait par le Parti communiste ?
« Je ne le qualifierais pas forcément de pas en arrière. Je parlerais plutôt de la conservation du courant symbolisé par M. Gebrenicek. Il ne faut pas oublier que lorsqu'il est devenu président du parti, ce dernier n'avait que 10 % des intentions de vote, alors qu'actuellement c'est 20 %. »
-Alors, justement, selon les derniers sondages, le Parti communiste est non seulement le deuxième parti de l'opposition, derrière l'ODS (Parti civique démocrate), mais aussi pratiquement le premier parti de gauche, et ce alors même que la social-démocratie est le parti majoritaire de la coalition gouvernementale. Comment expliquez-vous cette évolution ?
« C'est tout d'abord l'usure du parti socialiste au pouvoir. Il y a des choses qui ont été présentées comme des succès, mais il y a également des échecs dans le bilan gouvernemental. Ils sont au pouvoir depuis déjà six ans et ils ont des ministres très critiqués, comme Petra Buzkova à l'Education nationale ou Stanislav Gross à l'Intérieur. En plus, le parti socialiste est affaibli intérieurement. Il y a une alliénation entre la présidence du parti, d'un côté, et sa base, de l'autre. Enfin, le troisème facteur sont les activités nuisibles de l'ancien président du parti et ex-Premier ministre, Milos Zeman, qui ne cesse d'attaquer et de tourner en dérision la présidence actuelle du parti, le Premier ministre, etc. »
-Doit-on exclure toute éventuelle collaboration entre la social-démocratie et les commnusites ?
« Au niveau gouvernemental, pour les six mois à venir, une coopération, ou l'approfondissement de la coopération, est exclue. L'état actuel des choses va plutôt être conservé. »
-Quel peut donc être, selon vous, le rôle des communistes sur la scène politique tchèque ?
« Au niveau du Parlement, il faut voir. Pour ce qui est des élections législatives, il faut attendre encore deux ans. On verra si le Parti communiste est capable de continuer à profiter du mécontentement de la population tchèque, de la politique gouvernementale de la social-démocratie, qui forme la coalition avec le Parti chrétien-démocrate et l'Union de la liberté. »