Portés de femmes : la troupe française qui dézingue le patriarcat au festival Letní Letná

Portés de femmes, 'Projet.PDF', photo: Benoît Martanchar / Letní Letná

Le festival Letní Letná, c’est en ce moment à Prague et jusqu’au 1er septembre, et dans la vaste programmation proposée par ce festival de nouveau cirque, une troupe française et exclusivement féminine : Portés de femmes. Les dix-sept artistes présentes sur scène s’attaquent avec panache aux stéréotypes de genre qui noyautent le milieu du cirque. Radio Prague a rencontré l’une des acrobates.

Portés de femmes,  'Projet.PDF',  photo: Ian Grandjean / Letní Letná

Précisons d’emblée que Claire Ruiz est voltigeuse, au sein de la troupe Portés de femmes. Pour ceux et celles qui n’auraient pas fait Cirque LV2, l’explication est en fait toute simple :

« Dans les portés acrobatiques, en général, il y a une porteuse qui est au sol, et une voltigeuse qui monte sur la porteuse ! »

Si les voltigeuses sont souvent des femmes, la porteuse est en fait la plupart du temps un porteur, et c’est là ce qui fait la caractéristique de cette troupe : vous n’y trouverez que des femmes. Seize acrobates, une chanteuse et une éclairagiste. D’où le nom : Portés de femmes.

Portés de femmes,  'Projet.PDF',  photo: Benoît Martanchar / Letní Letná
Une idée qui émerge, il y a quatre ans. Les acrobates se rencontrent à l’initiative de l’une d’entre elles à Toulouse, à la Grainerie, une salle encourageant le développement des arts du cirque. C’est à partir de cette rencontre que vient la volonté de fonder une troupe uniquement féminine. L’objectif est clair : changer les codes.

« Tout d’abord, c’est dans un souci de changer les codes de la discipline des portés acrobatiques, c’est-à-dire un homme qui porte, et une femme qui voltige. On a voulu essayer de faire ça que entre femmes, trouver d’autres manières de se porter, utiliser la force différemment, changer un peu d’axe et de point de vue par rapport à cette discipline. »

Le message est donc fondamentalement politique et féministe, ce qui est plutôt bienvenue dans un univers, le cirque, que Claire Ruiz qualifie volontairement de ‘machiste’ :

« A la base, c’est assez masculin, et un peu machiste. On a en tête l’image du magicien et de sa potiche… La femme n’a pas une très belle place, c’est juste une beauté canonique. Or dans le nouveau cirque, la femme est beaucoup plus présente. Comme c’est un courant important aujourd’hui de se regrouper entre femmes, nous nous sommes senties portées par cette envie de défendre les femmes et de chercher l’égalité. »

Portés de femmes,  'Projet.PDF',  photo: Pascal Perennec / Letní Letná
Le résultat est élégant, mais aussi virtuose, et parfois complètement déglingué, car la troupe est loin d’être dénuée d’humour. Alors, à quoi faut-il s’attendre ?

« Il faut s’attendre à avoir une vision féminine de tout un tas de sujets développés dans la vie de tous les jours, et je pense que oui, cela a son impact que de voir évoluer une troupe exclusivement féminine à des endroits où on attendrait plutôt des hommes : porter des gens, utiliser de la force… C’est quelque chose qui est d’ordinaire davantage propre aux hommes… On s’autorise aussi l’humour, les blagues, tout ce qu’un homme ou une femme peut s’autoriser, en fait ! »

C’est en effet le grand défi de Projet.PDF (oui, c’est le vrai nom du spectacle) : bousculer les codes du genre et les stéréotypes qui ne sont finalement pas plus fort dans le cirque que partout ailleurs dans notre société. Si les femmes peuvent représenter la grâce et la délicatesse, rien n’empêche de faire de même pour les hommes, et rien n’empêche les femmes de se montrer fortes et puissantes. Vous êtes prévenus !

Rendez-vous donc au festival Letní Letná, en plein cœur du parc de Letná à Prague jusqu’au 1er septembre…