Prague: Bestia triumphans?
Le noyau historique de Prague risque d'être rayé de la Liste du patrimoine de l'UNESCO. L'hebdomadaire Respekt situe cette menace dans un plus large contexte...
« Le centre historique se transforme en une city commercial », prétend Josef Stulc de l'Institut pour la protection des monuments, dans les pages de l'hebdomadaire Respekt et ajoute : « Les intérêts économiques de courte haleine prévalent à Prague sur la volonté de sauvegarder le centre historique pour les générations futures. »
Il y a plusieurs constructions qui déconcertent l'expert cité comme d'ailleurs beaucoup de ses collègues, ainsi qu'une grande partie des Pragois. Celle qui est la plus dénoncée, ces derniers temps, est réalisée sur la Place de la République, au centre ville. Un immense complexe est édifié à l'emplacement du bâtiment historique d'une caserne de l'époque thérésienne, recouvrant des fondements remontant au XIIIe siècle. Il contiendra des bureaux, des magasins, des restaurants et cafés, ainsi que quelques étages de garages souterrains. Une façon de rendre la circulation au centre ville encore plus dense et de détériorer la qualité de vie des habitants de la ville.
Ce chantier est lourdement critiqué, aussi, par les comissaires concernés de l'UNESCO. Sera-t-il la dernière goutte qui fera déborder le vase et rayer le noyau historique de Prague de l'UNESCO ? Ses commissaires se plaignent qu'il n'existe pas à Prague de dispositions juridiques contraignantes en matière de la protection du patrimoine. Et encore qu'ils ne sont pas régulièrement consultés par la partie tchèque à propos des interventions dans la partie historique de la ville, comme elle s'y est engagée au moment de l'inscription de Prague sur la Liste déjà citée.« Force est de constater, écrit le Respekt, que la reconstruction de la vieille caserne n'est que l'un des nombreux autres cas semblables. On a beaucoup parlé, par exemple, du nouveau centre administratif sur la place Charles, de l'ouverture d'un McDonald's, avenue Na Prikopech, ou encore de la galerie Myslbek, tout près du Théâtre des états. Sont envisagées d'autres édifications qui hantent d'ores et déjà les experts ».
Tout le monde ne voit pas pourtant l'évolution à Prague d'un oeil tellement pessimiste. L'architecte Patrik Kotas, chargé de cours à l'Ecole technique supérieure :
« Il y a d'un côté les pressions des investisseurs et de l'autre celles de la ville et des autoriés chargées de la protection du patrimoine. Il est très souvent difficile de concilier les deux regards. Tantôt on y arrive en atteignant un heureux résultat - plusieurs exemples existent à Prague, tantôt on y arrive sans trop d'inventivité créatrice.... Une chose est certaine : on ne saurait réaliser aujourd'hui de simples copies de bâtiments historiques ».