Radek John ou quand un député et ancien ministre revient à ses premières amours de journaliste
Un journaliste d’investigation très apprécié du public qui se lance dans une carrière politique, parvient en quelques mois aux plus hautes sphères de l’Etat, et décide finalement, à peine trois ans plus tard, de revenir à ses premières amours. C’est le parcours de Radek John, un des personnages publics les plus controversés dans la République tchèque de ces dernières années. Leader des Affaires publiques, ancien parti de la coalition gouvernementale passé dans l’opposition, et ancien ministre de l’Intérieur, Radek John, actuellement député, a choisi de rompre un tabou en annonçant, mercredi, qu’il reprenait son activité de journaliste.
Dans un communiqué de presse, Radek John a annoncé qu’il allait abandonner ses fonctions de président du parti Affaires publiques, mais pas son mandat de député. Cette dernière activité ne l’empêchera pas de publier des textes sur ce qu’il appelle « la pieuvre mafieuse qui vole l’argent public dans le pays », ainsi que des « informations provenant de la politique tchèque que les gens ont le droit de connaître ». Les reportages de Radek John seront publiés par les éditions Empresa Media, propriétaire notamment de Týden, un des principaux hebdomadaires d’actualité. Ces éditions sont détenues par Jaromír Soukup, personnage influent du petit monde médiatique tchèque qui avait soutenu le parti Affaires publiques avant les élections législatives en 2010.
Suite à cette annonce surprise faite mercredi par Radek John, de nombreuses voix se sont néanmoins élevées pour s’offusquer de ce qu’elles considèrent comme un conflit d’intérêts évident. Le journaliste et écrivain Karel Hvížďala estime, lui, qu’il s’agit là également d’un non-respect de la promesse qu’il a tenue en tant que député :« Il est certain qu’il va en retirer un avantage personnel. Radek John peut tirer profit de ce qu’il sait de l’exercice de ses fonctions politiques et il sera pour cela bien mieux payé encore qu’à la Chambre des députés. C’est clairement une violation de la loi. »
Selon la loi tchèque, un fonctionnaire ne peut pas compromettre l’intérêt public par l’utilisation de sa position, de ses droits ou des informations obtenues pendant l’exercice de ses fonctions pour en tirer un profit personnel. Or, Radek John a déclaré être « persuadé que dans un Etat démocratique, il ne peut pas exister de forces qui empêcheraient un homme politique de publier des faits constatés pendant son travail ».
Avant d’entrer en politique en 2010, Radek John, dont les reportages étaient diffusés par la chaîne de télévision privée Nova, était considéré comme un des meilleures journalistes d’investigation du pays. Parvenu à la tête du tout nouveau parti Affaires publiques, qui à l’époque avait fait de la lutte contre la corruption le thème central de sa campagne électorale, sa grande popularité et sa réputation de journaliste intègre lui avaient permis d’être élu et de participer activement à la formation de la coalition gouvernementale de Petr Nečas dont il était devenu le vice-président. Mais depuis, ce sont précisément les scandales de corruption qui ont coulé le parti Affaires publiques et avec lui un Radek John qui non seulement a été contraint d’abandonner ses principales responsabilités politiques, mais dont la réputation a également été singulièrement entachée.