Roms de Vsetin, quelle vie dans la périphérie ?

Jiri Cunek et les Roms de Vsetin, photo: CTK

Octobre 2006. Jiri Cunek, chrétien démocrate, actuel vice Premier ministre et ministre de l'Aménagement territorial, est alors maire de la ville de Vsetin dans l'est du pays en Moravie du nord. La municipalité décide le déménagement de familles roms qui habitaient le centre de la ville dans un immeuble en piteux état. Quelques unes de ces familles ont été envoyées dans la région de Jesenice non loin de Vsetin, mais la plupart d'entre elles doivent aller à la périphérie de Vsetin dans des sortes de préfabriqués en tôle. Levée de boucliers des associations Roms et de droit de l'homme. Certains parlent même d'un ghetto rom à l'entrée de Vsetin. Et ces derniers temps, on a beaucoup reparlé de cette situation. La ministre vert sans portefeuille Dzamila Stehlikova a proposé le 19 février dernier d'indemniser ces Roms à hauteur de 1,5 million de couronnes. Proposition refusée par Jiri Cunek, désormais ministre.

Jiri Cunek et les Roms de Vsetin,  photo: CTK
Ce qui frappe tout de suite, ce sont les couleurs vives des nouvelles habitations. Rouge feu, jaune, vert. Les deux immeubles en tôle qui sont dressés semble-t-il au milieu de nulle part, se voient de loin. Nous sommes à deux kilomètres du centre de Vsetin sur les hauteurs de la ville. Les voitures vont et viennent sans cesse et peu de bus desservent l'endroit. Une femme âgée dit qu'elle doit aller faire ses courses à pieds au centre alors qu'elle a des problèmes de jambes. Les enfants jouent en face des habitations entre un terrain vague et un parking. Quand on pose la question aux jeunes Roms qui bavardent au milieu des voitures s'ils ont des bonnes conditions de logements, la réponse semble aller de soi...

« Bien sûr que nous ne sommes pas contents, c'est vraiment pas bien ici. Ma chambre ne me satisfait pas du tout. Ce n'est qu'un container ici, en fait c'est pourri. Il fait froid, c'est mal isolé. Ce n'est fait pour y vivre ou y habiter. Et en plus c'est cher. »

Photo: CTK
A l'intérieur, c'est effectivement le manque d'isolation que l'on remarque. Tout résonne dans les escaliers, les murs, c'est de la tôle. Et dans les appartements, au premier abord, cela semble propre et plutôt confortable. Mais en plein hiver, les familles qui y vivent voient les choses autrement. Comme Adela, 20 ans, qui vit là depuis quatre mois avec les six autres membres de sa famille dans un petit F2:

« Ici il fait toujours froid. La petite est toujours malade. Et c'est petit pour nous tous. Et sur le mur, ça prend l'humidité, donc c'est tout moisi et donc ça sent mauvais. Avant on habitait vers l'hôpital au centre. C'était bien, j'étais habituée. J'y ai vécu 18 ans avec mes parents.. »

Les 210 habitants environ des immeubles se font discrets sur le prix exact qu'ils payent. Mais chez Adela, le loyer atteint plus de 7000 couronnes, sans les charges. Un prix élevé pour ce type de logement à Vsetin.

Un peu à l'écart à derrière les deux bâtiments se dressent une partie des locaux de l'association Diakona. Une association qui organise des actions notamment pour les personnes âgées mais vient aussi en aide aux Roms pour favoriser leur intégration. Notamment en organisant des activités pour les jeunes.

Dan Zarsky en est son directeur. Le terme de ghetto pour l'endroit ne le dérange pas. Pour lui ghetto désigne un lieu où vivent des personnes de même condition. Et s'il trouve la situation complexe, pour autant le logement proposé vaut mieux que le précédent.

« Ces appartements sont très petits pour beaucoup de locataires. La surface n'est pas grande bien sûr. Ce n'est pas optimal. Je crains que malgré tout les gens s'y habituent et s'y sentent de mieux en mieux. Mais je dois dire qu'ici sous plusieurs aspects c'est beaucoup mieux qu'avant. Par exemple là-bas, ils avaient une douche pour quinze personnes. Ici chaque appartement en a une. Ils ont l'électricité, l'eau et même la télévision. Donc oui cela s'est amélioré. »

Et le directeur de Diakona à Vsetin insiste sur une difficulté propre à la ville qui ralentit l'intégration de ces populations:

« Cette situation est nouvelle pour les familles roms comme pour nous. Simplement parce qu'avant on ne pouvait pas travailler avec l'ensemble de la communauté. Mais si vous voulez mon avis, ce sera pire encore car il est difficile de trouver une solution pour intégrer ces personnes. En partie parce que contrairement au reste de la République tchèque, à Vsetin, les enfants parlent principalement la langue romani avant d'aller à l'école. »

La solution de ces logements en tôle annoncée comme temporaire semble vouloir perdurer. Et dans le centre de Vsetin, les anciens logements des Roms ont été rasés. Au grand dam de ces familles qui y ont vécu une grande partie de leur vie. Et la bataille interne au gouvernement sur la question de l'indemnisation montre combien cette question reste délicate.