Suicides et mutilations chez les jeunes : Linka Bezpečí tire la sonnette d'alarme

Photo: Archives de Radio Prague

Les enfants et les jeunes en détresse seraient plus nombreux en République tchèque depuis quelques années. C’est le constat alarmant que fait le centre d’appel de crise Linka Bezpečí qui a enregistré une très forte augmentation du nombre d’appels concernant des suicides et des auto-mutilations ces cinq dernières années.

Photo: Archives de Radio Prague
Pression familiale et scolaire, brimades, problèmes de cœur ou simplement mal-être social, voilà les problèmes courants auxquels sont confrontés les jeunes Tchèques qui appellent à l’aide le centre Linka Bezpečí. En 2008 les psychologues de ce centre ont reçu 610 appels concernant des tentatives de suicide, 1313 en 2012. Le nombre total d’appels, lui, a augmenté de 14% en cinq ans, soit un total de 238 000 en 2012. Richard Schinko, directeur de Linka Bezpečí tire la sonnette d’alarme à la Radio tchèque.

« Chaque jour 750 à 800 enfants se tournent vers nous pour des raisons qui touchent réellement à une menace urgente de leur vie, comme l’envie de se suicider, une tentative de suicide en cours, l’auto-mutilation, des abus sexuels, de la maltraitance ou encore un syndrome de maltraitance par délaissement. Ce sont surtout des problèmes familiaux ou des disputes avec des camarades. L’éventail des raisons est vraiment large. On a enregistré une augmentation de ces thèmes graves ces dernières années, particulièrement en ce qui concerne les tendances suicidaires. »

Jan Kaňák répond au téléphone tous les jours. Il s’inquiète également de l’augmentation du nombre d’appels, mais note surtout l’apparition de nouveaux thèmes de discussions qui pointent un mal-être social ou un manque d’information face à certaines situations, Jan Kaňák.

Photo: Linka Bezpečí
« [Les sujets] portent aussi sur les relations avec des camarades ou des relations de coeur, on entend aussi le thème des brimades donc des situations difficiles à l’école. On reçoit des appels très sérieux concernant des envies de suicide ou des tentatives. Ces derniers temps il y a eu aussi une augmentation des thèmes touchant à la sexualité comme des questions sur la grossesse, la maturité sexuelle, les relations sexuelles... »

Autre danger : celui d’internet. Les Tchèques l’utilisent de plus en plus, et surtout de plus en plus jeune, sans qu’il y ait toujours une surveillance parentale des pérégrinations des enfants sur la Toile. Le centre Linka Bezpečí s’adapte aux nouveaux mœurs numériques et propose désormais de discuter par mail ou en ligne avec les jeunes qui n’oseraient pas appeler directement. Pour Jan Kaňák, le sujet d’internet est à prendre très au sérieux.

« Cette problématique est évidemment en hausse ; il y a de plus en plus d’enfants et d’adultes connectés et donc cela aborde divers autres problèmes sur lesquels ils ont besoin de nous consulter. Nous n’avons pas un chat accessible en continu mais il fonctionne quatre heures par jour, plus quatre heures le week-end. Il y a environ deux chats par jour, donc un chat dure environ une heure et demie soit beaucoup plus longtemps qu’un appel. »

Gratuit et anonyme, le numéro 116 111 de Linka Bezpečí fait désormais partie d’un programme européen visant à renforcer les droits des enfants, en collaboration avec les organismes et institutions nationales s’occupant d’aider et de protéger les enfants. Le but est de renforcer le suivi et l’accompagnement des enfants en difficulté, qui est généralement difficile pour les centres tels que Linka Bezpečí qui garantissent l’anonymat de ceux qui font appel à eux, Richard Schinko.

« Le service Linka Bezpečí est bâti sur une règle infranchissable qui est celle de l’anonymat. Pour cette raison les travailleurs de Linka Bezpečí n’ont pas d’effet retour avec les enfants. Le projet que nous sommes en train de commencer a pour but d’inviter des représentants d’enfants, de jeunes et d’adultes à des groupes de discussions et à des séminaires et de discuter avec eux non seulement de thèmes universels en Europe parmi ceux qui font appels à des services comme le notre, mais aussi de l’opinion des enfants sur le modèle, le fonctionnement et le développement des services. »

Des services à développer donc, bien que Linka Bezpečí coûte déjà à l’Etat tchèque 22 millions de couronnes par an, et que la politique d’extrême austérité actuelle pourrait bien sérieusement freiner les tentatives d’extension.