Un multi-instrumentiste français expose à Prague ses instruments en matériaux de récupération

Nicolas Bras

Du 11 au 12 septembre, le salon Maker Faire 2021 se tient au Parc des Expositions de Prague, après une édition 2020 en ligne. Ce salon rassemble des inventeurs du monde entier et de tout âge venus présenter leurs créations au grand public. Créé à San Francisco en 2006, Maker Faire a lieu dans toutes les grandes villes européennes et mondiales pour promouvoir l’ingéniosité. Les visiteurs sont invités à tester les créations et c’est ce qu’ils pourront faire au stand de Nicolas Bras, Parisien venu à Prague pour présenter son projet « Musiques de nulle part » qui consiste à récupérer des objets en tout genre pour les transformer en instruments de musique. Il a accepté de nous en dire plus au micro de Radio Prague International :

Photo : Canal YouTube de Nicolas Bras

« Je joue avec les instruments que je crée, je les expose mais je les vends de moins en moins. J’ai commencé en travaillant avec les enfants en tant que musicien intervenant en milieu scolaire. Je fabriquais donc des instruments pour jouer avec les enfants et d’autres qui me correspondaient en tant que musicien. J’ai réalisé environ 1 200 prototypes d’instruments de musique à base d’objets de récupération : ferraille, tuyaux, planches… »

Comment avez-vous réussi à développer votre projet ?

Photo :  Canal YouTube de Nicolas Bras

« J’ai d’abord proposé des ateliers et des expositions d’instruments. J’en avais déjà cinquante mais je ne savais pas vraiment en jouer. Peu à peu, on m’a demandé des démonstrations sur scène et j’ai développé un set solo avec une petite pédale de loop et beaucoup d’entraînement et d’improvisation. Ce set solo existe toujours, il a depuis été joué 800 fois sur scène. Il me sert de laboratoire et de point de rencontre avec les gens. Le développement s’est donc fait au fur et à mesure, même si les premières années étaient compliquées mais c’est maintenant mon métier à temps plein. »

Comment trouvez-vous les objets que vous récupérez ?

Photo : Canal YouTube de Nicolas Bras

« Je fais beaucoup les encombrants, je vais sur les trottoirs et je vois ce qui m’inspire. Des amis de différents corps de métier m’envoient aussi régulièrement un chargement chez moi. J’essaye d’acheter le moins possible même si parfois je n’ai pas le choix. J’ai de petits partenariats professionnels mais pas de mécénat. »

Quelle est votre principale motivation pour ce projet ?

Photo :  Canal YouTube de Nicolas Bras

« Au début, je voulais fabriquer plein d’instruments, mais je n’avais aucun savoir-faire et aucun moyen. Donc je ne pouvais pas travailler le bois par exemple car je n’avais pas d’outils, juste un cutter et une scie. J’ai commencé à découpant des bouts de tuyaux sur mes genoux. Je me suis ensuite formé pour diversifier les matériaux que j’utilisais. J’avais vraiment besoin de fabriquer des instruments avec tout ce que je trouvais. Dans un second temps, la rencontre avec les objets de seconde main, les rebuts et les déchets m’a permis de réaliser que je pouvais leur donner une seconde vie en m’inspirant des propositions musicales de ces objets. Cela a développé un amour pour ces objets, une certaine poésie. Cela m’a permis de me rapprocher de gens travaillant dans l’écologie et dans des ressourceries où je vais régulièrement. »

Quel regard portez-vous sur ces salons rassemblant des créateurs ?

« C’est une facette de la reconnaissance. Ce qui m’éclate avec ce projet, c’est qu’en gardant toujours le même objectif, je peux évoluer dans des mondes très différents en peu de temps (musique actuelle, pédagogie, recherche scientifique…). C’est très nourrissant d’avoir de multiples points de vue. Les Maker Faire sont donc un environnement rêvé pour moi. Rencontrer d’autres créateurs permet aussi de s’inspirer mutuellement et de développer de nouvelles idées ensemble. Des ingénieurs d’imprimerie 3D à Prague sont très intéressés par mon projet, ils ont même payé mon trajet pour que je vienne les voir. On va donc pouvoir discuter pour réfléchir à comment assembler nos compétences entre objets de récupération et nouvelles technologies. J’ai hâte de rencontrer du monde au salon. »

Quel regard portez-vous sur la créativité et l’inventivité dans le monde actuel ?

Photo :  Canal YouTube de Nicolas Bras

« J’ai l’impression de découvrir des créations assez folles tous les jours, je ne pense pas que la création se soit tarie. C’est de plus en plus facile pour les gens qui veulent créer car tout est à disposition avec des ressources en ligne et des gens qui partagent leur savoir. Créer des tutoriels en ligne est donc la première chose que j’ai essayé de faire quand je suis devenu musicien-bricoleur. De plus en plus de gens se mettent à créer des inventions car les possibilités de se lancer sont multipliées. Quand j’ai commencé, les ressources en ligne étaient beaucoup plus faibles. Je ne sais pas si chacun se sent plus ou moins créateur mais les choses sont plus faciles pour ceux qui ont besoin de créer, ce qui leur permet d’aller plus loin. Le côté créateur-vidéaste permet d’être soutenu par une communauté virtuelle qui vous aide financièrement et permet de créer de manière totalement libre et d’aller au bout des projets, même ceux qui ne montent pas sur scène. »

Auteur: Zoé Samin
mot-clé: