Une couronne franchement débridée

Couronne

D'usage on se félicite qu'une monnaie nationale se porte bien. Et comme en toute chose, là aussi, l'excès est nuisible. C'est ce qui est arrivé ces derniers temps à la couronne tchèque. La banque nationale, ensemble avec le gouvernement, ont décidé de mettre fin à sa dangereuse cavale. Omar Mounir.

Effectivement, la couronne a littéralement rué dans les brancards, atteignant des seuils quasiment inimaginables. Cela s'est passé lors de la journée de mardi. Nous commençons par le franc français, qui n'a pas fait que tomber, vis-à-vis de la couronne, au-dessous du seuil infranchissable des 5 couronnes, tout au moins dans les esprits, mais qui s'est contenté de 4,8 couronnes en moyenne, entre un 4,7 à l'achat et un 4,9 à la vente. L'euro, lui, ne coûtait plus que 31,29 couronnes. La couronne a aussi pris de la vigueur vis-à-vis du dollar, affiché à 34,72 couronnes, alors qu'il n'y a pas longtemps, il fallait plus de 40 couronnes pour un dollar. Dans ce laps de temps, un spéculateur averti de la chose monétaire gagnerait aujourd'hui l'équivalent d'un franc français par dollar, en troquant sa couronne contre la monnaie américaine. Bien entendu, les Tchèques partant en vacances de fin d'année en Occident se frottent les mains, mais les exportateurs font de plus en plus grise mine.

Compréhensible dans ces conditions que la Banque nationale tchèque, ensemble avec le gouvernement, envisagent de mettre fin à cette escalade. Partant de ce que le dernier bond de la couronne est dû essentiellement à la vente, par le gouvernement, de partie du secteur énergétique, le Premier ministre, Milos Zeman, et le gouverneur de la banque, Zdenek Tuma, envisagent trois variantes pour atténuer le choc de cette entrée d'argent : l'achat de partie du revenu de cette vente par la Banque nationale, qui le paierait de ses réserves, ou le maintien d'une partie de ce revenu dans le compte de devises du gouvernement pour les dépenses futures, voire l'encaissement en couronne tchèque, toujours par le gouvernement, des produits de la vente. Aucune décision n'est encore prise.

Mais n'y aurait-il vraiment que cela derrière cette escalade de la couronne ? Ne serait-ce pas aussi parce que nous sommes à la veille d'un bouleversement monétaire en Europe, de son nom l'euro, et qui donne des frissons aux détenteurs de fonds et les incite au wait and see ? Ne serait-ce pas aussi la conjoncture internationale ? Ou tout simplement la qualité de bonne élève de la Tchéquie à l'admission ? Et pourquoi pas tout cela à la fois? Car il faut plus qu'une opération de privatisation pour faire danser une monnaie de la sorte...