Václav Klaus et la signature du Traité de Lisbonne : le doute s’installe
Depuis la déclaration de Václav Klaus vendredi dernier, où le président tchèque a imposé une nouvelle condition avant de signer le Traité de Lisbonne, la ratification de ce dernier en République tchèque est de plus en plus incertaine. Mardi, le Premier ministre Jan Fischer s’est rendu à Bruxelles pour essayer de calmer les esprits et attester de sa bonne volonté. Les juristes des Vingt-sept, à Bruxelles comme à Prague, s’efforcent de trouver une solution à une situation qui paraît de plus en plus bloquée, tandis que le président joue de son pouvoir et laisse quelque peu entendre que, quoiqu’il arrive, il ne signera pas.
A Bruxelles comme à Prague, la requête du président Klaus suscite un certain nombre de problèmes juridiques, même si la majeure partie des juristes, tchèques comme européens, s’accordent sur le fait que l’utilisation du spectre des décrets Beneš est juridiquement infondée. C’est ce qu’explique Michal Tomášek, professeur à la faculté de droit de l’Université Charles de Prague, où il dirige la chaire de droit européen :
« Je peux seulement affirmer que le droit européen n’est pas rétroactif. Cela veut dire que le Traité de Lisbonne, s’il entre en vigueur à partir de 2010, ne s’appliquera qu’à partir de 2010, et qu’il ne pourra agir sur aucune relation juridique qui a existé avant. Par exemple, il est impossible qu’il s’applique aux décrets Beneš de l’après-guerre. Le principe de non rétroactivité est un principe de base du droit. »
En rentrant de sa visite bruxelloise, le Premier ministre a du faire face à une deuxième mauvaise nouvelle ; le président, resté quelque temps silencieux, a fait savoir, via son secrétaire, Ladislav Jakl, qu’il ne donnerait aucune garantie à sa signature. On écoute Ladislav Jakl à la télévision tchèque :
« Le président n’a jusqu’à présent obtenu aucune garantie que les choses vont évoluer dans le sens qu’il souhaite. Il a obtenu l’assurance d’une bonne volonté, que les négociations iront dans le bon sens, mais un échange de promesse contre une garantie, ce n’est pas une bonne affaire. »
Après l’appel de quelques hommes politiques tchèques, et surtout de diplomates et représentants européens, d’autres solutions face à l’obstacle Klaus commencent à être étudiées. Selon certains juristes, la signature du président n’est pas indispensable pour la ratification du Traité, à condition toutefois que le président en donne l’autorisation et qu’il mandate un autre responsable politique – le Premier ministre par exemple – pour qu’il appose sa signature à sa place. Cette solution reste néanmoins contestée et ne résout pas le fond du problème. Selon le professeur Tomášek, des modifications du Traité pourraient avoir lieu après sa ratification:
« A mon avis, la meilleure solution serait que le président reçoive l’assurance des représentants des membres de l’Union européenne qu’ils s’occuperont de ses propositions, pas seulement sur le plan politique mais aussi sur le plan juridique. Cela veut dire qu’il y aurait une révision possible du Traité de Lisbonne. Dans cette hypothèse, le président ratifierait le Traité, et la République tchèque, comme Etat membre, proposerait quelques changements dans le Traité de Lisbonne qui seraient acceptables pour la République tchèque, et que le président estime indispensables. »
Selon un journaliste du quotidien britannique The Times, le président Klaus, alors qu’il se trouvait dans la ville de Pardubice, aurait laissé échapper quelques mots assurant que quoiqu’il arrive, il ne signerait pas. L’information a été démentie, mais les médias sont de plus en plus pessimistes. Le président Klaus a jusqu’au 27 octobre pour faire part de sa décision définitive, date à laquelle la Cour constitutionnelle rendra son verdict sur la plainte déposée contre le Traité de Lisbonne par dix-sept sénateurs ODS.