Tension entre Schwarzenberg et Klaus sur l’opt-out à la Charte des droits fondamentaux de l’UE : beaucoup de bruit pour rien

Václav Klaus, Petr Nečas, Karel Schwarzenberg, photo: CTK

Selon le quotidien Lidové Noviny, le président Klaus et son ministre des Affaires étrangères Karel Schwarzenberg s'opposent sur la question de l’opt-out à la Charte des droits fondamentaux de l'UE, obtenue lors de la ratification du traité de Lisbonne.

Karel Schwarzenberg,  photo: CTK
Le torchon brûle entre Schwarzenberg et Klaus : dans un entretien accordé au quotidien Lidové Noviny, le président Václav Klaus ne croit pas en la volonté de Schwarzenberg de faire valoir et de défendre cette exception à Bruxelles. Klaus y souligne que Schwarzenberg « se trouve de l'autre côté des barricades ». Le ministre a, quant à lui, indiqué que les opinions du président étaient « originales » et imprégnées de l'héritage des années 1950 « où l'on réprouvait tout ce qui était lié à l'Eglise et à la noblesse ».

Cette dérogation avait été exigée aux autres Etats membres l’an dernier par le président tchèque pour ratifier le traité de Lisbonne. Elle visait à empêcher une remise en cause des Décrets Beneš, de l'après-guerre, entérinant l'expulsion et l'expropriation de trois millions d'Allemands des Sudètes.

Cette polémique intervient à la suite de révélations de Lidové Noviny qui soutient que la ratification de cet opt-out pourrait être menacée. Alors que le texte devait être annexé au prochain traité d’adhésion (vraisemblablement celui de la Croatie), le quotidien affirme que « les diplomates à Bruxelles [auraient] changé d’avis » et envisageraient une ratification séparée. Un scénario qui compromettrait la ratification car des Etats comme l’Autriche ou la Hongrie ont fait savoir qu’ils comptaient s’y opposer, ce qu’ils ne feraient pas dans le cas d’une ratification conjointe avec le traité d’adhésion, afin de ne pas prendre en otage le nouveau pays adhérent.

Václav Klaus,  Petr Nečas,  Karel Schwarzenberg,  photo: CTK
L’affirmation a été démentie par le président Klaus et le premier ministre Petr Nečas qui ont rappelé que les Etats avaient pris des engagements et qu’il n’y avait aucune raison pour qu’ils reviennent dessus. L’annonce de Lidové Noviny semble en effet quelque peu étonnante dans la mesure où les conclusions du Conseil européen des 29-30 octobre 2009 spécifient clairement que « les chefs d’Etat ou de gouvernement sont convenus d’annexer, lors de la conclusion du prochain traité d’adhésion, le protocole » tchèque. Si une ratification séparée serait néanmoins possible, il semble peu probable que les chefs d’Etat prennent le risque de rouvrir une crise pour si peu. D’autant que cela reviendrait à mettre à bas les principes de base de l’UE, à savoir qu’elle est une union de droit fondée sur la coopération loyale entre les Etats et les institutions.

En réalité on est davantage dans le politique que le rationnel. Cet opt-out fait surtout office de trophée pour un président tchèque en guerre avec l’UE. Car malgré ses allégations, la Charte des droits fondamentaux ne s’applique qu’à la législation produite par les institutions communautaires, et elle n’est pas rétroactive, ce qui empêche toute remise en cause des Décrets Beneš sur cette base. Un simple trophée donc qui n’empêchera pas le contenu de la Charte des droits fondamentaux de s’appliquer à la République tchèque puisque le pays est déjà signataire de la Convention européenne des droits de l’homme, dont la Charte n’est qu’une copie. Beaucoup de bruit pour pas grand-chose donc.