Vin : les viticulteurs tchèques plutôt favorables au projet de réforme de l'UE

Les ministres de l'Agriculture des Etats membres de l'Union européenne ont entamé des discussions, mardi, sur le projet de réforme du secteur du vin. L'objectif de ces mesures est notamment de mettre fin à la surproduction actuelle et de répondre à la concurrence des vins en provenance des Etats-Unis et des pays de l'hémisphère sud. Une réforme qui concerne également les viticulteurs tchèques.

Jiri Sedlo
Avec 18 000 hectares et un demi-million d'hectolitres de vin produits en moyenne par an, la République tchèque fait figure de nain sur le marché européen, loin derrière la France, l'Italie et l'Espagne qui à elles seules représentent environ 80% de la production européenne. Pourtant, non seulement le vin est devenu une boisson toujours plus appréciée des consommateurs tchèques, mais une vraie tradition viticole existe depuis longtemps essentiellement dans le sud du pays, en Moravie. Le projet de réforme actuellement sur la table à Bruxelles intéresse donc au plus haut point les viticulteurs tchèques, comme nous l'a confirmé le président de la Fédération des viticulteurs de République tchèque, Jiri Sedlo :

« Il s'agit de la quatrième réforme depuis 1970 quand a été instaurée l'organisation commune de marché vitivinicole. Mais c'est la première réforme qui nous concerne directement et à laquelle nous pouvons participer. Cette fois, je pense qu'il y a beaucoup de mesures importantes. Avant tout, il s'agit de la suppression de la distillation ou plutôt des subventions communautaires pour la distillation, mesure que je considère comme positive, car 40% du budget annuel pourrait être consacré à quelque chose de plus raisonnable dans le cadre de la viticulture. Mais ce qui ne nous plaît pas est le transfert de cet argent pour l'arrachage des vignes. 400 000 hectares au sein de l'UE devraient être supprimés dans les cinq ans, mais cela signifierait que dès 2013 le marché serait totalement libre, c'est-à-dire qu'on arracherait d'abord les vignes, mais ensuite chacun pourrait en planter de nouvelles. »

Si les responsables européens entendent donc réduire de 12% les 3,4 millions d'hectares actuels de vignes afin, entre autres, de limiter la surproduction et de réaliser des économies sur la distillation, Jiri Sedlo n'est toutefois pas convaincu que ce plan aille dans le sens d'une amélioration de la qualité du vin :

« Je n'en suis pas certain, effectivement. Car si d'un côté, la Commission conclut des accords avec, par exemple, les Etats-Unis, où chacun a le droit d'ajouter du sucre, des acides et même jusqu'à 30% d'eau, alors je ne comprends pas pourquoi elle veut nous interdire l'addition de sucre. »

Bien plus que l'arrachage éventuel des vignes, l'interdiction de l'addition de sucre est, en effet, l'un des points du projet qui inquiète le plus les viticulteurs dans un pays moins ensoleillé que ceux du sud de l'Europe. Leur président explique pourquoi :

« Cela ne concerne pas uniquement la République tchèque, mais l'ensemble des pays de l'ancienne monarchie austro-hongroise, ainsi que l'Allemagne et le Luxembourg. Je pense qu'une telle interdiction ne peut pas être adoptée. C'est un procédé qui existe depuis plus de deux cents ans et il n'est pas possible de le supprimer comme ça, d'un seul coup. D'un autre côté, il faut préciser que cette addition de sucre ne représente que quelques pour mille dans le contenu, le volume total. Ce n'est même pas un pour cent. Or, un tel ajout est courant dans les pays du sud sous la forme d'acides. »

Après une année 2005 pour le moins difficile, les viticulteurs tchèques espèrent toutefois que la réforme, qui entrerait en vigueur en 2008 si elle était adoptée, les fasse sortir d'une situation précaire pour eux comme pour leurs collègues communautaires. Car comme le rappelle Jiri Sedlo, tous les viticulteurs de l'UE ne sont pas placés sur le même pied d'égalité :

« Bien entendu, nous recevons des dotations de l'Etat tchèque et de l'UE, mais dans l'ensemble, elles sont si faibles qu'elles ne représentent même pas 20% de ce que reçoivent les autres viticulteurs européens. Notre objectif est donc d'arriver au niveau des autres Etats membres. Nous avons intégré l'UE en 2004 et nous avons été frappés par la crise un an plus tard, quand les vendanges ont été catastrophiques du point de vue du prix du raisin. Cela a un peu déréglé le marché et j'espère que la réforme que prépare l'UE va y remédier. »

Dans un pays traditionnel de bière, il est vrai que les viticulteurs n'ont pas toujours la vie facile. Mais l'évolution des habitudes de consommation des Tchèques et l'attirance, le goût des jeunes pour le vin, rouge comme blanc, pourraient les aider dans un proche avenir à faire mieux que s'en sortir.