Vlasta Burian: grotesque et absurdité de la vie.

Vlasta Burian, photo: CTK

Vlasta Burian: ce nom ne vous évoque sans doute pas grand-chose, mais en Tchéquie, qui ne connaît le nom de cet acteur, roi des comiques tchèques? Présentation d'un destin tragique avec Guillaume Narguet.

Vlasta Burian,  photo: CTK
Si la comparaison était faisable, sans doute classerait-on Vlasta Burian dans la catégorie des Charlie Chaplin et Fernandel. Peut-être pas tant du fait de leurs répertoires, si complets et diversifiés qu'il serait presque grossier de les comparer, mais plutôt de celui d'un constat. Quarante ans après sa mort, en janvier 1962, les comédies dont il tenait le rôle principal ne cessent de ravir et d'apporter aux Tchèques, grands et petits, rire et bonheur. Inoubliable, il est resté gravé dans les mémoires bien qu'au lendemain de la Deuxième guerre mondiale il se soit retrouvé victime d'une injustice, née de la jalousie et de la stupidité humaine, qui brisa une grande partie de sa carrière.

Vlasta Burian voit le jour en 1891 à Liberec, en Bohême du nord. Dès le début de sa carrière sur scène, il aime à parodier et très vite, la véritable facette de cet acteur au talent inné apparaît, celle d'un chantre de l'improvisation, capable d'une représentation théâtrale à une autre, du jour au lendemain, de jouer le même rôle en faisant largement évoluer sa partition, au désappointement des critiques, mais surtout au plus grand plaisir des spectateurs. A partir de 1923, de sa première comédie burlesque, et jusqu'en 1930, il excelle dans des films muets. Entre-temps il ouvre son propre théâtre, devenu aujourd'hui, à Prague, le théâtre Comédie. L'année 1930 sera marquée par son premier film sonore. Par la suite, et jusqu'en 1942, il tournera entre deux et quatre films par an, se fera entendre à la radio, enregistrera des disques et posera pour de nombreuses affiches publicitaires. Il est alors au sommet de sa carrière.

Mais la Libération de la Tchécoslovaquie marquera pour cet homme, convaincu qu'une joie partagée se transforme toujours en double joie, un tournant. Accusé de collaboration avec les Allemands, il passera notamment trois mois en prison, sans jamais, terrible absurdité, avoir accepté de proposition de film allemand. Campagnes de presse contre lui, accusation montée de toute pièce, procès truqué et interdiction de scène le ruinèrent moralement. De 1950 et jusqu'à sa mort en 1962, il se consacrera essentiellement à des spectacles de variétés, la plupart du temps dans des conditions indignes de son talent.

Cette semaine, à l'occasion de la commémoration des quarante ans de sa mort, et après avoir été réhabilité en 1994, sa dépouille funéraire devrait être transférée au cimetière de Vysehrad, sorte de panthéon tchèque. Un hommage certes tardif, mais mérité pour cet ancien gardien de but du Sparta de Prague qui, un jour, déclara: " Je ne sais pas sur quoi repose mon humour, mais je sais que j'aime les gens et que tout ce qui n'est pas sincère m'apparaît comme grotesque." Ne doutons donc pas de la sincérité de ce dernier hommage rendu au roi des comiques tchèques.