« Winnetou », un des acteurs français les plus connus en République tchèque, est mort
L’acteur français Pierre Brice est mort samedi, à Paris, à l’âge de 86 ans des suites d’une pneumonie. Il avait incarné à l’écran l’Apache Winnetou dans les années 1960, une série de films à succès aussi bien en Allemagne que de l’autre côté du Rideau de fer, notamment en Tchécoslovaquie. Dans ces deux pays, il est resté une star adulée par de nombreux fans, tandis qu’en France, son pays d’origine, il restait largement méconnu.
C’est également le destin de son interprète à l’écran. Véritable star en Allemagne et en Tchécoslovaquie, l’acteur français Pierre Brice est resté ignoré du public français presque jusqu’à sa mort, n’était un reportage réalisé par Arte en 2007. Mais même là, il aura fallu que ce soit une chaîne franco-allemande qui décide de s’intéresser au destin de cet « illustre inconnu du cinéma français ».
Né en 1929, à Brest, Pierre Brice a d’abord fait la guerre d’Indochine, puis la guerre d’Algérie avant de se lancer dans le théâtre et le cinéma. Manque de chance, il arrive au moment où une autre étoile montante, au physique similaire, perce sur les grands écrans français : Alain Delon. La gloire, ce ne sera donc pas en France qu’il la trouvera, mais en Allemagne, et en Tchécoslovaquie avec le rôle de l’Apache Winnetou dans les années 1960. Production allemande tournée en Yougoslavie, cette série tournée d’après les romans de Karl May, a eu un succès fulgurant.
La série est diffusée en Tchécoslovaquie où, sous le communisme, les spectateurs gavés de propagande anti-américaine peuvent s’évader devant des films se déroulant au Far West, dans cette Amérique inaccessible et rêvée. Ce sont donc des générations de Tchèques (et de Slovaques) qui ont grandi avec les aventures de Winnetou et de son ami Old Shatterhand, joué par Lex Barker, et qui, fidèles au héros de leur enfance, ne manquaient pas, pour certains, de se rendre aux événements où ces dernières années Pierre Brice continuait d’être invité.Sa dernière visite remontait à 2013 où il s’était rendu au festival de Trutnov, une sorte de Woodstock à la tchèque. Radio Prague l’avait rencontré pour la dernière fois en 2009, à Mladá Boleslav, dans le cadre du Festival des sourires européens. Il avait alors évoqué la la série des Winnetou :
« Ce n’est pas un western. Les Français aiment les westerns, oui, mais les coups de revolver. Dans les autres pays où Karl May est connu, c’est un hymne aux Indiens. Quand il a écrit ses livres, il a réhabilité les Indiens. Les Indiens ont été massacrés par les Blancs. »
C’est ce qui vous a attiré dans ce rôle ?« Oui. »
Qu’en retirez-vous encore aujourd’hui ? Vous avez parfois dit que c’était une cage dorée...
« C’est vrai. Mais ça a été aussi une cage dorée parce qu’il y avait un public. Comme je le dis souvent, un acteur ne fait pas ce métier pour son concierge ou son voisin, mais pour avoir du succès. Le personnage était aimé, adulé. Le personnage d’Old Shatterhand aussi. Pourquoi ne pas accepter et avoir du plaisir à faire un film ou une pièce de théâtre pour le public ? D’ailleurs, quand on m’a demandé de jouer ce personnage au théâtre, je n’y ai pas tellement cru. Le théâtre est différent du cinéma. Je me suis aperçu que le succès était exactement le même. Parce qu’il y avait un public. C’est pourquoi, pendant dix saisons de suite, j’ai joué ce personnage-là. Jouer Winnetou devant 10 000 spectateurs enthousiastes, c’est un bonheur ! »
Avez-vous des souvenirs de tournage de Winnetou marquants ?« Ce qui est important dans les tournages de Winnetou, c’est l’amitié qui existait entre Lex Barker et moi. C’était tout-à-fait différent de ce qui a existé avec Stewart Hunter après. Lex était un ami, que nous avons malheureusement perdu trop tôt. »