Yan Zelenka à la Galerie 35 : des navets s'envolent et Don Quichotte se bat contre les éoliennes

Yan Zelenka, Galerie 35

Yan Zelenka était sculpteur avant de se tourner résolument vers la peinture. Né à Prague, le quartier de Malá Strana est son premier lieu d’inspiration, qu’il quitte pourtant pour Paris où il vit depuis 1978. Un exil qu’il ne regrette pas et qui ne l’empêche pas de revenir vers ses origines. Yan Zelenka présente cette année une rétrospective de son oeuvre picturale à la galerie de l’Institut français de Prague.

Yan Zelenka,  Galerie 35
L’exposition qui commence à la Galerie 35 s’intitule « Histoire naturelles ». Est-ce une sélection de certaines de vos oeuvres choisies autour de ce thème, ou plutôt une rétrospective de l’ensemble de votre travail ?

« Effectivement c’est plutôt une rétrospective, parce que le sujet que l’on voit sur presque tous les tableaux, c’est le sujet des fruits et des légumes. Je ne vais pas dire que je suis complètement préoccupé par ça mais c’est le sujet de mes tableaux depuis presque dix ans. Ça a commencé par l’admiration tout à fait esthétique pour les fruits et les légumes, par exemple les artichauts. Et puis j’ai toujours aimé les objets et les personnages en mouvement, par exemple vertical, que ce soit la chute, la montée ou l’envol, ou horizontal et là c’est surtout le vol. Tout ça est réuni dans ces sujets où les fruits et les légumes volent, c’est ma première période dont on voit quelques exemples dans cette exposition. Et puis j’ai peint des personnages tous petits et qui donnent ce côté gigantesque aux légumes. Il y a quelque chose de surréaliste : des fruits gigantesques et des personnages tous petits. En cherchant des personnages concrets, j’ai trouvé deux personnages que tout le monde reconnaît : Don Quichotte et Sancho Panza. C’est vrai aussi que j’ai toujours aimé ces personnages et je suis resté sur ce sujet pendant quatre ans. Dans la période suivante Don Quichotte et Sancho Panza sont restés mais l’objet n’était plus les légumes, c’était des éoliennes parce qu’on sait que Don Quichotte est allergique à tout ce qui ressemble à un moulin. En s’occupant toujours des fruits et légumes, c’est la dernière période, je les ai laissé poser en tas. C’est une décharge. Il y a un petit côté décadent parce que les fruits sont vraiment très ‘fatigués’. »

Vous avez mentionné Don Quichotte et Cervantès comme une grande source d’inspiration, c’est vrai qu’on sent un côté littéraire dans vos tableaux avec un côté fantasque, absurde. Avez-vous d’autres sources d’inspiration littéraire ?

« C’est vrai que la lecture quelques fois ça m’inspire, même assez souvent, mais à cette période là c’était surtout Don Quichotte. Et puis il y avait les sujets confrontés aux artichauts géants, mais ce n’était pas une inspiration littéraire, c’était l’Angélus de Millet. Quelquefois je trouve l’inspiration dans la peinture classique. »

Qu’est-ce qui vous a amené à faire plutôt de la peinture ?

« Même quand j’étais sculpteur je peignais toujours un peu, à côté. Et soudain, du point de vue de l’inspiration je me suis déplacé de plus en plus vers les sujets picturaux avec les fruits et légumes. Quelques fois c’était la musique qui m’inspirait aussi, les visions qui peuvent venir en écoutant de la musique. Je me suis rendu compte que soudain j’ai envie de peindre ça, et ça, et pour la sculpture... Peut-être que j’y reviendrai un jour. Maintenant je suis dans la peinture, je suis content. Je ressens ce plaisir de peindre, le côté pictural jouissif qui laisse la place au hasard. Je pense que je me suis retrouvé : quand j’étais petit je peignais seulement pour faire mes modelages, et ça a évolué comme ça : c’est comme un retour à l’enfance (rires). »