3,5 tonnes de pervitin consommées par an en République tchèque

La première conférence internationale sur la métamphétamine était organisée à Prague cette semaine. Parmi les intervenants, Chloé Carpentier, qui est analyste principale à l’Observatoire européen sur les drogues et des toxicomanies. Au micro de Radio Prague, elle a d’abord parlé des particularités de cette drogue communément appelée pervitin en République tchèque.

« Ce qu’il faut savoir est que la métamphétamine n’est pas une drogue produite à partir d’une plante. Donc ce n’est pas comme la cocaïne ou l’héroïne, on ne peut pas faire des enquêtes aériennes par exemple pour voir où il y a de la cultivation. C’est une drogue synthétique, ça veut dire qu’on a besoin de produits chimiques. En fait, une partie est souvent détournée de préparations pharmaceutiques en vente libre. »

Des médicaments qui, je crois, contiennent des produits bien particuliers comme la pseudo-éphédrine

« Pour produire de la métamphétamine, on a besoin de pseudo-éphédrine ou d’éphédrine. L’éphédrine vient de la plante éphédra, alors que la pseudo-éphédrine on peut la trouver dans des préparations pharmaceutiques qui sont en vente libre dans certains pays, comme en République tchèque et en Slovaquie. En ce qui concerne la production de métamphétamine, elle est plutôt faible en Europe, sauf pour ce qui est de la production assez historique de pervitin en République tchèque, une sorte de métamphétamine produite depuis les années 1970 en République tchèque. La production s’est accrue et c’est un pays où il y a un nombre important de consommateurs. On a estimé à 3,5 tonnes la quantité de pervitin consommée par an en République tchèque. Il y a eu aussi un développement de production en Slovaquie depuis le début des années 2000, mais à moindre échelle. On a aussi des rapports de production en Lituanie, mais à bien moindre échelle. »

Pourquoi la République tchèque est spécialement touchée ?

« Je crois que cela a été synthétisé en 1971 pour la première fois ici. Il y avait une usine qui produisait de l’éphédrine (à Roztoky, fermée depuis 2003, ndlr)... Pour ce qui est des laboratoires clandestins, plus de 400 ont été saisis en 2006 en République tchèque, quelques uns en Slovaquie, et un en Lituanie. Les années précédentes, certains ont été découverts en Bulgarie et en Allemagne. En 2007, pour la première fois il y a une stabilisation du nombre des laboratoires découverts, ce qui est une note positive. »

Mise à part l’Allemagne que vous évoquiez, ce sont donc surtout les pays d’Europe centrale et orientale qui sont concernés

« Il n’y a pas de production en Europe occidentale. Si on regarde les saisies par contre – des saisies qui restent modérées – on a à peu près 3000 saisies par an en Europe, et en tout on a saisi seulement 154 kilos en 2006. Presque la moitié a été saisie en Norvège, suivie par la Suède. Ces deux pays ont peu de saisies, mais ce sont à chaque fois des grosses quantités. Tandis qu’en République tchèque et en Slovaquie, il y a beaucoup de saisies, 300 à 400 par an, mais avec des quantités infimes à chaque fois. Cela révèle un peu le fait que ce sont des pays où on produit et où il y a de l’usage surtout, et les personnes sont arrêtées avec un gramme ou moins sur elle. Tandis que dans les pays nordiques comme la Norvège ou la Suède, la métamphétamine qui y est saisie vient d’ailleurs, elle n’est pas produite sur place et vient des Pays Baltes ou de la Fédération russe. »

Toute la pervitin fabriquée en République tchèque est-elle synthétisée à partir de médicaments disponibles en pharmacie ?

« Pas forcément, je ne sais pas le détail, mais elle peut aussi être produite à partir d’éphédrine qui vient d’ailleurs ou aussi à partir de pseudo-éphédrine qui vient d’ailleurs. En ce qui concerne l’Europe au sens large, Russie et Ukraine incluses, on a saisi en 2006 environ 300 kilos de pseudo-éphédrine et éphédrine. Cela représente un peu moins de 3% des saisies dans le monde. Des saisies qui ont eu lieu principalement en Belgique, en Hongrie, en Russie et en Ukraine. »

On en connaît la provenance ?

« Non, pas toujours. Ce qu’on sait par contre est qu’elle n’est pas forcément à destination de l’Europe même si elle est saisie en Europe, donc ce n’est pas un indicateur très fiable. Europol, dans son rapport sur les drogues de synthèse de l’année dernière, disait qu’il y avait eu en 2006 un accroissement de l’exportation et du détournement d’éphédrine et de pseudo-éphédrine dans l’Union européenne. Mais il faut voir sur quoi c’est basé. On sait qu’il y a eu des saisies de marchandise à destination de l’Europe au Congo, et des saisies en Belgique à destination d’autres pays... C’est quelque chose à creuser. »