6 juin 2004, le D-day aussi pour les Tchèques
Une journée de réconciliation. C'est en ces quelques mots que les quotidiens tchèques résument, dans leurs titres, le déroulement des célébrations du 60e anniversaire du Débarquement en Normandie. Mais si la réconciliation franco-allemande et un certain apaisement entre la France et les Etats-Unis, après la crise irakienne, sont très remarqués à Prague, la présence des vétérans tchèques à la cérémonie internationale d'Arromanches ne l'est pas moins. Plus de 50 000 Tchèques et Slovaques ont combattu, pendant la guerre, aux côtés des Alliés. Plusieurs milliers d'entre eux ont pris part, sur les plages normandes, à la sanglante opération Overlord. Leur mémoire reste vivante...
Antonin Spacek, 87 ans, est un des rares survivants tchèques de la bataille qui s'est confié, ces derniers jours, aux médias. Comme le Slovaque Anton Petrak et d'autres vétérans de la guerre, il vient de recevoir des mains de Jacques Chirac la Légion d'honneur. Hélas, le destin d'Antonin Spacek copie celui de ces nombreux compatriotes engagés dans les armées des Alliés : de retour en Tchécoslovaquie après la guerre, il n'échappe pas à la prison communiste. Pendant vingt longues années, il est totalement coupé de sa famille installée en Grande-Bretagne."Le fait que nos soldats étaient là, qu'ils étaient nombreux, est très important pour la République tchèque. A la fin de la guerre, nous aussi, nous pouvions être fiers", a déclaré, dimanche, en Normandie, le Président tchèque Vaclav Klaus, pour qui le Débarquement a été l'un des événements décisifs dans la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Pour Milan Vodicka, du journal Mlada fronta Dnes, la bataille a plutôt décidé de l'après-guerre en Europe. "En cas de défaite des Américains, des Britanniques et des Canadiens, l'Europe aurait été moins américaine et plus soviétique", estime-t-il. Selon Ondrej Neff, "soixante ans après l'invasion en Normandie, un chapitre de l'histoire se referme et un autre s'ouvre". Dans son article pour Lidove noviny au titre éloquent "Même les démocraties ont besoin d'une force", l'écrivain aborde le douloureux sujet de la menace terroriste, défendant la politique de George Bush et étiquetant les Européens d'idéalistes. Le dessinateur de Mlada fronta Dnes voit, apparemment, les choses dans la même optique : sur son dessin, un commandant américain encourage les soldats par ces mots : "Rien à faire, boys... Un vrai Américain doit libérer l'Europe au moins une fois dans sa vie".