A Prague, un buste de François Mitterrand veut commémorer son petit-déjeuner avec les dissidents
Un buste de François Mitterrand a été dévoilé lundi dans le centre de Prague. Installée dans les jardins du Palais Pálffy, situé dans le quartier de Malá Strana, la sculpture entend commémorer le célèbre petit-déjeuner de l’ancien président français avec les dissidents tchécoslovaques qui s’est tenu à l’ambassade de France le 9 décembre 1988, un an avant la Révolution de velours.
« C’était la première fois que des dissidents, des membres de la Charte 77, des opposants au régime étaient reçus par un chef d’Etat dans une ambassade. Donc, c’était l’occasion de conférer à ces personnes une sorte de reconnaissance de la part d’un des grands chefs d’Etat de l’Europe de l’Ouest. La démarche de Mitterrand était d’ailleurs très cohérente parce qu’après Prague, il s’est rendu en Bulgarie un mois plus tard où il a fait la même chose, il y a convié des dissidents. Et puis, il est allé en juin 1989 à Gdansk où il a rencontré Lech Walesa (le premier président postcommuniste de la Pologne, élu en 1990, ndlr). Donc, c’est la démarche réalisée par Mitterrand qui a eu cette conscience effectivement de la fragilité des régimes des pays dans lesquels il se rendait. C’est sa volonté de rencontrer des représentants de l’opposition démocratique. »
L’idée d’installer à Prague un buste de Mitterrand est née au sein de la Section de jazz, une organisation pour la culture non-commerciale fondée en 1969, et plus précisément de son membre fondateur Karel Srp, un des participants du petit-déjeuner de 1988, à laquelle participait également Václav Havel. Le buste a été réalisé avec l’accord officiel de Manuel Valls qui a rencontré Karel Srp lors du petit-déjeuner de commémoration, organisé à l’occasion de sa visite officielle en République tchèque le 9 décembre dernier. Karel Srp précise que cet acte veut surtout rendre hommage à cet homme d’Etat français qui a contribué grandement aux changements politiques en Europe centrale :« Il était avant tout l’incarnation du courage civique comme de la fermeté politique vis-à-vis du communisme. Lors de ces petits-déjeuners, j’étais toujours très nerveux parce que même si j’avais rencontré beaucoup des hommes d’Etat, il était pour moi le plus grand représentant de la lutte contre le communisme. Je croyais qu’il réussirait à vaincre le communisme un jour mais je pensais pas qu’il y parviendrait si tôt. »
Jean-Pierre Asvazadourian, qui représentait la France lors du dévoilement du buste, a apprécié cet acte de commémoration en soulignant l’importance de se rappeler ces évènements qui sont un des ciments des relations franco-tchèques :« Je crois que c’est un hommage très important et qui est aussi lié à l’histoire de ce pays. Je suis donc très heureux d’avoir vu ce moment. Moi-même, d’ailleurs, j’étais jeune diplomate après la Révolution de velours et je me souviens très bien de Mitterrand en 1990 et puis en 1993 venant à Prague et reconstituant ce moment avec les participants d’alors. Et je crois que c’est un moment qui est très fort dans la relation entre la République tchèque, la Slovaquie et la France. »
Le buste a été réalisé par le sculpteur franco-tchèque Jan Zelenka qui vit à Paris depuis 30 ans. Il a confié au micro de Radio Prague :« Les gens de la Section de jazz ont eu l’idée que ce buste soit fait par un sculpteur franco-tchèque. Le délai était assez court mais je l’accepté et je ne le regrette pas. J’ai donc travaillé sur cette œuvre à peine trois mois, deux mois et demi à peu près, ce qui n’est pas beaucoup. Normalement, cela devrait être un peu plus long. Mais des fois, la vitesse et une certaine pression sont des éléments positifs pour ce travail. J’étais très content d’avoir fait ce buste d’abord pour des raisons philosophiques parce que j’aime bien la justice sociale qui représentait une grande partie du programme de François Mitterrand, mais aussi parce que c’est une belle tête ! »
Selon Karel Srp, le buste qui est le premier du genre dans un pays post-communiste, sera désormais accessible au public.