Affaire de l’ex-gardien Vondruška : les Tchèques à nouveau confrontés à leur passé communiste

Josef Vondruška, photo: CTK

Après une vague de protestations, soulevée à la fin de 2012 par la nomination de deux conseillers régionaux communistes à České Budějovice, la controverse continue avec la nomination d’une autre personnalité liée à l’ancien régime, à ce même poste à Liberec, dans le nord du pays. L’affaire suscite un vif débat, car il s’agit d’un certain Josef Vondruška, un ex-gardien soupçonné d’avoir torturé des prisonniers politiques et faisant actuellement l’objet d’un procès.

Josef Vondruška,  photo: CTK
L’émotion était au rendez-vous devant la salle d’audience du tribunal de Liberec, lorsque les familles et les amis des anciens prisonniers politiques ont assisté à la réouverture du procès de Josef Vondruška, 65 ans. Député communiste en 1992 et entre 2005-2010, cet ouvrier de profession a notamment été dans les années 1970-80 gardien dans la prison de Minkovice, située près de Liberec et fermée après la chute du communisme. De nombreux opposants au régime y ont purgé leurs peines. Parmi eux Jiří Wolf qui a porté plainte contre Josef Vondruška, l’accusant de violences physiques et psychologiques contre lui-même et d’autres prisonniers. Employés dans une usine de verre locale, ces derniers étaient, selon lui, contraint de remplir des normes de production draconiennes, tout en étant sanctionnés physiquement et privés de nourriture.

La plainte a été déposée il y a plus de quatre ans. Privé de son immunité parlementaire, Josef Vondruška a effectivement comparu devant le tribunal, mais il a été acquitté de ces accusations par manque de preuves. Après ce verdict, prononcé en 2011, Jiří Wolf a déclaré à la Radio tchèque :

« Il est vrai qu’il manquait de témoignages directs pour justifier cet acte d’accusation. Il n’a pas été prouvé par des témoins, que Vondruška avait frappé quelqu’un. Mais cela ne veut pas dire qu’il est innocent ni qu’il a été réhabilité. Je pense que ce procès était une chance pour la justice tchèque de prouver qu’elle respectait les droits de l’homme. Mais elle a échoué. Depuis 1989, plusieurs anciens gardiens ont comparu devant les tribunaux, mais pas un seul n’a été condamné. Pour moi, cela signifie que la justice est encore entre les mains de l’ancien pouvoir communiste. »

Jiří Wolf,  photo: Archives de Jiří Wolf
Or, la cour d’appel de Hradec Králové a finalement décidé la réouverture du procès, en s’appuyant sur les nouveaux témoignages de deux autres anciens prisonniers. L’un d’entre eux, Pavel Skramlík, aurait vu de ses propres yeux Josef Vondruška s’attaquer à plusieurs reprises à Jiří Wolf : « Il l’a frappé au ventre avec une matraque et l’a jeté contre le mur. (…) J’ai aussi entendu Wolf crier de douleur », a-t-il déclaré. L’historien Aleš Kýr, quant à lui, a essayé de prouver, devant les juges, que la prison de Minkovice n’était équipée de caméras comme l’a suggéré Josef Vodruška. Ce dernier réfute toutes les accusations qui relèvent, selon lui, de la pure fantaisie. De même, il n’envisage pas de quitter son nouveau poste de conseiller régional de Liberec qu’il occupe en dépit des protestations de 26 autres membres du conseil. On l’écoute :

« Je me poserais cette question si j’étais condamné. Mais tant que le tribunal n’aura pas rendu de jugement définitif établissant ma culpabilité, je ne vois pas sur quoi je devrais réfléchir. »

Toujours est-il que Josef Vondruška risque dix ans de prison ferme pour abus de pouvoir. Le verdict pourrait être prononcé en juin prochain.