Alanté Kavaïte au festival de Karlovy Vary : « J'essayerai toujours de mettre la technique au service du propos »

Alanté Kavaïté, photo: Film Servis Festival Karlovy Vary

A Karlovy Vary, le festival international du film continue. Rencontre avec la réalisatrice franco-lituanienne Alanté Kavaïté, qui est venue présenter son premier long métrage « Ecoute le temps », sélectionné dans la catégorie Variety Critics Choice.

« Je suis très honorée car je sais que ce journal a plus de cent ans. Je suis honorée, ravie et impressionnée, donc, et j'ai déjà le trac. »

Cela a-t-il été une surprise d'être sélectionnée dans cette catégorie ?

« Oui, d'autant que l'année dernière, j'avais présenté ce film pour ce festival et je n'avais pas été sélectionnée. J'ai tellement entendu parler de ce festival, donc c'était complètement une surprise. »

Parlons un peu de ce premier film qui s'appelle Ecoute le temps, et qui comme son nom l'indique, a beaucoup à faire avec le son.

'Ecoute le temps'
« Oui, le travail du son a beaucoup à voir avec le film. C'est l'histoire d'une jeune femme qui est ingénieur du son, interprétée par Emilie Dequesne, pendant qu'elle est en voyage de travail, sa mère est assassinée dans sa maison de campagne. Charlotte revient dans cette maison et se rend compte qu'il s'y passe beaucoup de choses étranges, que les villageois la regardent de travers, et elle se rend surtout compte qu'elle ne sait pas grand'chose de la vie que sa mère menait dans le village. Et en enregistrant les sons dans cette maison, une vieille maison aux murs qui craquent, elle se rend compte que le son qu'elle capte est mélangé aux sons du passé et qu'en changeant le micro de position, elle capte des dates différentes. En fait, c'est une quête personnelle, parce qu'il s'agit avant tout d'une jeune femme qui fait son deuil. Et c'est une quête personnelle en parallèle avec une enquête policière. Car le but est de savoir aussi ce qui s'est passé et de trouver l'emplacement dans l'espace où elle va pouvoir enregistrer les minutes du jour J, et donc savoir qui a assassiné sa mère et pourquoi. »

Dans les critiques que l'on peut lire de votre film, il est fait plusieurs fois référence à Roman Polanski. Est-ce que ça vous paraît bien vu ? Est-ce que cela vous touche ?

« C'est très flatteur, j'admire beaucoup ce qu'il fait, surtout que pour moi, c'est quelqu'un qui adapte sa mise en scène et ses moyens techniques aux sujets qu'il choisit. Il a fait des films très différents, et à chaque fois selon moi, il a choisi le traitement le plus juste. C'est quelque chose qui me touche beaucoup et que j'essayerai de faire. Mon premier film est un film fantastique, parfois qualifié de thriller parce qu'il y a cet aspect policier. Mais c'est parce le sujet que j'ai choisi de traiter l'exigeait. La prochaine fois, si le sujet demande un traitement plus fort en couleurs, ou musical, je le ferai aussi. J'essayerai toujours de mettre la technique au service du propos. Polanski, pour moi, fait partie des réalisateurs qui n'a pas une signature à lui dans le style, mais qui adapte toujours de la manière la plus intelligente, la plus juste, qui adapte ses moyens et sa mise en scène au propos. C'est quelque chose qui me parle beaucoup. »

Photo: CTK
Vous êtes d'origine lituanienne, vous êtes installée depuis 15 ans à Paris. Est-ce que ce festival de Karlovy Vary vous paraît être - comme on le dit souvent - le lieu idéal de rencontres des cinémas de l'Est et de l'Ouest ?

« J'ai effectivement rencontré beaucoup de réalisateurs venant de l'Est et de l'Ouest. Ce qui me plaît beaucoup dans ce festival c'est qu'on se rencontre dans un cadre qui a l'air très informel : c'est le premier festival que je vois où on n'est pas obligé de sortir des invitations et des badges à chaque fois, on se déplace extrêmement librement. C'est la première fois que je vois cela. Ensuite, ce que je constate, même si je n'ai vu qu'un seul film, c'est que la salle était pleine, il y avait une queue immense derrière. Il y a un film pour lequel je n'ai pas pu rentrer, car il n'y avait pas assez de place alors que la salle était immense. C'est quelque chose que je ressens, cette énergie, et le fait qu'il y ait un public aussi énorme, ça fait vraiment plaisir. »