Antonín Sládek, le « dernier Parisien »

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C’est une personnalité de l’art tchèque que nous aurions dû bientôt rencontrer pour Radio Prague. Pour parler de ses œuvres et de son parcours artistique entre Prague et Paris, comme tant d’autres artistes à cheval sur les deux capitales. C’est une rencontre qui ne se fera hélas jamais plus. Le peintre Antonín Sládek est décédé dans la journée de samedi, des suites d’une grave maladie.

Antonín Sládek,  photo: CTK
Le « dernier Parisien », c’est ainsi que le peintre Antonín Sládek était parfois surnommé. Dernier Parisien, à la fois comme l’un des derniers représentants d’une certaine génération d’artistes tchèques à Paris. Mais aussi comme l’ultime porte-voix d’une certaine peinture figurative « à la française », qui n’est pas sans rappeler les oeuvres de Toulouse-Lautrec, un des maîtres qui l’inspira. Jan Placák était un ami d’Antonín Sládek. Sa galerie pragoise, Ztichlá Klika, a déjà exposé les œuvres d’Antonín Sládek par le passé et il a édité un catalogue. Jan Placák se souvient :

« Antonín Sládek est pour moi quelqu’un de l’ancien temps, car il faisait de la peinture comme aujourd’hui on n’en fait plus beaucoup. Il adorait la peinture française, il aimait les cafés, les restaurants... Il avait toujours avec lui un carnet d’esquisses et ne cessait de prendre des notes, de faire des croquis quand une atmosphère lui plaisait ou que le visage de quelqu’un le frappaient. Parfois il écrivait quelques mots à côté. C’était un maître pour décrire les situations, ce que personne ne fait plus aujourd’hui. Antonín était un des derniers à le faire. »

Depuis les années 1980 et jusqu’à la chute du communisme, Antonín Sládek vivait à Paris. Marié à une Française, un peu par raison, il pouvait ainsi se consacrer en toute liberté à la représentation des cafés, des cabarets, comme le firent en effet de nombreux peintres français au XIXe siècle. La femme, muse éternelle des peintres, a été également célébrée par Antonín Sládek. Une galerie pragoise appelée justement La Femme, en français et qui a la particularité de ne proposer des oeuvres que sur ce thème, avait d’ailleurs consacré une exposition à Antonin Sladek en mai-juin dernier.

Avant son départ pour la France, Sládek s’était également consacré à la création d’affiches de cinéma, pour le film Fantômas, par exemple, comme le rappelle Jan Placák :

« Dans les années 1960, il a réalisé de nombreuses affiches. Je crois que son affiche la plus célèbre est celle qu’il a faite pour le film des Beatles, Yellow Submarine. Si je ne m’abuse, je crois même qu’elle lui a valu de recevoir un prix. Quant aux illutrations, il en a surtout fait ces dernières années, dans chaque numéro de Roš Chodeš, le mensuel de la Communauté juive de Prague, soit le portrait d’une personne ou l’illustration d’un texte. Enfin, il a illustré quelques livres de ses amis, comme les nouvelles d’Arnošt Goldflam. »

La dernière grande exposition parisienne d’Antonín Sládek remontait à quatre années, au Centre tchèque. Et Jan Placák reconnaît qu’il en envisageait une également l’année prochaine. Espérons que le décès prématuré d’Antonín Sládek à 67 ans n’empêchera pas un projet de ce genre dans les temps qui viennent, afin de découvrir ou de redécouvrir un peintre un peu négligé du grand public, mais reconnu par les amis qui l’aimaient et appréciaient son travail.