Antonín Slavíček, homme qui a saisi le caractère particulier du paysage tchèque
Il y a tout juste cent ans, les arts tchèques perdaient un de leurs plus grand fils. Le peintre Antonín Slavíček est mort le 1er février 1910 parce qu’il refusait de vivre partiellement paralysé. Sa vie, qui n’a duré que 40 ans, lui a pourtant permis de laisser une profonde empreinte dans les arts plastiques tchèques.
Antonin Slavíček a su comprendre la leçon des impressionnistes et lui donner un nouveau contenu. Fils d’un gérant de l’Ecole polytechnique de Prague, il commence ses études de peinture à Munich et les poursuit à l’Académie des Beaux-Arts de Prague dans l’atelier du professeur Julius Mařák, peintre considéré comme un des meilleurs paysagistes tchèques. Le jeune Slavíček s’impose bientôt comme un des plus grands talents de sa génération et peint encore au cours de ses études une série d’excellents tableaux teintés d’une légère mélancolie.
Son tempérament et son intégrité artistique ne lui permettent pas cependant d’être satisfait et le poussent toujours plus loin. Il se laisse envahir par les impressions de la nature et réussit à les évoquer avec une rare force sur ses toiles. Ce grand coloriste qui fait éclater la couleur sur ses tableaux, n’en est pas moins capable de réduire sa palette à des nuances du gris et du brun quand il veut exprimer la griserie des jours de pluie ou la mélancolie d’automne. Il ne se rassasie jamais de peindre Prague. Jana Orlíková, commissaire de sa dernière rétrospective, rappelle cette importante partie de sa création:
"Slavíček était un citadin typique. Il est né à Prague et sa famille n'avait pas de racines à la campagne. Mais il y recherchait la pureté, la vérité, la sincérité qu'il ne trouvait pas en ville. Evidemment, Prague lui était très proche - il adorait cette ville, surtout la Vieille-Ville que l'on trouve sur ses tableaux : la rue Jilská, où il est né, le couvent Sainte-Agnès et ses environs, la rue Kaprová, le quartier juif, qu'on était en train de démolir, mais dont il se souvenait du temps de sa jeunesse."
Une grande étape de la création d’Antonin Slavíček est liée au village de Kameničky, perdu au milieu des champs du Plateau tchéco-morave. Dans cette étape le pinceau de l’artiste se raffermit, son style nerveux et flamboyant s’assagit pour exprimer le charme désuet de cette contrée et aussi, à travers la nature, la condition difficile des gens qui vivent sur cette terre et la labourent. La série des toiles créées à Kameničky est un acte fondamental qui ouvre un nouveau chapitre des arts plastiques tchèques et se reflètera dans tout le paysagisme tchèque du XXe siècle.
C’est à l’apogée de son art que le peintre est terrassé d’une attaque cérébrale. Il n’a que 40 ans mais il reste partiellement paralysé. L’artiste qui vivait pleinement sa vie, se rend compte que, désormais, son état ne lui permettra que de vivoter. Il se révolte contre une telle perspective et met fin à ses jours. Ses toiles resteront comme un témoignage éclatant sur un homme qui ne savait pas vivre à moitié.