Apprécié à sa juste valeur, l’attentat contre Reinhard Heydrich ne cesse de soulever la polémique

Reinhard Heydrich

L’attentat contre Reinhard Heydrich, Protecteur de Bohême-Moravie, perpétré en mai 1942 par le commando Kubiš-Gabčík parachuté de Londres, représente l’événement majeur de la résistance nationale pendant la Deuxième Guerre mondiale. Même 70 ans après, cet acte ne cesse pourtant de soulever une certaine polémique. Nous en avons trouvé des échos dans la presse, dans laquelle nous avons retenu également deux autres sujets.

Reinhard Heydrich
« Donner une appréciation de l’attentat contre Reinhard Heydrich, numéro deux de la SS, un des hommes favoris de Hitler et un des pères spirituels de l’holocauste, constitue depuis toujours une tâche délicate », écrit Marek Švehla dans son commentaire publié dans l’hebdomadaire Respekt. Il explique :

« La valeur politique et nationale de cet acte est indiscutable. D’un autre côté, on sait que celui-ci a eu pour conséquence des milliers de morts, victimes innocentes de la vengeance brutale et de la fureur des nazis. D’où la question sur le bien-fondé de cet acte. »

Tout en admettant que d’un point de vue humain, de tels doutes et interrogations soient compréhensibles, l’auteur de l’article tranche ce dilemne d’une manière sans équivoque :

« Il ne faut pas oublier les histoires personnelles tragiques. Toutefois, l’histoire de l’attentat ne doit pas être prioritairement perçue comme une histoire de victimes individuelles mais avant tout comme celle de la révolte contre Heydrich. Il y a lieu de souligner que ce n’est finalement que cet attentat et les représailles nazies que les Tchèques ont par la suite endurées qui ont définitivement convaincu les Britanniques et les Français de considérer notre pays comme une proie d’Hitler et de révoquer leur signature du Traité de Munich. »

Plus loin, nous pouvons lire :

« Du point de vue global de la Deuxième Guerre mondiale, l’attentat contre Heydrich représentait un acte de diversion unique dirigé contre un haut fonctionnaire nazi... Un acte qui a été parfaitement préparé en collaboration avec des gens qui ont fait preuve de courage face à une menace permanente dans un pays occupé. Des familles entières ont beaucoup risqué, car pour elles, la lutte pour la liberté comptait plus que leur survie. »

L’anéantissement total du village de Lidice
L’auteur de l’article rappelle que les mois qui ont suivi l’attentat ont représenté une des périodes les plus terrifiantes dans toute l’histoire tchèque. Un génocide de la population tchèque ou des exécutions sélectives - un Tchèque sur dix : voilà les menaces que les nazis se plaisaient alors à proférer. Elles n’ont pas été accomplies, il est vrai, mais la liste des hommes et des femmes exécutés a tout de même été très longue. Il conclut :

« Au moment de la terreur extrême, l’attentat contre le Protecteur a permis aux gens de résister. Voilà pourquoi il mérite d’occuper dans l’histoire nationale une place à part. »

« Appréciez-vous positivement l’attentat contre Heydrich, en dépit des représailles et des victimes qu’il a entrainées ? » : telle est la question que le journal Respekt a également posé à quatre représentants politiques dans le cadre d’une enquête qu’il lance régulièrement sur des thèmes différents.

Selon la vice-Premier ministre Karolína Peake, il faut apprécier le courage et la volonté de s’opposer au Mal, même au risque de sa propre vie. Elle considère cependant que la question du prix payé par la nation tchèque pour cet acte incontestablement héroïque n’aura jamais de réponse univoque. Selon elle, toutefois, ce prix a été trop élevé.

La voiture d'Heydrich après de l’attentat  | Photo: Bundesarchiv,  Bild 146-1972-039-44,  Wikimedia Commons,  CC BY-SA 3.0
Miroslava Němcová, présidente de la Chambre des députés, considère pour sa part que l’attentat peut servir de soutien moral aux citoyens tchèques et de preuve que nous n’étions pas uniquement une nation occupée, paralysée par la peur. Selon le chef de la diplomatie tchèque, Karel Schwarzenberg, Heydrich était un des plus hauts représentants du IIIe Reich. De ce fait, son élimination était dans l’intérêt de la Tchécoslovaquie et des Alliés.

La veille du 70e anniversaire de l’attentat contre Heydrich, l’édition de samedi dernier du journal Lidové noviny a également consacré plusieurs pages à cet acte. Une occasion pour Petr Zídek de noter que l’attentat a constitué un très grand triomphe pour le président en exil Edvard Beneš mais que, une fois la guerre terminée, celui-ci a nié avoir été au courant de sa préparation.

Lidové noviny constate également qu’à ce jour, une dizaine de films, inspirés directement par l’attentat perpétré par deux résistants tchécoslovaques, ou par les événements s’y rapportant, ont vu le jour. Le premier a été réalisé en 1943 aux Etats-Unis. Le plus connu et le plus apprécié en République tchèque demeure le film qui a été réalisé dans la première moitié des années 1960 par Jiří Sequens et qui s’intitule tout simplement « Attentat ». Le film décrit assez fidèlement et en détail les préparatifs et le déroulement de l’attentat, ainsi que le sort de ses protagonistes.

« Imposer et réaliser le film n’a pas été facile, car l’attentat en question était vu d’un mauvais œil par l’historiographie communiste », rappelle le journal qui constate que l’on peut s’attendre à ce que ce thème continue à inspirer les artistes, encore, à l’avenir.


A l’approche de la première élection présidentielle au suffrage universel direct, l’année prochaine, les journaux s’interrogent d’ores et déjà sur les chances des candidats supposés. Parmi ceux-ci on trouve le nom de l’ancien Premier ministre social-démocrate Miloš Zeman auquel l’actuel président Václav Klaus, son ancien rival et ancien chef du principal parti de droite l’ODS (Parti civique démocrate), a récemment exprimé ouvertement son soutien. Parmi les commentaires qui ont réagi à cette démarche en apparence surprenante, nous avons retenu celui paru sur le site aktualne.cz de la plume du journaliste et politologue Jiří Pehe. Il a écrit :

Miloš Zeman
« Ce soutien n’est pas étonnant, car depuis le dit accord d’opposition entre la social-démocratie et l’ODS, dans les années 1998 – 2002, Klaus et Zeman se sont présentés plus comme des alliés que comme des adversaires politiques... L’actuel président ne peut pas souhaiter une rupture radicale avec la période de transformation dans les années 1990, dont il a été, avec Zeman et Havel, un des leaderships, il ne peut donc pas préférer un candidat qui représente une ère nouvelle et qui, en plus, porterait un regard critique sur les vingt années marquées par sa domination. »

Les chances de Miloš Zeman à l’élection présidentielle ne semblent pas grandes. A en croire les sondages, il possède un retard important sur deux autres candidats, sans parti, Jan Fischer et Jan Švejnar. Le soutien de Klaus pourrait cependant augmenter ses chances, car sa cote auprès du public demeure toujours assez élevée. Plus loin, Jiří Pehe remarque :

« La prochaine élection présidentielle en République tchèque se présente en bien des points comme un test intéressant de la société tchèque qui montrera si elle est prête à adopter un nouvel éthos politique ou bien si le conservatisme politique prévaut, comme si souvent dans le passé... Celui qui voudra l’emporter sur Miloš Zeman devra convaincre une partie décisive de la population de ce que le temps pour un changement radical est venu. Un changement qui ne peut pas venir avec cet homme qui se présente comme une relique des temps révolus ».


« L’invasion des sangliers tchèques cause d’importants dégâts sur les champs autrichiens » : c’est sous ce titre que le quotidien Lidové noviny, déjà cité, a publié un article consacré à la multiplication des sangliers en République tchèque qui inquiète et touche même les agriculteurs autrichiens. Il écrit :

« La Tchéquie est aujourd’hui un véritable paradis pour les bêtes noires. Les gardes-chasse confirment qu’elles sont aujourd’hui plus nombreuses que jamais et, que de ce fait, elles pénètrent jusqu’aux régions limitrophes des pays voisins où elles dévastent les récoltes. »

Selon les experts auxquels le journal donne la parole, le problème réside dans l’état du paysage agricole tchèque qui, avec ses vastes terrains ensemencés prioritairement de colza et de maïs, offrent aux sangliers une alimentation abondante pratiquement pendant toute l’année, tout en les protégeant efficacement de chasseurs.

Ceux-ci prétendent d’ailleurs tout faire pour diminuer les effectifs des bêtes noires. L’année dernière, par exemple, ils en ont fusillé trois fois plus qu’en 1990, mais cela ne suffit toujours pas.

« Le seul remède, soulignent les experts cités, c’est une modification fondamentale de l’économie agricole. Les captures de sangliers en elles-mêmes ne peuvent pas résoudre grand-chose. »