Après Zátopek, place maintenant au philosophe Jan Patočka et à la Charte 77 à Bruxelles
Un relais tchèque composé de quelque vingt-cinq coureurs a participé, mardi soir à Bruxelles, à la course hommage à Emil Zátopek organisée à l’occasion du 10e anniversaire du lancement du magazine francophone qui porte le nom du champion tchèque. A la tête de cette équipe de choc se trouvait l’ambassadeur de la République tchèque en Belgique. A l’arrivée de la course, Jaroslav Kurfürst a répondu, en basket et en tenue d’athlète, à quelques questions de Radio Prague.
Maintenant que vous vivez à l’étranger et que vous êtes régulièrement en contact avec des étrangers, diriez-vous, comme on a tendance à le penser, que Zátopek est davantage reconnu dans le monde que chez lui en République tchèque ?
« Je ne sais pas, c’est difficile à dire. En Tchéquie, c’est une légende quand même, mais c’est vrai que je suis surpris qu’on le connaisse autant dans les détails en Belgique. Si vous prenez par exemple la version en français de Wikipédia, c’est une source d’information incroyable sur Zátopek. Cela ressemble à une dissertation ! »
Pensez-vous que la perception différente qu’ont les Tchèques de Zátopek de celle à l’extérieur des frontières de la République tchèque s’explique aussi par l’histoire et le rôle qu’a joué la politique dans la carrière de Zátopek ?
« C’est une question très philosophique. Je pense que les étrangers, surtout en Belgique, reconnaissent son rôle politique durant l’invasion de la Tchécoslovaquie en 1968. J’ai été très surpris par le traitement de la presse belge qui exprimait sa sympathie. La Belgique est un petit pays qui a connu une histoire difficile, alors la solidarité était peut-être plus importante que dans d’autres pays plus grands. Quand je parle de Zátopek ici, les gens connaissent son histoire et cet aspect politique de sa vie. En Tchéquie, c’est différent car c’est une histoire vécue par beaucoup de monde. C’est d’ailleurs pourquoi nous présentons dans le cadre de cette soirée une petite exposition sur la bande dessinée qui lui a été consacrée et qui démontre sa capacité à tenir tête au régime communiste avec fair-play. »« Tchèques et Belges ont plus de points communs qu’ils ne le pensent »
Espérons maintenant, après le succès de la course, qu’il y aura d’autres manifestations tchéco-belges de ce type…
« Oui, oui, nous planifions un certain nombre de choses. Cette année, nous mettrons l’accent sur la Charte 77. Nous évoquerons Jan Patočka, qui en était le porte-parole, notamment à travers un événement organisé en coopération avec l’Université catholique de Louvain, les Archives Husserl (cf. : https://hiw.kuleuven.be/hua), c’est-à-dire la chaire de philosophie de l’université, et l’Université libre de Bruxelles. Ce sera l’occasion de parler de notre histoire commune, car Patočka a dirigé deux cours à Louvain aussi, qui s’appellent ‘Lovaňské přednášky’ (Conférences de Louvain, Sur la contribution de la Bohème à l'idéal de la science moderne. Publié en 2002 aux Editions Ousia, ndlr). »Selon vous, les Belges connaissent-ils bien la République tchèque ?
« Nous devons promouvoir nos points communs, car nous en avons plus que ce que nous pensons. Nous sommes deux pays dans des zones géopolitiques difficiles et avons des populations qui comptent toutes deux quelque dix millions d’habitants. Nous avons vraiment une grande partie de notre histoire qui est commune. »
Dans quelle mesure le fait que Plzeň et Mons aient été ensemble récemment capitales européennes de la culture a favorisé les échanges entre les deux pays ?
« Oui, ne serait-ce que durant l’année en question (2015). J’ai même entendu parler d’un couple d’étudiants qui sont tombés amoureux. C’est très bien ! Mais je ne sais pas quelle a été la suite… Nous avons eu le budget pour un an, ce qui nous a permis de mener certains projets ensemble. Incontestablement, cela nous a permis de mieux nous connaître dans les deux villes. »