Autorisé depuis un an, le cannabis médical reste introuvable

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Il y a tout juste un an, la loi autorisant l’usage thérapeutique du cannabis entrait en vigueur en République tchèque, celle-ci rejoignant le cercle fermé des pays ayant franchi le pas en Europe. Ce texte n’a pourtant eu qu’un effet tout relatif puisque, jusqu’alors, aucune personne malade, susceptible d’atténuer ses souffrances avec cette substance, n’a pu se procurer de médicaments à base de cannabis. Le cannabis médical devrait pourtant bien débarquer dans les pharmacies dans les prochaines semaines, même si certains critiques pointent du doigt son prix prohibitif.

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Bien que longtemps utilisé pour ses vertus thérapeutiques, le cannabis a progressivement été prohibé dans la plupart des Etats du monde au XXe siècle. Ce n’est que récemment que les sociétés européennes et nord-américaines se sont à nouveau intéressées à ses propriétés médicales, notamment en matière de lutte contre la douleur pour les personnes atteintes de problèmes neurologiques ou oncologiques.

En République tchèque, le débat sur la légalisation du cannabis médical a pris son envol à l’été 2011 avec la publication d’une pétition réunissant 60 000 signatures en sa faveur. Le gouvernement de droite de Petr Nečas a alors lancé un groupe de travail sur la question qui a abouti au vote d’une loi au début de l’année 2013 autorisant l’usage thérapeutique du chanvre. Malgré cette nouvelle législation, les patients qui ont besoin de cannabis médical n’en n’ont toujours pas vu la couleur un an plus tard. Il y aurait principalement deux raisons à cela selon Helena Kordačová, qui travaille à l’Institut pour le contrôle des médicaments (SÚKL) :

« Cela est dû tout d’abord à la position relativement réservée des médecins vis-à-vis des prescriptions de cannabis médical. Ensuite, les sociétés habilitées à transporter ces substances depuis novembre dernier ont attendu qu’il y ait une demande pour déterminer les quantités qu’elles devraient livrer. »

Photo: Archives de Radio Prague
A l’heure actuelle, trois entreprises en République tchèque ont l’autorisation de manipuler et de livrer ce chanvre. Mais alors qu’il est prévu que le cannabis thérapeutique ne puisse être délivré aux patients que sur la base d’une ordonnance électronique, ce système n’est toujours pas au point. Helena Kordačová assure que ce n’est plus désormais que l’affaire de quelques jours :

« Pour l’instant, nous sommes dans une situation où les livraisons de cannabis médical destinées à la République tchèque sont prêtes aux Pays-Bas. Les patients qui souhaiteront se procurer ces médicaments sur ordonnance fournie par leur médecin le pourront donc dans les tout prochains jours. »

Dans les faits, le ministère de la Santé, du gouvernement même qui a autorisé le cannabis médical, a largement traîné des pieds pour faciliter sa mise en application. Ainsi, en mars 2013, le ministre Leoš Heger, du parti conservateur TOP 09, contestait les propriétés thérapeutiques du cannabis à usage thérapeutique. Disponible prochainement dans toutes les bonnes pharmacies, cette substance pourrait être également cultivée sur le sol tchèque sous réserve de disposer d’une licence délivrée à partir de ce mois d’avril. Recteur à la faculté de médecine de l’Université Charles à Prague, Tomáš Šimůnek envisage de présenter cette requête pour que son établissement puisse cultiver et étudier le cannabis médical :

Tomáš Šimůnek,  photo: Faculté de pharmacie de l’Université Charles
« Il y a des conditions à remplir, développées par l’Institut pour le contrôle des médicaments, pour pouvoir cultiver du cannabis à des fins thérapeutiques. Il y a des conditions liées à l’environnement de la culture ou à la compétence des personnels en capacité de faire ce travail. Ensuite, et c’est peut-être le plus important, il faut s’assurer de la qualité et de la reproductibilité des expériences sur ces produits pour qu’elles restent similaires et à un très bon niveau. »

Pour autant, il sera sans doute toujours difficile pour les patients de se procurer légalement du cannabis médical. Son prix reste prohibitif et aucune assurance n’en rembourse aujourd’hui l’usage. De plus, la loi interdit aux médecins de prescrire à une personne malade plus de 30 grammes de cannabis par mois, une quantité insuffisante dans certains cas. Le nouveau ministre tchèque de la Santé, Miroslav Němeček, a donc décidé de se tourner vers Israël, un des leaders mondiaux en la matière, dont la production serait moins onéreuse que celle en provenance des Pays-Bas.