Bartolomej Chudoba
Le bicentenaire de la bataille d'Austerlitz (Moravie) et le 60ème anniversaire de la Libération du joug nazi, sont deux des évènements les plus importants, fêtés en cette année 2005. Une bataille et une guerre qui ont apporté aux peuples souffrance, pleurs, victimes, tombés au champ de bataille, martyrs et la joie de se terminer enfin. Il sera toujours nécessaire de rendre hommage à tous les hauts officiers, simples soldats et civils qui ont combattu dans la bataille d'Austerlitz et pendant la Deuxième Guerre mondiale.
Bartolomej Chudoba était originaire d'un petit village près de Pelhrimov, ville dans la région de Vysocina (Moravie). A quatorze ans il devient orphelin. Ses parents, étant très pauvres, ne lui laissent aucune ressource pour vivre. Bartolomej, appelé Bart, n'est pas encore sorti de l'enfance et il doit déjà gagner sa vie. Il travaille dur chez le curé et à la ferme du boulanger du village. Avant que Bart ne commence à se poser des questions sur son futur, le diktat de Munich annonce une guerre inévitable. Au début de l'année 1940, le jeune homme passe en France où il s'engage dans la Légion étrangère. Puis, il rejoint l'unité tchécoslovaque en Angleterre, à Manchester. En 1944, Bartolomej Chudoba revient avec son unité en France. Au cours d'un des multiples combats, il est blessé au visage par un éclat d'obus. Heureusement pour lui, la blessure est relativement superficielle. Le jeune militaire se remet vite de son état d'incapacité physique et revient par Falaise sur Dunkerque. Un jour, alors qu'il passe à Lille avec un message important, une jeune fille croise son chemin. Elle est très jolie et s'appelle Andrée - Dédée. C'est un coup de foudre réciproque. Dédée apprécie la gentillesse et l'honnêteté du jeune soldat. Bart la trouve tout simplement parfaite sur tous les plans. Les troupes allemandes commencent à se replier, la libération approche. Il faut que Dédée et Bart se quittent. Les deux jeunes gens jurent de s'écrire et c'est le dernier baiser. Bart marche sur Pilsen avec les troupes du général G. Patton. En 1945, il est démobilisé. Il retourne en France pour retrouver son Andrée bien aimée. Et la petite l'attend patiemment ! Un an après la guerre le couple se marie. C'est le printemps et la nature en fleurs promet un futur meilleur. Mais le destin jouera à pile ou face, et il en sera autrement. B. Chudoba aurait bien pu rester en France, à Tourcoing, et trouver facilement du travail dans les mines de charbon. Il préfère revenir au pays. Il aurait certainement mieux fait de rester chez nos amis français.
A son retour en Tchécoslovaquie, Bart s'installe dans un village près de Pilsen. Il achète une petite exploitation agricole et pense mener une vie tranquille avec sa famille. Après le coup d'état de 1948, les communistes forçent les fermiers à entrer dans des coopératives agricoles avec tout leur patrimoine. C'était une sorte de confiscation indirecte des biens. Bart refuse de s'y plier. Les rebelles de ce genre se voient attribuer des quotas sur produits obligatoirement livrés si élevés, qu'il est impossible de répondre aux exigences de tels règlements absurdes. Les conditions deviennent de plus en plus inadmissibles. En 1950, Bartolomej Chudoba abandonne définitivement son exploitation et la vie de fermier. La famille déménage à Touskov, toujours la même région, où Bart trouve du travail dans une cimenterie. En juin 1953, il participe à la manifestation contre la réforme monétaire. Il est arrêté et condamné aux travaux forcés dans les redoutables mines d'uranium. Un an plus tard, il meurt dans la mine pendant les heures de travail. La cause de sa mort reste obscure et inexplicable. Sa femme et ses deux filles ont quitté la Bohême pour la France. Elles sont revenues en République tchèque en 1997. A Jachymov, ville des mines d'uranium, elles ont retrouvé au musée, sur la liste des anciens prisonniers, le nom de leur mari et père.
Les filles de Bartolomej Chudoba ont fait des tentatives de recherches sur la mort mystérieuse de leur père en contactant à plusieurs reprises les autorités officielles de la République tchèque mais sans succès. Grâce à l'historien Karel Bartoska elles ont juste appris qu'en 1991 Bartolomej Chudoba a été réhabilité et que son dossier se trouvait toujours au ministère de l'Intérieur. Mais il est probablement impossible de l'obtenir.
Je tiens à remercier particulièrement monsieur Jan Stork, petit-fils du célèbre pilote de chasse de la Grande Guerre, également Jan Stork, pour les informations sur Bartolomej Chudoba, sans lesquelles il m'aurait été très difficile de faire mon émission.