Břetislav Pojar, le père de « Monsieur et Monsieur » : « On ne peut pas faire un bon film sans un bon scénario »
Vendredi, le cinéma d’animation tchèque a perdu une de ses grandes figures : Břetislav Pojar. Réalisateur et scénariste, collaborateur pendant de longues années du légendaire Jiří Trnka, auteur de plusieurs dizaines de films et professeur, il y a quelques années encore, à la FAMU, l’école de cinéma de Prague, Břetislav Pojar est décédé quelques jours après son 89e anniversaire.
Un regard nouveau et frais dans le milieu de cinéma d’animation, comme l’affirme le disciple de Břetislav Pojar, Jan Bubeníček,
« A la différence de Trnka, Zeman ou Týrlová qui étaient assez épiques dans leur narration, Pojar est arrivé, dans ses films, avec le dynamisme, la simplification et l’humour. »
Břetislav Pojar est né le 7 octobre 1923 à Sušice, dans les monts de la Sumava, au sud-ouest de la Bohême. Après la Seconde Guerre mondiale, Pojar se range parmi les pionniers du cinéma d’animation tchèque, en rejoignant le studio « Bratři v triku » et ensuite le « Studio du film de marionnettes ». Il participe aux films de son célèbre mentor Jiří Trnka avant de réaliser, à partir des années 1950, ses propres films remarqués à l’étranger pour leur aspect humaniste : « Perníková chaloupka » (Hansel et Gretel) et « O skleničku víc » (Un verre de trop) récompensé à Cannes et à Edimbourg, où encore « Lev a písnička » (Le lion et la chanson) qui lui a valu le Grand Prix au Festival d'Annecy en 1960. Le cinéaste a également collaboré, pendant de nombreuses années, avec l’Office national du film du Canada. Rappelons aussi sa participation, à la fin des années 1980, au film « L'Ours » de Jean-Jacques Annaud.En 2008, Anna Kubišta avait rencontré Břetislav Pojar à Třeboň, en Bohême du Sud, où il était membre du jury du festival du film d’animation. Břetislav Pojar a alors expliqué, en français, au micro de Radio Prague, quels étaient, selon lui, les critères pour un bon film d’animation. On l’écoute :
« Il y a tellement de possibilités, c’est difficile à dire. Normalement, on attend d’un film d’animation qu’il raconte quelque chose autrement qu’un film avec des acteurs, avec plus de fantaisie, un autre aspect des choses. Finalement, aujourd’hui il y a tellement de techniques que cela dépend des auteurs et des producteurs. (…) Je n’ai jamais utilisé la 3-D. D’une certaine façon, c’est beaucoup plus parfait que l’animation à la main, d’un autre côté, ça limite la personnalité du créateur, parce que quand vous travaillez avec un ordinateur, le résultat final est toujours fabriqué. »Vous voulez dire qu’on perd l’âme du créateur ?
« Oui, parce que la touche est indirecte. Normalement si vous faites un film d’animation, vous touchez les choses avec les mains, vous sentez, vous faites l’éclairage… Vous faites tout vous-même alors que dans le numérique, c’est la machine qui fait beaucoup de choses. Dans tous les cas, il faut être un bon scénariste. Le scénario, c’est le fond, pour toutes les techniques. »
En 1990, Břetislav Pojar est devenu le premier à diriger la chaire du film d'animation de l'école de cinéma FAMU. C’est au milieu de ses étudiants qu’il a fêté la semaine dernière, en pleine forme, paraît-il, ses 89 ans. Après avoir tourné, il y a six ans, un épisode du long-métrage « Fimfárum 2 », Břetislav Pojar préparait, avec le plasticien Vratislav Hlavatý, un nouveau film autour de la thématique de Noël.