Cent jours au château de Prague : Zeman, président d’une nation divisée
Entré en fonction le 8 mars dernier après son élection en janvier, pour la première fois au suffrage universel, cela fait désormais 100 jours que Miloš Zeman occupe officiellement le poste de président de la République tchèque. L’occasion de dresser un premier bilan de son mandat marqué notamment par les luttes de personnes.
« Les premiers cent jours, je les qualifie de démarrage d’une voiture qui commence tout juste à se mettre en marche. Parfois, mes collaborateurs me disent que j’ai accéléré le rythme de façon excessive, et que je ne tiendrai pas le coup, mais moi je leur dis que je vais encore appuyer sur l’accélérateur. Quand la voiture sera mise en marche, peut-être bien qu’elle roulera plus vite. »
À son entrée en fonction en 2003, son prédécesseur Václav Klaus, semblait également être le président d’une nation coupée en deux, mais il a néanmoins su tirer profit de son rôle au-dessus de la mêlée politique. Cent jours après son élection, il disposait de la confiance de près de 61% des Tchèques. Or, Klaus est devenu président en tant qu’homme politique actif, à l’inverse de Zeman qui a cessé d’occuper des fonctions politiques d’importance en 2002. Même si le nouveau chef de l’Etat semble convaincu du caractère proactif de sa fonction, la réalité semble être tout autre :
« Je répète une nouvelle fois, que bien qu’il n’ait pas d’initiative législative, le président peut influencer l’opinion publique par le biais de ses discours publics. »
Néanmoins, les raisons qui font que Zeman ne parvient pas à unifier la nation tchèque sont nombreuses. Le mode de suffrage, qui est passé du mode indirect au mode direct, est aussi à l’origine de la scission de la société tchèque, dans la mesure, où le second tour de la campagne électorale, menée par les deux candidats, avait divisé familles, amis et même collègues. Février dernier, Miloš Zeman avait gagné le duel présidentiel grâce aux populations des zones rurales tchèques, en opposition à l’actuel ministre des Affaires étrangères, Karel Schwarzenberg, soutenu par les habitants des grandes villes.L’affaire entourant le refus de Zeman de nommer au rang des académiciens, le professeur Martin C. Putna, pour sa participation à une gay pride, a récemment créé la polémique. En signe de protestations, sept des 65 nouveaux professeurs d’université nommés ont refusé mardi de participer à la cérémonie de remise de décret. Martin Putna ne recevra son décret que dans deux semaines des mains du ministre de l’Education. Le président est ainsi critiqué pour sa faculté à interpréter la Constitution selon sa convenance. Jiří Balvín, ancien directeur général de la Télévision tchèque, s’est expliqué sur le sujet :
« Il se débarrasse des choses problématiques, qui étaient traditionnellement accomplies par le président. Et à cela s’est rajouté le conflit personnel avec le professeur Martin Putna, un conflit qu’il a réglé de la façon la plus simple, c'est-à-dire qu’il a refilé la patate chaude à quelqu’un d’autre. »
D’autres raisons pourraient être liées également à ses apparitions en état d’ébriété lors de cérémonies officielles, mais démenties par l’intéressé lui-même. La cérémonie de clôture des joyaux de la couronne au Château de Prague en mai dernier, pendant laquelle le président somnolait et s’agrippait à la table des joyaux, a à nouveau illustré cette situation.L’attitude, excessivement personnelle du président semble être continuellement pointée du doigt. Or comme l’avait déjà évoqué l’ancien président Václav Havel, le président ne doit pas être qu’une ‘machine à signature’ mais doit pouvoir s’exprimer pleinement sur les pouvoirs, qui lui sont accordés.