Presse : la mission américaine du Premier ministre Petr Fiala

Petr Fiala et Joe Biden

Cette nouvelle revue de presse s’intéressera tout d’abord aux pourparlers du chef du gouvernement tchèque Petr Fiala à Washington cette semaine. Une coalition de forces dites « patriotiques » est-elle en train de se former sous la houlette de l’ancien président Miloš Zeman ? Un autre sujet traité : les efforts de la Tchéquie pour se détacher de sa dépendance énergétique à la Russie. Un mot enfin sur le boom des parcs commerciaux et sur la reconnaissance d’un écrivain allemand par la ville de Liberec.

« La visite effectuée par Petr Fiala cette semaine à Washington est la preuve de ce que la Tchéquie s’est imposée sur la scène internationale comme un Etat pro-occidental prêt à proposer des initiatives. » C’est ce qu’a noté, suite aux pourparlers du chef du gouvernement tchèque avec le président américain Joe Biden, le journal Deník N :

« Le monde a beaucoup changé depuis 2019, lorsque Donald Trump recevait à la Maison Blanche le Premier ministre tchèque de l’époque, Andrej Babiš, alors premier chef du gouvernement tchèque à se rendre au siège de la CIA à Langley. Aujourd’hui, en 2024, le même spectacle se répète, mais avec des acteurs et des contextes très différents. Depuis plus de deux ans, une guerre fait rage entre la Russie et l’Ukraine, pendant que le conflit qui se déroule au Moyen-Orient est entré dans une phase brûlante. Alors qu’il y a cinq ans, Babiš était accompagné du directeur du service de contre-espionnage tchèque (BIS), cette fois-ci, des chefs de trois services de renseignement tchèques se sont rendus à Washington avec Petr Fiala. Ce geste sans précédent dans l’histoire montre l’importance croissante de ces sources dans les relations internationales des deux pays. »

Comme le rappelle Deník N, la République tchèque s’est fait remarquer dans le monde surtout par son initiative visant à obtenir des munitions pour l’Ukraine, projet auquel une vingtaine de pays se sont joints à ce jour. « Une initiative qui reflète la volonté du pays de jouer un rôle actif dans la solution à des problèmes d’envergure mondiale et qui le définit clairement comme un allié de l’Occident », peut-on aussi lire. Un avis qui est partagé par l’éditorialiste du site Novinky.cz :

« La visite du Premier ministre ou du président d’un pays allié à la Maison Blanche est symbolique. Les réunions de travail des alliés ne se déroulent pas en public et devant les caméras de télévision. Or, le séjour de Petr Fiala dans la capitale américaine et ses rencontres avec les dirigeants américains confirment la place de la Tchéquie dans le monde d’aujourd’hui. »

Selon Lidové noviny, il est important que le Premier ministre Fiala ait été reçu à la Maison Blanche. « Le pays, qui suit la ligne américaine depuis les présidents Masaryk et Wilson, veut continuer à le faire. Il serait injuste de reprocher à Fiala de n’avoir rien convenu de fondamental à cette occasion. Il est peu probable qu’un autre dirigeant européen eut fait mieux. Par ailleurs, l’aide à l’Ukraine doit encore être débattue au Congrès, ce que même le président Biden n’influencera pas », conclut le journal.

Une coalition « patriotique » sous la houlette de Miloš Zeman ?

Le journal en ligne Deník Referendum s’est intéressé aux activités déployées par Miloš Zeman en faveur de la formation d’une coalition de forces « patriotiques », ou plutôt nationalistes-conservatrices, pour les prochaines élections législatives de 2025. Et ce, en dépit du fait que l’ancien président tchèque ait assuré, après l’expiration de son deuxième mandat en 2023, qu’il allait quitter la politique pour profiter de sa retraite. « Zeman ne tient pas sa parole », a-t-il écrit. Et de préciser :

Miloš Zeman | Photo: Ondřej Deml,  ČTK

« Ces forces se rangent plus ou moins du côté de la Russie de Poutine dans la guerre contre l’Ukraine ou prônent la neutralité. De même, elles soutiennent une stratégie en faveur de la position internationale de la Tchéquie comme un ‘pont’ entre l’Est et l’Ouest ou encore rêvent d’une fraternité slave inébranlable, la Russie en tête. Zeman a des sympathisants au sein de tous les groupes qu’elles représentent, qu’il s'agisse du mouvement ANO d’Andrej Babiš, du parti d’extrême-droite SPD d’Okamura, de la formation communiste Stačilo! ou de la social-démocratie souverainiste tchèque. »

« Fidèle à son instinct politique, Zeman croit qu’il a encore une chance de marquer l’histoire après la fin peu glorieuse de son dernier mandat présidentiel. », écrit l’éditorialiste de Deník Referendum. L’occasion pour lui d’avertir :

« Il ne faut pas sous-estimer la menace d’une victoire de la coalition ‘patriotique’ de Zeman aux prochaines élections législatives qui aurait des effets sur l’orientation de la politique étrangère du pays. Ses représentants sont très motivés, ils sentent que les évolutions internes et géopolitiques jouent en leur faveur. On peut supposer qu’il y aura de généreux mécènes qui leur fourniront les fonds nécessaires à cette fin. Ils sont d’ailleurs encore nombreux autour de Zeman. »

Vers l’indépendance énergétique vis-à-vis de la Russie

« Après deux ans de guerre, sommes-nous toujours dépendants de la Russie en matière d’énergies? », s’interroge l’auteur d’un texte publié dans le quotidien Hospodářské noviny. La réponse, selon lui, n’est pas univoque :

Photo illustrative: Commission européenne

« Le projet d’indépendance à l’égard des livraisons russes se concrétise. Toutefois, le chemin qui y mène n’est pas facile. La semaine dernière, par exemple, alors que l’Ukraine devait faire front à de nouvelles attaques dévastatrices de la Russie contre ses infrastructures énergétiques, l’opérateur public d’oléoducs MERO a indiqué que la part du pétrole importé dans le pays avait augmenté de 58 %. Un constat alarmant. »

Toutefois, comme l’ajoute l’éditorialiste du quotidien économique, les perspectives s’annoncent plus optimistes en raison de la modernisation et l’augmentation de la capacité de l’oléoduc italien TAL. S’agissant de l’approvisionnement en gaz fossile, la situation n’est pas plus réjouissante  :

« Alors qu’il y a exactement un an, le ministère de l’Industrie et du Commerce pouvait se vanter du fait qu’aucun gaz russe n’était arrivé en Tchéquie au cours du premier trimestre, cette année, ce n’est pas le cas. Au tournant de l’année, la part des importations dépassait les 60 %. »

Il s’avère donc, comme le reconnaît l’analyste de Hospodářské noviny, que se débarrasser de la dépendance énergétique à la Russie est un problème complexe. « Le secteur énergétique russe est une pieuvre qui s’infiltre dans le secteur européen de multiples façons. Il faut couper ses tentacules qui sont particulièrement puissantes dans l’est de l’Union européenne, une fois pour toutes », souligne-t-il.

Le boom des parcs commerciaux en Tchéquie

La Tchéquie connaît un nouveau boom de parcs commerciaux, conséquence du ralentissement des constructions lié à la pandémie de Covid-19.  C’est ce que révèle un texte mis en ligne sur le site Seznam Zprávy selon lequel cette évolution touchera en premier lieu les petites municipalités :

Photo illustrative: Radek Linner,  Wikimedia Commons,  CC BY-SA 3.0

« L’année dernière, plus de 62 000 mètres carrés de parcs commerciaux ont été construits dans le pays, comptant de petites zones commerciales en plein air avec quelques magasins et un parking. Il s’agit de la deuxième plus importante augmentation de ces dix dernières années. Pour cette année, un nouveau record avec près de 117 000 mètres carrés est prévu. »

Désormais, les investisseurs privilégient les villes de moins de 10 000 habitants. « Les nouveaux parcs commerciaux sont construits dans des localités de plus en plus petites et ils sont également plus petits que jamais », précise l’éditorialiste avant d’ajouter :

« Ils sont construits même dans des communes de quelque milliers d’habitants, situées à proximité de routes très fréquentées. Dans certaines d’entre elles, le nombre d’habitants ne dépasse pas les 5 000 personnes. Cette année, des projets de ce type devraient être achevés dans des communes plus petites encore. »

A Liberec, un prix à titre posthume à l’écrivain Otfriedd Preussler

Le site info.cz rapporte que la municipalité de Liberec va décerner un prix à titre posthume à l’écrivain allemand Otfried Preussler, natif de cette  ville, pour son apport au domaine de la culture. Le tout au moment ou la ville de Pullach en Allemagne s’apprête à renommer un lycée qui porte le nom de l’écrivain, à cause d’un livre pro-nazi qu’il a écrit à l’âge de dix-sept ans. L’ouvrage a été interdit après la guerre avant de tomber dans l’oubli :

Otfried Preussler | Photo: Markus Schlaf,  Wikimedia Commons,  CC BY-SA 4.0 DEED

« La ville de Liberec s’était déjà rappelée de son natif célèbre, auteur de nombreux ouvrages pour enfants qui lui ont valu une renommée mondiale et qui sont également populaires en Tchéquie, l’année dernière à l’occasion du centenaire de sa naissance. La municipalité connaît le passé de l’écrivain qui a écrit plus d’une trentaine de livres pour enfants dont plusieurs ont été adaptés pour le cinéma. Elle estime cependant que son œuvre ultérieure a compensé son passé, contribuant à la compréhension entre les nations. Par ailleurs, 22 écoles et lycées portent en Allemagne le nom d’Otfried Preussler. »