Chaîne commerciale par excellence, Tv Nova fête ses 20 ans

Photo: Jiří Suchomel, ČRo

Le matin du 4 février 1994, les téléspectateurs tchèques découvrent TV Nova, la première chaîne de télévision privée diffusée sur l’intégralité du territoire tchèque. En vingt années d’existence, la chaîne a beaucoup évolué avec par exemple l’importation de concepts commerciaux tels que la téléréalité et l’abandon de la diffusion analogique pour le numérique. Elle a surtout dû s’adapter à un paysage audiovisuel en plein chamboulement et marqué par l’apparition de nombreux canaux privés la concurrençant. S’adressant à un très large public, Nova est restée relativement populaire.

Photo: Jiří Suchomel,  ČRo
Lors de l’attribution de sa licence de diffusion en 1993, le cahier des charges de Tv Nova promet la mise sur pied d’un programme ambitieux, s’articulant autour d’émissions de débats, éducatives et culturelles. A l’image des engagements initiaux de sa lointaine cousine TF1, ces belles intentions resteront poussière. Nova devient une chaîne commerciale classique sous l’égide de son premier directeur général, Vladimír Železný, lequel anime une émission qu’Hugo Chavez n’aurait pas renié, Volejte ředíteli (Appelez le directeur), dans laquelle il répond aux questions des spectateurs. Spécialiste des médias, Milan Šmíd raconte :

« Il est vrai que Tv Nova a importé tous les formats des télévisions commerciales qui avaient fait leurs preuves, à commencer par les émissions de hit-parade et jusqu’aux jeux télévisés. »

Dans les années 2000, les chaînes commerciales importent, dans cette logique, les émissions de téléréalité. La chaîne privée concurrente Prima ouvre le bal le 15 août 2005 avec VyVolení (Vous élu), Nova réplique deux semaines plus tard avec BigBrother (produit par Endemol). Pour ces émissions, le Conseil pour la diffusion audiovisuelle inflige de lourdes amendes aux deux chaînes jugées coupables de menacer l’ « évolution physique, psychique et morale des enfants » du fait de l’agressivité, des pratiques manipulatoires ou encore de la vulgarité de ces programmes.

Petr Dvořák,  photo: Šárka Ševčíková,  ČRo
Une recette qui fonctionne plutôt bien également pour les informations diffusées sur Nova, une actualité sensationnaliste faisant la part belle aux faits divers et aux aléas météorologiques. D’ailleurs, Petr Dvořák, le directeur général de cette chaîne de 2003 à 2010, qui rejoint ensuite la tête de la Télévision publique, expliquait clairement, en 2011, que les chaînes commerciales n’ont pas les moyens de financer un journalisme d’investigation :

« C’est quelque chose que les chaînes commerciales ne font pas trop, surtout en période de crise économique. Elles essaient surtout d’adopter une ligne efficace économiquement. Pour faire ce type de programme de façon satisfaisante, cela requiert beaucoup d’argent et je ne pense pas que les télévisions commerciales investiront dans ce secteur. »

Malgré le non-respect des engagements de Tv Nova en matière de diffusion culturelle, sa licence est sans cesse renouvelée. Eclate toutefois en 1999 un conflit avec l’investisseur américain CME, un temps actionnaire de la chaîne. Ce groupe lance deux arbitrages contre la République tchèque qui aurait échoué à protéger ses investissements. L’un des arbitrages donnent raison à CME et l’affaire coûte dix milliards de couronnes aux citoyens, contribuables et téléspectateurs tchèques.

Le groupe Nova, qui a développé tout un bouquet de chaînes plus ou moins spécialisées, souffre à présent de la dispersion des recettes publicitaires, phénomène lié notamment au développement d’Internet. La société a donc tenté de négocier avec les diffuseurs de réclame ainsi que l’explique Jan Potůček, un journaliste s’intéressant à l’évolution des médias :

Photo: romexico / Stock.XCHNG
« La direction du groupe Nova a essayé d’augmenter le prix des espaces de publicité, de supprimer certains bonus et de contourner des opérateurs médiatiques. Cela n’a finalement pas eu un impact positif sur son accès aux annonceurs publicitaires et la plupart d'entre eux se sont tournés vers le concurrent Prima. »

Depuis le départ de l’actionnaire CME, la société de production Warner Bross et le groupe d’informations CNN ont injecté de l’argent dans le groupe Nova jusqu’à devenir propriétaires de près de la moitié de son capital. La ligne éditoriale et commerciale de la chaîne n’a elle pas changé.