Coronavirus : les Tchèques et les Slovaques réclament l’ouverture de la frontière qui les sépare

Photo illustrative: ČTK/Hájek Ondřej

Malgré le déconfinement, la frontière entre la Tchéquie et la Slovaquie reste étanche. Des personnalités culturelles et publiques des deux pays demandent à leurs gouvernements respectifs son ouverture.

Photo illustrative: ČTK/Hájek Ondřej
« Je vais à la frontière remettre des cadeaux à ma famille slovaque. Notre grand-mère a fêté son anniversaire et nous ne pouvions pas être présents. Alors on va se rencontrer à la frontière avec mes proches, comme sous le communisme », dit le Tchèque František Papšík, avec une pointe d’amertume. Séparé de sa famille, cet homme originaire de la Valachie morave, une région limitrophe de la Slovaquie, doit également se priver des week-ends passés dans sa maison de campagne, située à quelques centaines de mètres seulement de la frontière, du côté slovaque.

Un des Etats européens les moins affectés par l’épidémie du Covid-19, la Slovaquie, pays de 5,5 millions d’habitants, faisait état le 11 mai dernier de quelque 1 457 cas de la maladie, 26 décès et presqu’un millier de personnes guéries. Moins touchée que la République tchèque voisine, où le nombre de personnes contaminées s’élève à plus de 8 100 depuis le début de l’épidémie, la Slovaquie se félicite d’avoir empêché la propagation de la maladie à l’aide des mesures particulièrement sévères : toutes les personnes qui entrent sur le territoire slovaque doivent passer au moins une semaine en quarantaine dans des centres isolés, prévus à cet effet (un test de dépistage au Covid-19 négatif daté de moins de quatre jours doit être présenté à la frontière au moment de l’arrivée en République tchèque, ndlr).

Viktorie fait partie des plusieurs milliers de Slovaques revenant de l’étranger qui ont vécu cette expérience :

« Malgré nos protestations, la police nous a divisés en plusieurs groupes à la frontière et nous a placés dans des chambres communes. J’ai alors partagé la chambre avec trois autres femmes que je ne connaissais pas. Au début, on ne savait même pas où on était. Petit à petit, nous avons fait connaissance les uns avec les autres, en discutant sur les balcons et en attendant les tests. »

Les Slovaques installés en République tchèque, dont le nombre est estimé à plus de 100 000, ainsi que de nombreux Tchèques ayant des racines en Slovaquie, préfèrent alors ne pas passer d’un pays à l’autre pour éviter cette mise en quarantaine rigoureuse.

La fermeture des frontières a perturbé les contacts étroits entre les deux pays qui, jusqu’en 1993, formaient un seul Etat. Une dizaine de personnalités ont demandé aux autorités de Prague et de Bratislava de faire revivre, en quelque sorte, cette Tchécoslovaquie de jadis. La semaine dernière, une dizaine de personnalités tchèques et slovaques, parmi lesquelles des anciens politiciens et diplomates, artistes et journalistes, ont envoyé une lettre ouverte à leurs gouvernements respectifs.

Directeur de la Bibliothèque Václav Havel de Prague, Michael Žantovský, explique :

Michael Žantovský,  photo: Michaela Danelová,  ČRo
« Notre appel lancé aux responsables politiques réagit à l’évolution favorable de la situation épidémiologique en Tchéquie et en Slovaquie. Nous voulons encourager les gouvernements dans leurs négociations sur l’ouverture de la frontière. Les Tchèques et les Slovaques pourraient être les premiers à lever ce genre de restrictions en Europe centrale et pourraient servir d’exemple aux autres pays. »

Alors que la Slovaquie a récemment annoncé la prolongation de la fermeture de ses frontières jusqu’au 27 mai, le Premier ministre Igor Matovič a fait savoir que les déplacements vers la République tchèque seraient les premiers à être autorisés. La diplomatie tchèque, quant à elle, prévoit la réouverture complète des frontières avec les pays voisins pour juillet, les négociations étant, selon elle, « les plus avancées » avec la Slovaquie et l’Autriche.