Coronavirus : très prudemment, les Tchèques se démasquent
Le port d’un masque de protection des voies respiratoires ne sera plus que partiellement obligatoire en République tchèque à compter du 25 mai, ne serait-ce qu’en plein air.
« Masques : combien de temps encore ? », titrait l’hebdomadaire Respekt lundi, en une de son édition de cette semaine, au-dessus d’un dessin montrant le ministre de la Santé Adam Vojtěch masqué. Devenu obligatoire dès le 19 mars pour tous les déplacements, même en plein air, malgré alors l’importante pénurie, et symbole au début de la crise de la mobilisation et de la solidarité en République tchèque contre la propagation de la maladie, le port du masque divise désormais.
D’un côté, les partisans d’un maintien de son obligation, qui pensent que celle-ci a permis de sauver des vies et de relancer plus rapidement l’économie du pays. De l’autre, ceux qui estiment que la farce a désormais assez duré. La semaine dernière, le sénateur et cancérologue Jan Žaloudík a estimé que le masque était devenu « le symbole tchèque de la peur et de la docilité. »
« Il faut un masque pour aller à l’école, mais plus pour boire une bière en terrasse », notait pour sa part le quotidien Deník N, alors que le processus de levée progressive des mesures de restriction s’est notoirement accéléré en République tchèque en ce début de semaine, avec la réouverture notamment des centres commerciaux, de certaines écoles, des musées et galeries, des terrasses des bars et restaurants ou encore des salons de coiffure.
Devenu aussi indispensable pour sortir de chez soi qu’une paire de chaussures, accessoire de mode parfois même, ce fameux masque, le plus souvent de tissu, peut aussi être considéré comme un symbole de la discipline et du respect des Tchèques pour les mesures imposées par les autorités, aussi contraignantes celles-ci soient-elles. Le Premier ministre Andrej Babiš, qui comme tous les autres politiques n’est plus apparu en public autrement que masqué depuis le mois de mars, a même parlé de la Tchéquie comme d’une « puissance du masque ».Parallèlement, les cas de dénonciation n’ont pas été rares et le non-respect de son port est même passible d’une amende de 10 000 couronnes (370 euros). Même si les policiers ont le plus souvent fait preuve d’une certaine compréhension et ont préféré adresser des remontrances aux fautifs, à ce tarif-là mieux vaut quand même être discipliné.
Avec l’arrivée des beaux jours et des premières chaleurs, la question a néanmoins été formulée de plus en plus souvent : jusqu’à quand donc encore va-t-on devoir porter ce fichu masque ? La semaine dernière, les résultats de l’étude sur l’immunité collective menée dans cinq régions du pays ont démontré que le taux de contamination était très faible en République tchèque. Les près de 27 000 tests effectués en l’espace d’une douzaine de jours sur des volontaires de tous âges ont permis de relever à peine un plus de 100 cas positifs. Une situation très proche de celles constatées précédement en Autriche et en Allemagne voisines, ou encore en Slovaquie, un pays parmi les plus épargnés par le coronavirus en Europe.Avec l’application du système dit de « quarantaine intelligente » basé sur le traçage numérique – même si celui-ci ne fonctionne pas encore à plein régime -, le gouvernement a donc décidé d’accélérer le processus de déconfinement avec pour préoccupation notamment de relancer la machine économique.
Annoncée lundi par le ministre de la Santé, la levée, très partielle, de l’obligation du port du masque entre dans ce cadre. A compter du 25 mai, dès lors qu’ils seront à l’extérieur, les Tchèques pourront donc de nouveau se déplacer sans masque, à la seule condition de respecter une distance d’au moins deux mètres entre les personnes. Et même s’il restera obligatoire dans tous les bâtiments publics, les commerces, les transports en commun et autres lieux fermés, les élèves et étudiants qui s’apprêtent à passer leurs examens peuvent le retirer à compter de ce mardi, de même que les patients et les personnels de la santé lorsque la situation l’exigera pour dispenser les soins et fournir les services.Autant d’exceptions qui concernaient déjà les enfants dans les écoles maternelles, les chauffeurs dans les transports en commun, les membres d’une même famille se déplaçant en voiture, les autistes ou encore les enfants âgés de moins de deux ans. Ainsi donc, quoiqu’encore très prudemment, les Tchèques font peu à peu tomber le masque.