Covid-19 : une nouvelle campagne choc pour convaincre les Tchèques vaccino-sceptiques
Les photos choc de patients en réanimation et même des personnes décédées du Covid-19 sont au cœur d’une nouvelle campagne lancée par le ministère tchèque de la Santé. Controversée, « répugnante » selon certains, cette campagne est censée convaincre les réfractaires au vaccin anti-Covid.
Elle arrive au moment où la République tchèque, avec moins de 60% de la population complètement vaccinée, est confrontée à une nouvelle vague épidémique. Ce jeudi, pour la troisième fois cette semaine, le nombre de nouvelles contaminations au coronavirus a dépassé la barre des 10 000. Selon les données relevées par le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies au cours des quinze derniers jours, la République tchèque est le 11e pays le plus impacté par la pandémie au sein de l’UE (derrière la Belgique à la 8e position, mais loin devant la France, à la 22e place).
Critiqué, entre autres, pour n’avoir envoyé que peu d’équipes de vaccination mobiles en province, dans les régions frontalières notamment, et pour ne pas avoir lutté contre la diffusion massive de fausses informations sur la vaccination, le ministère de la Santé décide de durcir le ton à l’égard des non-vaccinés.
Il a en effet lancé une campagne médiatique inédite dans le pays, publiant une dizaine de photos de patients Covid en réanimation, de victimes de la maladie placées dans un sac mortuaire et dans un cercueil. Les clichés sont accompagnés de commentaires tels : ‘elle remettait la vaccination à plus tard’, ‘il trouvait toujours un prétexte’, ‘elle pensait avoir encore du temps’ ou alors ‘il croyait aux infox’.
Les photographies prises dans un hôpital pragois ont suscité l’indignation. Recteur de l'Université technique de Prague, Vojtěch Petráček n’a pas hésité à envoyer une lettre ouverte au ministre de la Santé dans laquelle il dénonce une campagne « de mauvais goût » et « contraire à l’éthique ». Prêtre, biologiste et chef du département de l’éthique médicale à la Faculté de médecine de l’Université Charles, Marek Orko Vácha ne partage pas cet avis :
« Certes, c’est une campagne négative. Mais l’Etat doit bien agir. Nous ne vivons pas une période de calme, nous sommes en guerre contre le coronavirus et n’avons plus le temps de discuter. Mardi dernier, le nombre de nouveaux cas a dépassé 14 000. La situation est très sérieuse et l’Etat fait ce qu’il peut pour y faire face. Bien sûr que cette campagne est brutale et controversée. Mais d’un autre côté, aucune des personnes figurant sur les photos ne peut être identifiée. (…) Nous sommes dans une situation d'extrême urgence, il faut faire le maximum pour persuader les gens de se faire vacciner. C’est une campagne qui peut sauver des vies, voilà ce qui est important. »
D’ici quelques semaines, le ministère de la Santé, qui aura encore un nouveau chef, entend lancer une nouvelle campagne, censée promouvoir la dose de rappel du vaccin anti-Covid.
Face à l’urgence, de nombreux spécialistes rappellent que si l’Etat mise sur la vaccination, il devrait également rendre plus efficaces les autres stratégies de lutte contre le Covid-19, à savoir les contrôles rigoureuses des passes sanitaires, le traçage, l’isolement des malades et le dépistage systématique dans les établissements scolaires et sur les lieux de travail.
« Si on ne prend pas des mesures importantes pour limiter la propagation de l’épidémie alors on pourrait voir 3 000 à 12 000 personnes mourir inutilement en République tchèque », a déclaré cette semaine l’immunologue Zdeněk Hel du groupe interdisciplinaire pour la lutte contre l'épidémie MeSES.
Ce vendredi, un nouveau paquet de mesures sanitaires a été discuté en conseil des ministres, dont l’interdiction d’accès dans certains lieux pour les non-vaccinés qui vient d’être mise en place en Autriche voisine. Mais pour l’heure, aucune mesure concrète n’a été annoncée par le gouvernement sortant, mise à part une campagne nationale de tests prévue d’ici fin novembre dans les écoles primaires et les lycées tchèques.