Dance Well : à Prague aussi, des ateliers de danse pour les malades de Parkinson

Dance Well - Classes and training in Bassano Del Grappa

Dance Well, un projet européen, s’exporte à Prague. Objectif : apporter du lien social et redonner une mobilité aux personnes atteintes de la maladie de Parkinson. Entretien avec sa responsable, Markéta Perroud, directrice artistique du théâtre de danse Ponec à Prague et co-directrice artistique du festival Tanec Praha.

Un projet aux origines italiennes

Dance Well est un projet qui vise à organiser des ateliers pour des personnes en situation de mobilité réduite. Quel en est l’origine ?

Markéta Perroud | Photo: Site officiel du festival Tanec Praha

« En 2013, je suis allée à Bassano del Grappa, en Italie, où je voyage régulièrement, notamment pour y suivre B motion, un festival dans le programme duquel j’ai découvert que ces cours Dance Well étaient proposés chaque matin pour des groupes mixtes. Quels que soient son âge ou sa profession, toute personne intéressée pouvait venir. Dans un musée du centre-ville, nous avons donc dansé en portant notre attention sur nous-mêmes, le bien-être et la création d’une communauté. Cela m’a beaucoup touchée. J’ai découvert pourquoi je faisais de la danse en me posant cette autre question : qu’est-ce que je veux transmettre à travers la danse ? »

« Depuis, je participe chaque année, ce qui m’a permis de constater que le projet s’étendait en Europe. Il permet de créer une véritable communauté. »

« En 2021, on nous a proposé de rejoindre le projet. Dans le cadre du programme Europe Créative, nous avons pu bénéficier d’une subvention européenne. Le projet est maintenant financé jusqu’en 2025, ce qui nous offre de bonnes bases pour espérer le poursuivre à l’avenir. »

Pourquoi avez-vous importé ce projet à Prague ?

« Dès 2013, j’ai souhaité que nous organisions la même chose à Prague. J’étais sûre que Tanec Praha était un partenaire solide. Cela a effectivement été une réussite puisqu’avec l’aide d’autres partenaires étrangers, nous avons pu rejoindre Dance Well. »

Recréer un lien social

Photo: Frédéric Lovino,  Tanec Praha

« Il faut préciser que ces ateliers sont avant tout une activité artistique. La danse peut avoir des effets thérapeutiques, mais nous ne sommes pas des thérapeutes. Les ateliers sont menés par des danseurs ou des chorégraphes qui sont formés pour travailler avec ce type de public. »

Comment se déroulent les cours ? Une organisation particulière est-elle nécessaire ?

« Les artistes accueillent chaque personne qui souhaite participer. Ces ateliers sont ouverts aux malades de Parkinson mais aussi aux personnes qui souffrent d’autres pathologies. Nous sommes ouverts à toutes les personnes qui veulent simplement rejoindre une communauté. »

« Concernant le déroulement des cours, nous pratiquons surtout des exercices de créativité adaptés à la personnalité de chaque participant. Avoir déjà pratiqué de la danse n’est pas nécessaire. Chacun peut trouver sa place dans ce groupe. »

« La spécificité de Dance Well réside dans le fait que les ateliers se tiennent dans divers cadres qui servent de source d’inspiration : dans des musées, des galeries ou tout espace où laisser sa vie quotidienne derrière soi est plus facile. Le but est que les participants se laissent inspirer par l’espace dans lequel ils dansent. »

Pourquoi est-il important d'apporter cette activité artistique à ce public en particulier ?

« Les activités adaptées pour les personnes souffrant de pathologies existent. Mais ce sont des activités réservées exclusivement à ces personnes. Avec le projet Dance Well, nous souhaitons souligner l’importance des ateliers en groupe mixte. Il n’y a pas que des malades de Parkinson, mais aussi leurs familles, les artistes ou les curieux qui peuvent participer. Personne ne dit qui est malade ou ne l’est pas. Nous refusons de catégoriser et de différencier les gens. Pendant l’atelier, chacun devient danseur. C’est donc un groupe qui est ouvert précisément dans le but de créer une communauté. »

Ces ateliers sont-ils aussi une réponse à l’isolement de ces personnes ?

« Exactement. Nous voulons lutter contre leur isolement social. C’est aussi le but recherché : à travers ces ateliers, aider à l’intégration de ceux qui se sentent isolés. »

En quoi ces cours de danse adaptés diffèrent-ils des ateliers habituels ? La musique ou certains mouvements sont-ils adaptés ?

Photo illustrative: Annick Vanblaere,  Pixabay,  Pixabay License

« Il n’y a pas de méthode ou de technique. Les professeurs de danse essaient de travailler avec les personnsalités de tous en gardant à l’esprit que chacun peut être créateur de son propre mouvement. Finalement, chacun peut créer son propre style de danse : danser des yeux ou de la tête, par exemple, peu importe. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les ateliers sont vraiment ouverts à tout le monde. »

Les professeurs qui animent ces ateliers ont-ils reçu une formation spécifique ?

« Former les artistes de manière à ce qu’ils puissent travailler avec des personnes atteintes de Parkinson ou de troubles de motricité similaires est un autre aspect du projet Dance Well. Avant d’organiser des ateliers, les danseurs travaillent avec des médecins, des chercheurs ou des artistes qui possèdent déjà une expérience en la matière. Pendant la formation, nous pouvons également travailler avec des personnes qui ont suivi les ateliers. Cela nous permet d’essayer certaines pratiques avec eux et d’avoir leurs avis. Dance Well est un projet qui développe la culture de la danse. »

Dance Well | Photo: Anna Kushnirenko

Un projet européen en expansion

Envisagez-vous aussi d’organiser des représentations à l’issue de ces ateliers ?

« Oui, la création chorégraphique fait elle aussi partie du projet. Des chorégraphes locaux ou internationaux sont invités à présenter les créations des ateliers dans les programmations de chaque partenaire. »

Dance Well | Photo: Frédéric Lovino,  Tanec Praha

« Le projet est mené par la commune de Bassano del Grappa. Mais nous avons encore d’autres partenaires en Europe comme le Centre chorégraphique K3-Tanzplan à Hambourg, en Allemagne, ou deux centres nationaux de développement chorégraphique, la Briqueterie dans le Val-de-Marne et le Gymnase dans le Nord, en France. Nous travaillons aussi avec l’Université Ca’Foscari de Venise et la fondation Fitzcarraldo, en Italie. »

Avez-vous d’autres idées de projets à Prague ou ailleurs ?

« Nous n’en sommes encore qu’au début puisque nous lançons les ateliers ce 14 mars. Pour le moment, nous sommes en partenariat avec le centre communautaire Vozovna à Žižkov. La Galerie de la ville de Prague et le centre culturel Krenovka nous ont également proposé d’organiser des ateliers dans leurs locaux. »

« Nous attendons tous de voir où le projet nous mènera. Je travaille avec une très belle équipe de danseurs contemporains : Cécile da Costa, Bára Látalová, Markéta Vacovská, Hanka Polanská et Roman Zotov Mikshin. Leur expérience et leur expertise apportent beaucoup aux ateliers. »

« Nous sommes toujours à la recherche d’autres partenariats. Parkinson Help est un de nos partenaires par exemple. Nous en avons besoin pour pouvoir continuer à développer le projet et surtout le faire perdurer au-delà de 2025. »

Chaque mardi de 10h à 11h, retrouvez ces ateliers de danse gratuits à Prague. Vous trouverez toutes les informations nécessaires sur le lieu de l’atelier auquel vous souhaitez vous inscrire sur le site internet du théâtre Divadlo Ponec.