Dans les hospoda, le « pub quiz » tente de s’enraciner dans la culture populaire tchèque
Détrompons-nous : les bars et cafés en République tchèque ne sont plus seulement des endroits où l’on boit de la bière et où l’on échange avec ses voisins de table jusqu’à plus soif. Si la consommation de ce que les Tchèques appellent « le pain liquide » reste, aujourd’hui encore, une de leurs principales raisons d’être, les temps changent malgré tout. La preuve, par exemple, avec l’apparition progressive du pub quiz, un jeu qui tente de s’enraciner dans la culture populaire.
Il s’agit d’un jeu d’équipes avec plusieurs séries de questions, pas uniquement de connaissances, qui se déroule dans un « pub » (« hospoda » en tchèque) et donc dans un cadre divertissant entre amis ou collègues. L'idée est née dans les années 1970 en Grande-Bretagne, et on estime aujourd'hui qu’au moins un jour de chaque semaine est consacré à ces quiz dans quelque 40 % des pubs britanniques.
Pays de la bière par excellence, la Tchéquie joue bien évidemment un rôle important dans le développement du concept du pub quiz. Et ce d’autant plus que les Tchèques ont généralement l’âme sinon joyeuse, au moins joueuse. Ainsi donc, constater que le pub quiz, depuis son apparition au début des années 2010, s’est bien implanté dans les « hospoda », ces brasseries qui sont traditionnellement des lieux d’échanges et de lien social, n’est pas une surprise. Au contraire de la France par exemple, où le pub quiz reste une activité très largement méconnue.
Trois entreprises principales opèrent sur le marché tchèque en organisant ces quiz dans les bars et cafés de tout le pays. Michal Kliment est un des fondateurs de l’un d’entre elles, Chytrý Kvíz – littéralement « Quiz malin (ou intelligent) ».
« Chaque quiz dure environ deux heures et demi. Des équipes composées de deux à huit joueurs participent à cinq tours avec dix thèmes différents et cinquante-cinq questions au total. Les questions sont de tous les domaines possibles - cinéma, sport, géographie, etc. – de façon à ce que le contenu soit le plus varié possible. Puis les équipes qui répondent le mieux aux questions remportent différents prix : une bonne bouteille ou un bon de consommation dans le bar ou le restaurant où est organisé le quiz. »Le modèle commercial est simple : négocier un partenariat avec un bar, puis préparer et apporter le quiz comme produit fini. Le bar se charge à son tour du prix pour la meilleure équipe. Tous les participants aux quiz règlent un droit de participation de 60 couronnes (2,35 euros). Pour les bars, dont certains sont parfois confrontés à une faible fréquentation, l’intérêt est évident. Mais pour Michal Kliment, l’intérêt se trouve ailleurs :
« Je suis chargé de la qualité des quiz et de leur contenu. Je vérifie donc si les questions et les réponses sont correctes et je suis aussi le responsable d’une équipe chargée d’inventer et de contrôler les questions. Je prépare des dossiers et fiches pour les auteurs, puis je m’assure que les questions sont divertissantes et intéressantes de façon à ce qu’elles plaisent aux joueurs. »
Chaque thème qui est intégré au jeu est revu par au moins deux personnes, et ce pour réduire au maximum la présence d’erreurs factuelles ou de fautes linguistiques. Les auteurs des questions, parmi lesquels on trouve beaucoup d’étudiants, sont tenus de respecter des consignes précises. Ainsi, Wikipedia par exemple est interdit comme source de recherches. Les thèmes composés de cinq à six questions ne doivent être ni trop faciles, ni trop difficiles, et adaptés à toutes les catégories d’âge. En aucun cas, le jeu ne doit être perçu comme un test de connaissances scolaires, le but étant surtout de se divertir tout en enrichissant sa culture générale. Toutes les équipes peuvent rivaliser entre elles à un niveau local et même national dans le cadre de compétitions dont les résultats sont mis en ligne. Michal Kliment précise comment :« Les équipes peuvent participer aux ligues. Il leur suffit pour cela de participer aux quiz qui sont organisés dans leur bar et puis elles sont automatiquement réparties dans ces ligues. Le nombre de points gagnés et la participation aux soirées de quiz sont pris en compte dans le classement. »
Chytrý Kvíz ne fournit pas seulement des quiz « classiques » aux bars. Le jeu peut aussi constituer un programme original pour des événements de type team building ou fête parce qu’il renforce l’esprit d’équipe.
« On propose aussi des quiz destinés aux entreprises. On adapte alors les thèmes aux besoins de chaque société en fonction de ce que celle-ci nous demande. A l’avenir, nous envisageons de nous concentrer sur les quiz pour les mariages avec bien entendu des questions spéciales. »
En attendant, des quiz plus classiques sont régulièrement organisés dans plus de cent pubs situés dans une cinquantaine de villes du pays. Brno, parfois surnommé le « Las Vegas du pub quiz », et Ostrava peuvent être considérés comme les capitales du jeu, mais à Prague aussi, plusieurs endroits en permettent une pratique régulière. Où ? Michal Kliment nous sert de guide :
« A Prague, le plus grand quiz est organisé à Jihoměstský pivovar. C’est une brasserie qui se trouve dans le sud de Prague. On y trouve une centaine de joueurs chaque semaine, et c’est probablement le plus grand quiz existant actuellement en République tchèque. Je conseillerais aussi Café V lese, un bar musical dans le quartier de Vršovice. Là-bas, un quiz se tient chaque dimanche. »Cette année, Chytrý Kvíz, une des trois sociétés en République tchèque spécialisées dans l’organisation du jeu avec PubQuiz et Hospodský kvíz, fête son cinquième anniversaire avec déjà plus de 3 000 joueurs réguliers, majoritairement amateurs de bière et d’une autre manière de consommer celle-ci.