On danse à la Galerie nationale, et cela s'adresse à vous
La danse est un art qui a tellement à dire. Mais son drame, qui fait aussi toute sa puissance, est que la danse parle en silence. Comment donc atteindre ceux qui n’y sont pas initiés ? En allant les chercher par surprise hors des scènes conventionnelles et en interrompant leur course folle par des moments de grâce. C’est l’ambition du projet « Tanec v galerii » (« Danse dans la galerie »), né de la collaboration entre la Galerie nationale de Prague, la galerie Wannieck à Brno et le centre chorégraphique SE.S.TA. Au cœur des activités qui composent ce projet, la danseuse britannique d’origine tchèque, Andrea Miltnerová, offrira ces jeudi, vendredi et samedi, dans une enceinte de la Galerie nationale, une performance qui s’annonce séduisante. Marie Kinsky, directrice du centre SE.S.TA, présente les intentions fortes de cet événement.
« Cela va se passer dans le Malá dvoraná, « la petite cour », qui est en fait un espace absolument gigantesque, qui se trouve dans le musée d’art moderne, autrement dit la partie consacrée à l’art moderne de la Galerie nationale, qui s’appelle le Veletržní palác. L’espace est immense mais c’est un espace avec lequel il est possible de dialoguer. C’est un espace très particulier, qui a vraiment un caractère. »
Le dialogue : c’est bien ce qui est au cœur du projet. Dialogue d’abord entre les différents champs artistiques que représentent d’un côté la danse, de l’autre les arts modernes exposés à la Galerie nationale, et enfin l’immense architecture qui les abrite. Dialogue aussi entre l’art et le visiteur, qu’il soit averti, amateur ou tout simplement curieux. Dialogue intérieur enfin, ce qu’offre la danse généreusement et sincèrement, et ce qu’Andrea Miltnerová cherche à transmettre avec « Flashback ». Marie Kinsky :
« Si nous avons voulu travailler avec Andrea Miltnerová, c’est parce qu’elle est entrée dans un cycle de travail personnel qui se situe dans un dialogue avec elle-même, entre son passé de danseuse et sa réalité de danseuse aujourd’hui, entre les domaines d’art qu’elle a touchés auparavant et l’art contemporain. D’autre part, nous avons choisi de donner cette possibilité à une danseuse qui a énormément de présence. Ce qui ne veut pas dire que, dans le travail qu’elle va faire, elle va dégager de la force. Mais elle va vraiment pouvoir, par ses qualités personnelles, habiter cet espace, avec sa fragilité, donc communiquer, avec ce qu’elle est, avec cet espace, et c’est ce qui est intéressant dans le projet. »Il s’agit bien également de communiquer avec le public, plutôt que de le conquérir. Communiquer, ou mieux encore : converser. Car pour Marie Kinsky le motif fondamental du projet « Danse dans la galerie » se situe justement dans la participation active des visiteurs. On l’écoute :
« « Tanec v galerii » est un projet que nous avons démarré l’année dernière en collaboration avec la Galerie nationale. C’est en fait la Galerie nationale qui nous a demandé de participer, l’objectif étant, de la part de la Galerie nationale, de rendre plus vivant un espace d’exposition et d’autre part de donner accès à la danse à des gens qui normalement ne vont pas voir des spectacles de danse. Le troisième point, c’est de rendre les spectateurs actifs dans leur visite d’un musée ou dans leur vision d’un spectacle de danse. Á partir du moment où il y a cette relation, les gens sont obligés de s’impliquer différemment. »
Nous avons ainsi demandé à Marie Kinsky, elle-même danseuse professionnelle, de nous donner quelques clés pour mieux saisir les beautés mystérieuses de la danse contemporaine :
« Il y a quelque chose qui est commun à tous les domaines de l’art contemporain, c’est le fait d’oublier le concept – même si l’art contemporain est très conceptuel –, et de se laisser aller à sa sensation et à son ressenti. Et ça, c’est donc accessible à tout le monde. Ne pas avoir peur de ne pas avoir de connaissances dans le domaine, simplement faire sa propre expérience, utiliser son propre imaginaire et le laisser travailler avec l’artiste. Cela ne va pas plus loin. »Avec « Flashback », d’inspiration baroque, « Danse dans la galerie » renoue finalement, à la Galerie nationale, avec les traditions de l’époque baroque où il n’y avait pas de théâtres officiels mais où l’on jouait justement dans les lieux publics. Que les curieux se hâtent ces jeudi, vendredi et samedi au bon endroit. La performance d’Andrea Miltnerová aura lieu à 16h30.