Démission du ministre des Transports : le parti Affaires publiques éclaboussé par un scandale de corruption
Panique à bord de l’esquif gouvernemental : la coalition tripartite née des élections législatives d’il y a un an menace de s’effondrer. En cause : la désagrégation de l’un de ses partis, Affaires publiques (VV), miné par des affaires internes de corruption. L’une de ses figures les plus controversées, Vít Bárta, vient de démissionner.
Pour la politologue Vladimíra Dvořáková, cette nouvelle affaire au sein du gouvernement, déjà sérieusement discrédité ces derniers temps par d’autres remous, a un sens beaucoup plus large :
« Cela révèle juste une crise profonde de la politique tchèque qui ne concerne pas uniquement Affaires publiques. Elle montre juste le caractère général de la politique tchèque, des relations entre les partenaires de la coalition ou bien au sein des différents partis, qui consiste en menaces et en pressions. C’est cela le pire : la manière d’agir de l’élite politique rappelle plus celle de parrains au sein de groupe mafieux. »
Rappel des faits : au début de la semaine, l’hebdomadaire Respekt cite un député, Jaroslav Škárka, qui fait partie de la troupe rapprochée de Radek John, le chef du parti Affaires publiques – Škárka accuse Vít Bárta, ministre des Transports et fondateur de VV de lui avoir glissé une enveloppe conséquente pour sa loyauté et sa discrétion sur la gestion financière du parti. La direction pousse des cris d’orfraie et exclut Škárka du parti, accusé de « porter atteinte à l’image » de la formation.Mais l’affaire ne s’arrête pas là : jeudi, la présidente du groupe parlementaire Kristýna Kočí, en rajoute une couche, révèle que Vít Bárta lui aurait donné un demi-million de couronnes, et se pose en gardienne du temple en l’appelant à démissionner.
Kristýna Kočí, ainsi que deux autres membres du groupe parlementaire VV, sont exclus le même jour par leurs pairs qui affirment leur soutien à Vít Bárta, pourtant en fâcheuse position. Acculé face aux diverses accusations de corruption qui déstabilisent le gouvernement auquel il appartient, mais aussi son propre parti, celui-ci a fini par annoncer ce vendredi qu’il renonçait à ses fonctions de ministre des Transports. Une démission acceptée par le Premier ministre.
Si les députés « rebelles » ont accéléré la chute de Vít Bárta, il reste pourtant difficile de croire que ceux-ci auraient soudainement découvert les pratiques très spéciales de leur parti, faites d’intrigues et de jeux de couloirs. Vladimíra Dvořáková :« Cette affaire s’appuie clairement sur des faits réels. Mais il est très probable que, comme par le passé, ces affaires fassent surface au moment où un groupe cherche à l’utiliser contre un autre. C’est ce qui est le plus grave : c’est que la politique ne se fait pas ici sur des questions de programme, mais sur la base du chantage entre différents groupes d’intérêt. »
Dès la propulsion l’an dernier d’Affaires publiques dans l’arène politique, par des électeurs fâchés avec les partis traditionnels, certains commentateurs avaient mis en garde contre cette formation considérée comme populiste, et composée de membres au CV pour le moins douteux. C’est le cas justement de Vít Bárta, ancien directeur d’ABL, une société privée de surveillance, accusé d’ailleurs par les membres « rebelles » de VV de faire espionner ses adversaires. Tout un programme...Le quotidien Mladá fronta Dnes vient en outre de publier un document datant de 2008, présentant alors la conception de Vít Bárta pour les cinq années à venir : entrer en politique pour gagner en pouvoir économique, faire de sa société la plus importante agence de sécurité dans le pays avec des clients dans tous les secteurs d’influence, et ce, sans rechigner à infiltrer de potentiels clients pour mieux connaître leur profil.
Face à ce séisme interne, reste à savoir quelle va être l’attitude adoptée par le Premier ministre Petr Nečas secoué par d’autres affaires au sein de son gouvernement.