Des chercheurs tchèques découvrent les effets anti-tumoraux d’un remède contre l’alcoolisme

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C’est un nouvel espoir pour les malades du cancer. Une équipe internationale menée par les chercheurs de l’Université Palacký d’Olomouc a découvert que le disulfirame, un médicament utilisé pour lutter contre la dépendance à l’alcool mieux connu plutôt sous ses appellations commerciales d’Espéral et d’Antabuse, pouvait servir aussi dans le traitement de tumeurs. Cette découverte révolutionnaire, publiée par la prestigieuse revue scientifique Nature, fait actuellement l’objet d’essais cliniques.

Antabuse,  photo: ČT24
Il s’agit d’un comprimé ordinaire et bon marché qui est utilisé depuis quelques dizaines d’années déjà dans le traitement des personnes souffrant d’alcoolisme. Mélangé à l’alcool, le disulfirame provoque des nausées, des vertiges et des douleurs. Une équipe composée d’une trentaine de chercheurs tchèques, suisses, danois, suédois, canadiens et américains, et dirigée par le professeur Jiří Bártek de l’Université Palacký, a néanmoins récemment démontré que la substance possédait également d’importants effets anti-tumoraux.

Dans leur recherche, les scientifiques tchèques se sont basés sur les résultats d’une étude menée auprès de patients danois dépendants à l’alcool et atteints d’un cancer. Selon les chercheurs danois, les patients traités à la fois pour leur cancer et leur dépendance ont des chances de survie plus élevées que les patients ne consommant plus de disulfirame.

Martin Mistrík,  photo: ČT
Disposant de ces données laissant apparaître les possibles effets anti-tumoraux du médicament, les scientifiques d’Olomouc ont passé huit ans à observer les interactions entre le traitement et le tissu tumoral pour finalement découvrir comment cette poudre blanche tue les cellules cancéreuses. La recherche a permis d’établir que combiné au cuivre, le disulfirame se transforme dans le corps humain en une autre substance qui se concentre dans les cellules malades et bloque ainsi le fonctionnement d’une protéine qui leur est vitale. Martin Mistrík de l’Institut de médecine moléculaire et translationnelle de l’Université Palacký (IMTM) explique ce mécanisme en d’autres termes :

Zdeněk Škrott,  photo: ČT
« C’est comme si vous cessiez de ramasser les ordures dans une ville… Le médicament a pour effet que les cellules tumorales ne peuvent pas éliminer les déchets et commencent donc à les accumuler. En conséquence de quoi, elles ne sont pas capables de survivre. »

La disparition progressive des cellules cancéreuses provoquée par le disulfirame représente, pour les auteurs de l’étude, une découverte révolutionnaire, comme s’en félicite Zdeněk Škrott :

« Nous avons découvert une faiblesse du cancer qui était inconnue jusqu’à présent. »

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Les effets du disulfirame sur le corps humain étant bien connus, ce remède pourrait être mis à disposition des patients souffrant du cancer d’ici quelques années. Avant cela, ses vertus doivent toutefois encore être vérifiées par une série d’essais cliniques. Les scientifiques doivent également établir quelles sont les concentrations de cette substance les plus efficaces. Directeur d’IMTM, Marián Hajdúch ajoute :

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« Il ne s’agit pas seulement de vérifier les effets anti-tumoraux de ce médicament, mais aussi de prédire quels patients sont aptes à être traités par cette méthode. »

A l’avenir, le remède pourrait aider notamment les personnes souffrant d’un cancer du sein ou d’une tumeur cérébrale. Les premiers essais cliniques, auxquels participeront 100 à 150 femmes atteintes d’un cancer du sein métastasique, ont été lancés à Olomouc, il y a un mois de cela.