Dix ans depuis la répression brutale de la CzechTek 2005
La CzechTek, jusqu’alors le plus grand festival de techno en République tchèque, était brutalement réprimée il y a dix ans, le 30 juillet 2005. Une répression qui fit de nombreux blessés chez les teuffeurs comme chez les policiers, provoqua une grande vague d’indignation et valut à Jiří Paroubek, le premier ministre social-démocrate de l’époque, l’inimitié profonde et durable d’une partie de la jeunesse du pays.
En 2005, cette dernière condition n’est pas remplie et, prétextant s’appuyer sur les plaintes de propriétaires de terrains voisins, l’ordre est donné de disperser les quelque 5000 teuffeurs venus passer un bon week-end musical et festif près du village de Mlýnec, en Bohême de l’Ouest. Dès le vendredi 29 juillet, quand le site de la manifestation est dévoilé, les forces de l’ordre s’emploient à en compliquer l’accès.
Au total près d’un millier de policiers anti-émeute sont mobilisés et le lendemain dans l’après-midi, c’est à renfort généreux de coups de matraque, de gaz lacrymogène et de canons à eau que débute l’opération d’évacuation. Renata était venue s’amuser auprès des murs de son ce jour-là. Elle se souvient :« Ils ont encerclé tout le site et il y a eu ensuite des violences. Il y avait des canons à eau, des bombes fumigènes ont été lancées là où les gens dansaient. Les véhicules des policiers avançaient sans le moindre égard pour les voitures, les camions ou les tentes des festivaliers. Ils ont arrêté quelques personnes et cela de façon très brutale. En plus, ils avaient brouillé le signal des téléphones mobiles donc il n’était pas possible de passer un appel, de donner de ses nouvelles. En fait, il y avait un sentiment de peur. »
Un sentiment de peur qui se transforme bientôt en mouvement d’indignation et de protestation contre une opération policière dont le coût est tout de même estimé à 31 millions de couronnes. On dénombre de nombreux blessés dans les deux camps, une dizaine d’hospitalisations, et le site idnes.cz évoque même le décès d’un teuffeur, information rapidement démentie. Les images de tabassages font le tour des JT et František Bublan, le ministre de l’Intérieur, et Jiří Paroubek, se retrouvent sous le feu des critiques.Des manifestations, réunissant jusqu’à 5000 personnes à Prague, sont organisées dans plusieurs villes du pays. Des parallèles y sont faits avec les violences policières durant la période communiste. De son côté, Václav Havel en personne, jouissant alors d’une retraite bien méritée, s’offusque de l’intervention et se dit volontaire pour encadrer la discussion entre les parties en présence.
Après une première enquête demandée par le médiateur de la République qui conclut à la légalité de l’opération policière, les mois et les années qui suivent marquées par de multiples procédures judiciaires, contre les forces de l’ordre et contre les organisateurs de la party, dont presque aucune n’aboutit. En 2009, le tribunal municipal de Prague condamne cependant le ministère de l’Intérieur à dédommager financièrement et à fournir des excuses à deux participants de la free. Surtout, le durcissement de la position des autorités et la soudaine exposition médiatique de l’événement ont concouru à signer l’arrêt de mort de la CzechTek. Une dernière édition a encore lieu en 2006, rassemblant jusqu’à 40 000 personnes, mais le cœur n’y est plus. Aucune free party de cette envergure ne sera plus organisée. Des raves ont cependant toujours lieu tous les week-ends en Bohême et en Moravie. De taille plus modeste, souvent quelques centaines de personnes, elles sont peut-être plus proches de l’esprit originel du mouvement techno.