Droits de l’homme : après les écoles, les rues et un aéroport, un Prix Václav Havel

Václav Havel, photo: Tomáš Vodňanský / ČRo

Les défenseurs des droits de l’homme en Europe et dans le monde pourront désormais recevoir un prix portant le nom de Václav Havel. Le premier lauréat sera désigné à l’automne prochain, et comme l’a malicieusement remarqué le ministre tchèque des Affaires étrangères et ancien ami de Václav Havel, Karel Schwarzenberg, le monde est dans un tel état qu’il ne manquera certainement pas de candidats. En attendant de connaître l’élu, ce nouveau prix, officiellement baptisé Prix des droits de l’homme Václav Havel, a été présenté à Prague par Jean-Claude Mignon, le président français de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE).

František Janouch,  Jean-Claude Mignon,  Marta Smolíková,  photo: CTK
« Petit détour maintenant par Prague. Notre confrère Jean-Marc Illouz a rencontré Václav Havel, le président de la République tchèque. Cet homme au destin extraordinaire représente à lui seul une victoire des droits de l’homme. En tout cas, avec sa génération, il a changé le cours de l’histoire de son pays. Nous l’écoutons : Václav Havel : ‘…C’est vrai, les choses se sont terminées sans douleur chez nous. Certains ont cru y voir un miracle, d’autres, la récompense de leurs qualités personnelles. Mais avec le recul, j’estime qu’il s’agissait d’abord de la victoire de valeurs. A nous de réfléchir sur la façon dont les valeurs sont respectées aujourd’hui et de s'assurer qu’elles sont respectées tout court.’ »

Cet extrait est issu du journal de France 2 daté du 10 décembre 1998, au moment où était commémoré le 50e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Près de quinze ans plus tard, lundi 25 mars 2013, c’est donc à Prague qu’a été lancé le Prix des droits de l’homme Václav Havel. Décerné chaque année par l’APCE, en partenariat avec la Bibliothèque Václav Havel et la Fondation Charte 77, ce prix, selon le communiqué de presse publié par le Conseil de l’Europe, est « destiné à récompenser des actions exceptionnelles de la société civile dans la défense des droits de l’homme en Europe et en dehors du continent ». Cette récompense baptisée en hommage à l’ancien dissident et président devrait être l’équivalent du Prix Sakharov pour la liberté de penser, crée en l’honneur de l’ancien physicien nucléaire et dissident soviétique Andreï Sakharov. Attribué, lui, depuis vingt-cinq ans par le Parlement européen pour honorer les personnes ou les organisations qui ont consacré leur existence à la défense des droits de l’homme et des libertés, Václav Havel aurait très bien pu recevoir ce prix Sakharov, mais celui-ci a été remis en 1989 à une autre grande figure de la Révolution de velours, Alexander Dubček.

Václav Havel,  photo: Tomáš Vodňanský / ČRo
Le Prix Václav Havel remplace également le Prix de l’APCE qui existait depuis 2007 et était attribué tous les deux ans, comme l’a expliqué son président Jean-Claude Mignon :

« Désormais, ce prix porte le nom ô combien prestigieux de Václav Havel, ce dont notre assemblée est très honorée et très fière. Nous avons tous besoin d’une meilleure protection des droits de l’homme, dont les progrès réalisés collectivement résultent d’un immense engagement personnel et, souvent, de sacrifices personnels que le prix des droits de l’hommes a justement pour vocation de récompenser. En mai 1990, Václav Havel avait évoqué à Strasbourg, pour la première fois devant notre assemblée, l’immense force qu’incarnent nos idéaux. Se référant à l’emblème de notre organisation, il expliquait alors que les douze étoiles du drapeau ne signifiaient pas à ses yeux que le Conseil de l’Europe parviendrait à édifier le paradis sur Terre, car celui-ci n’existera jamais, mais plutôt que l’on pourrait vivre mieux sur Terre en osant parfois lever les yeux vers les étoiles. »

La dernière fois, en 2011, le prix des droits de l’homme de l’APCE avait été attribué à l’ONG russe Comité contre la torture, qui avait également reçu une récompense de 10 000 euros. Le Prix Václav Havel prévoit, lui, une dotation de 60 000 euros, dont la moitié sera versée par l’Etat tchèque. Une contribution qui doit beaucoup au ministre des Affaires étrangères, Karel Schwarzenberg :

« Je dois dire que cela me fait plaisir pour plusieurs raisons. Pour avoir collaboré pendant de nombreuses années avec Václav Havel, je sais tout ce qu’il a fait pour le respect des droits de l’homme. Pour lui, c’était une affaire de cœur et ça l’est resté jusqu’aux derniers jours de sa vie. Peu de temps avant de mourir, il a encore rencontré le dalaï-lama et différentes personnalités européennes se consacrant à la question. C’est pourquoi je pense que le prix porte son nom à juste titre. »

Karel Schwarzenberg,  photo: Šárka Ševčíková / ČRo
Le jury du Prix Václav Havel sera composé du président de l’APCE et de six personnes indépendantes reconnues pour leurs qualités morales et leur expertise dans le domaine des droits de l’homme. Après une présélection à Prague de trois candidats, le lauréat sera ensuite choisi à Strasbourg à la veille de la session plénière d’automne de l’ACPE. C’est donc en octobre prochain que l’on connaîtra le nom de la première personne ou organisation luttant pour la défense des droits de l’homme détentrice du Prix Václav Havel.