Emploi : les entreprises tchèques ont retenu les leçons de la crise du coronavirus

Malgré la récession, malgré l’inflation, la majorité des entreprises en République tchèque restent confiantes et envisagent l’avenir à court et moyen termes avec un certain optimisme. Selon une grande enquête menée par le ministère du Travail, elles sont assez peu nombreuses à envisager de licencier leurs employés, préférant faire le dos rond et, en cas de besoin, réaliser des économies sur d’autres postes de dépense.

La crise ? Quelle crise ? À en croire le ministre du Travail et des Affaires sociales, Marian Jurečka, si tout n’est pas rose, il n’y pas lieu non plus, dans l’état actuel des choses, de s’inquiéter outre mesure de l’évolution de la situation sur le marché du travail :

Marian Jurečka | Photo: Roman Vondrouš,  ČTK

« Il n'y a pas de risque de crise fondamentale qui se traduirait par une augmentation extrême du chômage et qui conduirait les entreprises à licencier et à faire des économies massives sur leurs ressources humaines. »

De fait, la République tchèque affiche pour l’heure toujours un taux de chômage parmi les plus faibles au sein de l’Union européenne. Malgré une légère augmentation de 0,2 point, le taux s’est élevé à 3,7 % en décembre, selon l’Office national des statistiques. Le nombre de postes vacants restait supérieur à celui des demandeurs d’emploi, preuve que la pénurie de main-d’œuvre, surtout qualifiée, demeure un casse-tête pour de nombreuses sociétés.

Un constat que confirme Libor Sedláček, directeur marketing et copropriétaire de Gumex, une société d’environ 150 employés répartis sur cinq sites à travers le pays spécialisée dans la production sur mesure de diverses pièces (tuyaux, joints, profilés, courroies...) en caoutchouc :

« Nous sommes habitués à chercher nous-mêmes nos employés, parce que ce ne sont pas eux qui vont venir à nous pour demander du travail. Au contraire, c’est à nous de nous montrer proactifs, de savoir convaincre et apprendre à faire en sorte que le personnel que nous recrutons soit en mesure de faire ce dont nous avons besoin. »

Photo: Gumex

Persuasif, Gumex l’est aussi parce que le niveau des salaires de ses employés a augmenté en moyenne de 10 % l’année dernière, permettant ainsi de compenser la forte inflation (+15 % en 2022) et l’importante perte de pouvoir d’achat qui en a découlé (près de 10 % au 3e trimestre). Pour 2023, en revanche, ne serait-ce qu’en ce début d’année, les perspectives apparaissent moins favorables à une nouvelle croissance des salaires :

« Pour cette année, nous attendons de voir. Nous agirons en fonction de l’évolution de la situation, mais nous devons rester les pieds sur terre et être plus prudents parce que nous nous attendons à de nouvelles difficultés. »

Rien ne sert de licencier s’il faut réembaucher une fois la crise passée

Confrontées à une baisse de la demande et à l’envolée des prix des matières premières, des matériaux et plus encore de l’énergie, les entreprises ont été partiellement rassurées par le plafonnement de ces derniers décidé par le gouvernement à l’automne. Cette mesure n’enlève cependant rien au fait que les coûts de production ont considérablement augmenté en 2022. Vice-président de l’Association de l’industrie et des transports (SP ČR), organisation qui regroupe les employeurs dans ces différents domaines en République tchèque, Jan Rafaj constate lui aussi une approche désormais globalement plus prudente :

Jan Rafaj | Photo: Association de l’industrie et des transports

« Les entreprises qui ont signé des conventions collectives ou qui ont annoncé que des accords avaient été trouvés avec leurs employés, ont procédé à des augmentations qui se situent en moyenne entre 5 et 10 %. Pour cela, elles ont souvent eu recours à des augmentations des bonus salariaux. Néanmoins, nous sommes en présence de nombreuses entreprises qui annoncent qu’en raison de l’augmentation des coûts de production, elles ne peuvent plus se permettre d’augmenter les salaires ou alors très légèrement. »

L’enquête menée par le ministère auprès d’un peu plus de 40 000 entreprises entre novembre et décembre derniers, a également permis de constater que les entreprises avaient tiré les leçons de la crise du coronavirus. Même si elles traversent de nouveau une période difficile, elles préfèrent désormais faire le dos rond et ne plus se débarasser précipitamment de leurs employés, bien conscientes de toute la difficulté de réembaucher lorsque la situation s’améliore.

Source: VIN JD,  Pixabay,  Pixabay License

Ainsi donc, elles ne sont que 11 % à envisager de recourir à des licenciements de leur personnel, et cette menace concerne majoritairement les employés peu qualifiés. Mieux même, 79 % des employeurs ont indiqué en décembre qu’ils prévoyaient de recruter. C’est certes moins qu’au printemps dernier, mais nettement plus que lors de la crise de la Covid.

Autre donnée qui confirme cette tendance à l’optimisme malgré le contexte délicat, près de 88 % des entreprises comptant plus de dix employés estiment que leur situation économique est bonne, voire même très bonne, et affirment vouloir profiter de la crise actuelle pour se développer et, au bout du compte, en sortir plus fortes.